Dans une intensification significative des efforts de surveillance, Services publics et Approvisionnement Canada (SPAC) a référé deux nouveaux cas présumés de fraude à la Gendarmerie royale du Canada tout en lançant simultanément une action en justice contre un sous-traitant d’un important entrepreneur gouvernemental pour des pratiques de facturation douteuses. Cela marque un tournant dans la responsabilisation des contrats fédéraux alors que les autorités intensifient leur surveillance sur l’utilisation des deniers publics dans le système d’approvisionnement gouvernemental qui représente plusieurs milliards de dollars.
“Lorsque les fonds publics sont potentiellement mal utilisés, ce n’est pas seulement une question financière—c’est une violation de la confiance publique,” a déclaré Martin Cleroux, porte-parole de SPAC, lors d’une entrevue exclusive avec CO24. “Notre ministère s’engage à maintenir l’intégrité du système d’approvisionnement du Canada grâce à une surveillance rigoureuse et des mesures d’application lorsque nécessaire.”
Les procédures judiciaires ciblent un sous-traitant de GC Strategies, une société de conseil qui a obtenu de nombreux contrats fédéraux lucratifs au cours de la dernière décennie. Les documents judiciaires déposés à la Cour fédérale du Canada allèguent des pratiques systématiques de surfacturation, notamment la facturation de services non fournis et l’inflation des taux horaires au-delà des accords contractuels.
Ces cas émergent dans un contexte de préoccupations croissantes concernant les pratiques d’approvisionnement dans plusieurs ministères fédéraux, le Bureau du vérificateur général ayant précédemment signalé d’importantes lacunes dans les protocoles de gestion des contrats. Selon les documents gouvernementaux obtenus grâce aux demandes d’accès à l’information, les enquêtes sur la fraude dans les marchés publics fédéraux ont augmenté de 37% depuis 2021.
Les irrégularités présumées concernent principalement des projets de modernisation informatique, où le gouvernement a investi plus de 3,2 milliards de dollars au cours des cinq dernières années. L’analyse financière montre que ces contrats dépassent fréquemment les projections budgétaires initiales de 42% en moyenne, soulevant des questions sur l’efficacité de la surveillance des dépenses gouvernementales canadiennes.
“La complexité du système d’approvisionnement crée des vulnérabilités,” a expliqué Dr. Amelia Richardson, professeure d’administration publique à l’Université Carleton. “Lorsque les contrats passent par plusieurs sous-traitants, la responsabilité devient diffuse et les opportunités d’irrégularités financières se multiplient.”
Les documents judiciaires détaillent comment le sous-traitant aurait créé des structures de “facturation parallèle” qui obscurcissaient le coût réel des services tout en créant des opportunités de majoration artificielle. Dans un cas particulièrement troublant, des consultants juniors auraient été facturés au tarif de consultants seniors, entraînant une différence de prix de plus de 450 $ par heure.
Ces développements surviennent alors que le Comité des opérations gouvernementales du Parlement poursuit son enquête sur les pratiques d’approvisionnement fédérales, plusieurs témoins ayant fait état de faiblesses systémiques dans les mécanismes de surveillance des contrats. Le président du comité, Julian Martinez, a indiqué que les conclusions pourraient mener à des réformes législatives visant à renforcer les exigences de transparence pour les entrepreneurs gouvernementaux.
Des initiés de l’industrie suggèrent que ces cas ne représentent que “la pointe de l’iceberg” des irrégularités d’approvisionnement. Les protections des dénonciateurs mises en œuvre en 2019 ont permis à davantage d’employés gouvernementaux de signaler des preuves d’irrégularités contractuelles sans crainte de représailles.
Le gouvernement fédéral dépense environ 22 milliards de dollars annuellement en services contractuels, la technologie de l’information représentant le segment à la croissance la plus rapide de ces dépenses. Alors que les initiatives de transformation numérique s’accélèrent dans tous les ministères, l’exposition financière potentielle à la fraude contractuelle augmente proportionnellement.
Le président du Conseil du Trésor, Jean-Yves Duclos, a annoncé le mois dernier que son ministère mettrait en œuvre des procédures de vérification renforcées pour les contrats de grande valeur, incluant la divulgation obligatoire de tous les arrangements de sous-traitance et des exigences plus détaillées en matière de rapports de performance.
Alors que ces procédures judiciaires se déroulent, les Canadiens se demandent: dans une ère de contraintes fiscales et d’incertitude économique, notre système d’approvisionnement peut-il être réformé pour garantir que l’argent des contribuables livre la valeur prévue, ou les vulnérabilités systémiques continueront-elles à miner la confiance du public dans les dépenses gouvernementales?