Face à des préoccupations sanitaires croissantes, les autorités canadiennes ont annoncé hier une interdiction complète des importations de pistaches en provenance d’Iran suite à une épidémie généralisée de salmonelle ayant touché plus de 140 personnes à travers le pays. L’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA) a mis en œuvre cette mesure d’urgence après avoir confirmé un lien direct entre les pistaches iraniennes contaminées et cette crise de santé publique qui s’aggrave rapidement.
“Ce n’est pas une décision que nous avons prise à la légère,” a déclaré la ministre de la Santé Anita Wong lors de la conférence de presse d’hier à Ottawa. “Mais lorsque la santé des Canadiens est en jeu, nous devons agir de manière décisive et complète pour protéger les consommateurs pendant que notre enquête se poursuit.”
L’épidémie, qui a débuté début septembre, a entraîné 27 hospitalisations dans six provinces, la majorité des cas étant concentrés en Ontario et en Colombie-Britannique. L’analyse en laboratoire a confirmé la présence de Salmonella Enteritidis, une souche particulièrement virulente pouvant causer des symptômes gastro-intestinaux graves, surtout chez les populations vulnérables comme les enfants, les personnes âgées et celles ayant un système immunitaire affaibli.
Dr. Michael Patel, médecin hygiéniste en chef, a expliqué que la contamination s’est probablement produite pendant la transformation plutôt que lors de la culture. “Nos résultats préliminaires suggèrent qu’une manipulation inadéquate durant la phase post-récolte a introduit la contamination bactérienne,” a-t-il affirmé. “C’est particulièrement préoccupant car la faible teneur en humidité des pistaches inhibe normalement la croissance bactérienne.”
L’interdiction d’importation représente une perturbation importante pour le marché canadien des fruits à coque. L’Iran représente environ 30% des importations canadiennes de pistaches, évaluées à 42 millions de dollars par an selon les données commerciales du Canada. Les grands détaillants, dont Loblaws, Metro et Sobeys, ont déjà lancé des rappels volontaires des produits potentiellement touchés, tandis que l’ACIA a publié une liste complète des articles rappelés sur son site officiel.
Les experts de l’industrie prévoient que l’interdiction créera des défis d’approvisionnement temporaires et de potentielles hausses de prix alors que les importateurs se tournent vers d’autres sources comme les États-Unis et la Turquie. “Nous nous attendons à une augmentation des prix de 15 à 20% à court terme pendant que les chaînes d’approvisionnement s’ajustent,” a noté Samantha Chen, analyste de l’industrie alimentaire au Groupe financier de Toronto. “Toutefois, les consommateurs devraient voir une stabilisation d’ici début 2026, les fournisseurs alternatifs augmentant leur production pour répondre à la demande.”
L’interdiction a également suscité des tensions diplomatiques, le ministère du commerce iranien ayant publié une déclaration qualifiant l’action canadienne de “disproportionnée et potentiellement motivée par des considérations politiques.” Les responsables iraniens maintiennent que leurs exportations de pistaches respectent les normes internationales de sécurité alimentaire et ont demandé l’accès aux résultats des analyses de laboratoire canadiennes.
Pour les consommateurs, les responsables de la santé recommandent de vérifier leurs produits de garde-manger par rapport à la liste de rappel de l’ACIA et de jeter tout produit potentiellement contaminé. Les symptômes d’une infection à la salmonelle comprennent de la fièvre, des crampes abdominales, de la diarrhée et des vomissements, apparaissant généralement 12 à 72 heures après la consommation et pouvant durer jusqu’à une semaine.
Ce n’est pas la première fois que le Canada restreint les pistaches iraniennes. Une interdiction similaire avait été mise en œuvre en 1997 en raison de préoccupations liées aux aflatoxines, bien que cette restriction ait été finalement levée en 2017 après la mise en place de mesures de contrôle de qualité améliorées.
Alors que le système de sécurité alimentaire du Canada fait face à ce nouveau défi, une question plus large se pose : nos chaînes d’approvisionnement alimentaire de plus en plus mondiales devraient-elles s’accompagner de mécanismes de surveillance internationale plus robustes pour prévenir de telles épidémies avant qu’elles ne franchissent les frontières? La réponse pourrait déterminer non seulement l’avenir de nos systèmes de sécurité alimentaire, mais aussi la structure même du commerce agricole international.