Entourée de controverse depuis des années, la statue du premier ministre canadien, Sir John A. Macdonald, a émergé de derrière ses panneaux de protection à Queen’s Park à Toronto. La barrière en bois, installée pendant une période de débat intense sur les figures coloniales dans l’histoire canadienne, a été discrètement retirée cette semaine, signalant ce que certains considèrent comme un tournant dans la conversation en cours sur la commémoration historique.
La statue en bronze de 12 pieds, érigée en 1894, se dresse sur le terrain de l’Assemblée législative de l’Ontario depuis plus d’un siècle, mais est devenue un point de discorde ces dernières années au milieu d’un discours public croissant sur l’héritage complexe de Macdonald. Son rôle dans l’établissement des pensionnats autochtones et la mise en œuvre de politiques qui ont causé des préjudices importants aux communautés autochtones a suscité des appels à retirer la statue des espaces publics.
“Il ne s’agit pas simplement d’une statue,” explique Dr. Amelia Thornton, professeure d’histoire canadienne à l’Université de Toronto. “Elle représente une conversation beaucoup plus large que les Canadiens ont sur la façon dont nous reconnaissons la vérité complète de nos personnages historiques, y compris leurs réalisations parallèlement à leur participation à des politiques coloniales nuisibles.”
Les panneaux de protection ont été initialement installés après plusieurs manifestations sur le site, notamment des protestations où la statue a été éclaboussée de peinture. Des mesures de protection similaires ont été mises en place pour des monuments controversés partout au Canada et à l’international, alors que les communautés sont aux prises avec la façon d’aborder des personnages historiques dont l’héritage est de plus en plus contesté.
Un porte-parole de l’Assemblée législative de l’Ontario a confirmé le retrait mais a refusé de commenter si des mesures de sécurité supplémentaires seraient mises en œuvre. “La décision de retirer les panneaux a été prise après consultation avec les responsables de la sécurité et les parties prenantes concernées,” a noté le porte-parole.
Les leaders autochtones ont exprimé des réactions mitigées face à ce développement. Le Chef Robert Manitowabi de la Première Nation des Lacs du Nord a déclaré à CO24 News que le dévoilement de la statue sans dialogue significatif représente une occasion manquée. “La véritable réconciliation exige une conversation honnête sur ces symboles et ce qu’ils signifient pour différentes communautés,” a-t-il dit.
Le débat s’étend au-delà de Queen’s Park, avec des conversations similaires qui se déroulent partout au Canada concernant les monuments dédiés à des personnages historiques dont l’héritage comprend à la fois des réalisations nationales et des actions maintenant reconnues comme préjudiciables. À Kingston, ville natale de Macdonald, une statue a été temporairement retirée d’un parc public en 2021 suite à un vote du conseil municipal.
Les défenseurs de la préservation du patrimoine soutiennent que le retrait de tels monuments risque d’effacer un important contexte historique. “Nous devons trouver des moyens d’éduquer sur la complexité totale des personnages historiques plutôt que de simplement les retirer de la vue,” a déclaré Margaret Wilkinson de la Société historique de l’Ontario.
La province n’a pas annoncé de plans pour ajouter un contexte éducatif ou des plaques près de la statue, bien que de nombreux historiens et défenseurs autochtones aient demandé de telles mesures si les monuments controversés restent en place.
Alors que les Canadiens continuent de naviguer dans ce terrain complexe de la commémoration historique, la question demeure: comment reconnaître correctement à la fois les réalisations et les échecs de nos personnages historiques tout en avançant vers une réconciliation significative? La réponse ne réside peut-être pas dans la simple présence ou absence de statues en bronze, mais dans les conversations qu’elles suscitent sur notre passé et notre avenir communs.