Dans une mesure sans précédent qui a provoqué des remous dans le paysage des relations de travail au Canada, le gouvernement fédéral est intervenu dans le conflit prolongé de Postes Canada, forçant le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes (STTP) à voter directement sur l’offre finale de contrat de la direction. Cette rare intervention gouvernementale survient après des mois de négociations tendues qui menaçaient de perturber le service postal à travers le pays, alors que les entreprises se préparent pour la période cruciale des fêtes.
Le ministre du Travail, Steven MacKinnon, a annoncé cette directive mardi, citant les “implications économiques significatives” qu’entraînerait une perturbation du service postal. “La décision d’ordonner ce vote n’a pas été prise à la légère,” a déclaré MacKinnon lors d’une conférence de presse à Ottawa. “Après un examen attentif des impacts potentiels sur les Canadiens, les petites entreprises et l’économie en général, nous croyons que donner aux travailleurs l’opportunité directe d’accepter ou de rejeter l’offre est la voie la plus démocratique.”
Le différend porte sur plusieurs questions clés devenues de plus en plus litigieuses dans l’environnement évolutif du service postal canadien. Le STTP, qui représente environ 55 000 travailleurs postaux, a exigé des salaires améliorés qui suivent l’inflation, des dispositions renforcées de sécurité d’emploi et de meilleures mesures de santé et de sécurité pour les travailleurs confrontés à des volumes croissants de colis dus à la croissance du commerce électronique.
L’offre finale de Postes Canada comprend une augmentation salariale annuelle de 3,2% sur quatre ans, des améliorations aux avantages sociaux pour les travailleurs temporaires et des engagements pour répondre aux préoccupations de sécurité au travail. Cependant, la direction du syndicat a qualifié l’offre de “lamentablement inadéquate” pour répondre à la nature changeante du travail postal à l’ère numérique.
“Cette intervention gouvernementale contourne effectivement le processus de négociation collective,” a déclaré Jan Simpson, présidente nationale du STTP. “Nos membres méritent une entente équitable qui reconnaît leurs contributions essentielles, particulièrement après avoir travaillé pendant une pandémie qui a vu des volumes record de colis tout en exposant les travailleurs à des risques sanitaires importants.”
La décision d’imposer un vote sur l’offre finale est permise en vertu du Code canadien du travail, mais a été utilisée avec parcimonie par les gouvernements précédents. Les experts du travail suggèrent que cette démarche reflète une préoccupation gouvernementale croissante concernant les perturbations économiques durant une période déjà marquée par une inflation élevée et des défis dans la chaîne d’approvisionnement.
“Le gouvernement marche sur une ligne fine entre le respect des droits de négociation collective et la protection des intérêts économiques plus larges des Canadiens,” a noté Dr. Sylvia Richardson, professeure de relations de travail à l’Université Queen’s. “Cette intervention pourrait soit résoudre rapidement le différend, soit potentiellement approfondir le fossé entre les parties.”
Les défenseurs des petites entreprises ont largement accueilli favorablement l’intervention. La Fédération canadienne de l’entreprise indépendante estime qu’une perturbation postale prolongée pourrait coûter aux petites entreprises près de 250 millions de dollars par semaine pendant la période critique précédant les fêtes, lorsque beaucoup dépendent des services postaux et de colis tant pour leurs fournitures que pour la satisfaction des clients.
Le vote, qui doit être tenu dans les deux prochaines semaines, met une pression significative sur la direction syndicale. Si les membres acceptent l’offre, le différend prend fin immédiatement. S’ils la rejettent, les deux parties retourneraient à la table de négociation, mais avec le spectre d’une potentielle législation de retour au travail planant en cas de perturbations de service.
Ce différend représente le dernier chapitre de la lutte continue de Postes Canada pour adapter son modèle d’affaires face à la diminution des volumes de courrier et à la concurrence croissante dans le secteur de la livraison de colis. La société d’État a déclaré des pertes d’exploitation au cours des derniers trimestres malgré la croissance de son activité de colis, citant les coûts du maintien d’un service universel à toutes les adresses canadiennes, quelle que soit leur éloignement.
Pour les citoyens canadiens, particulièrement ceux des communautés rurales et éloignées qui dépendent fortement des services postaux, l’issue de ce vote comporte des implications significatives. Les communautés autochtones, les aînés qui comptent sur les médicaments livrés par la poste et les entreprises sans options de livraison alternatives font tous face à des difficultés potentielles en cas de perturbations du service.
Alors que les travailleurs postaux se préparent à voter sur cette offre finale, une question plus large se pose pour la société canadienne : à l’ère de la communication numérique et de la concurrence des services de messagerie privés, quel rôle devrait jouer un service postal public, et quelles obligations avons-nous collectivement pour assurer un traitement équitable de ceux qui maintiennent ce service essentiel?