L’intégrité de l’enquête sur le système de santé de l’Alberta est en péril alors que son ancienne PDG avertit qu’une vague de désinformation menace de faire dérailler une réforme significative. Dre Verna Yiu, qui a dirigé Alberta Health Services jusqu’en 2022, a exprimé cette semaine ses inquiétudes concernant le discours public entourant l’examen de la gouvernance sanitaire de la province, qui serait de plus en plus contaminé par des faussetés.
“Lorsque des allégations sont faites sans preuves ni contexte, cela compromet l’ensemble du processus d’enquête,” a déclaré Dre Yiu lors d’un symposium sur les soins de santé à Edmonton. “La politisation de l’administration des soins de santé crée des obstacles à une amélioration significative qui affecte ultimement les soins aux patients.”
La controverse découle du démantèlement médiatisé d’Alberta Health Services par la première ministre Danielle Smith l’année dernière, remplaçant le modèle centralisé par quatre organisations distinctes. Cette restructuration a suivi les promesses électorales de Smith de transformer ce qu’elle caractérisait comme une bureaucratie dysfonctionnelle qui a failli aux Albertains pendant la pandémie.
La ministre de la Santé Adriana LaGrange a défendu l’approche du gouvernement, insistant sur le fait que la réorganisation améliorera les services de première ligne. “Nos réformes sont basées sur une consultation approfondie avec les professionnels de la santé et une analyse minutieuse des inefficacités opérationnelles,” a déclaré LaGrange dans une déclaration aux journalistes.
Cependant, des professionnels médicaux à travers la province ont exprimé des préoccupations croissantes. Dr Alika Lafontaine, président de l’Association médicale canadienne, a mis en garde que “un bouleversement administratif sans justification clinique claire risque de perturber des parcours de soins qui ont pris des années à établir.”
La restructuration comporte d’importantes implications financières. Les documents financiers obtenus grâce à des demandes d’accès à l’information révèlent des coûts de transition dépassant 23 millions de dollars au premier trimestre seulement, avec des projections suggérant que le chiffre final pourrait dépasser 85 millions de dollars d’ici la fin de l’année.
Dre Yiu a souligné que la prise de décision fondée sur des preuves doit rester au cœur de toute réforme des soins de santé. “Lorsque nous permettons aux récits politiques de supplanter l’expertise clinique et l’expérience opérationnelle, nous risquons de mettre en œuvre des changements qui semblent bons sur papier mais échouent en pratique,” a-t-elle expliqué.
Les critiques pointent vers les services d’urgence en difficulté de l’Alberta comme preuve que la restructuration pourrait exacerber les problèmes existants. Les temps d’attente dans les principaux hôpitaux d’Edmonton et de Calgary ont augmenté de 37% en moyenne depuis le début de la réorganisation, selon l’analyse des données sanitaires provinciales par CO24 News.
La situation reflète des tensions plus larges dans les systèmes de santé canadiens à l’échelle nationale, où les provinces sont aux prises avec la reprise post-pandémique dans un contexte de pénuries de personnel et de demande accrue. Ce qui distingue l’approche de l’Alberta est l’ampleur et la rapidité du changement administratif sans preuve correspondante d’amélioration des résultats.
Dre Lorian Hardcastle, experte en santé publique de l’Université de Calgary, a noté que “une réforme réussie du système de santé nécessite généralement un engagement approfondi des parties prenantes, des indicateurs clairs de réussite et des méthodes d’évaluation transparentes—des éléments qui semblent appliqués de façon incohérente dans l’approche actuelle de l’Alberta.”
Alors que l’enquête se poursuit, les défenseurs des soins de santé réclament une plus grande transparence. “Les patients méritent de savoir comment ces changements structurels massifs amélioreront leurs soins,” a déclaré Sandra Miller, directrice générale de l’Association des patients de l’Alberta. “Jusqu’à présent, ce lien reste flou.”
La controverse soulève des questions fondamentales sur la gouvernance des soins de santé dans le paysage politique de plus en plus polarisé du Canada. Alors que les provinces cherchent des solutions à des défis communs, les approches fondées sur des preuves prévaudront-elles sur les batailles idéologiques dans la formation de l’avenir de nos systèmes de santé?