Les négociations commerciales très attendues entre l’administration Trump et les représentants canadiens se sont brusquement effondrées hier à Ottawa, les deux parties quittant la table après de vifs désaccords concernant la taxe sur les services numériques proposée par le Canada. Cette rupture survient à un moment critique pour les relations commerciales nord-américaines, déjà mises à rude épreuve par les défis de la reprise post-pandémique et les perturbations de la chaîne d’approvisionnement.
“Nous ne pouvons pas et n’accepterons pas une taxation punitive ciblant les entreprises technologiques américaines,” a déclaré le représentant commercial américain William Morris lors d’une conférence de presse tendue. “Le président Trump a clairement indiqué que tout accord doit d’abord protéger l’innovation et les emplois américains.“
Le différend principal porte sur la Taxe sur les Services Numériques (TSN) du Canada, dont la mise en œuvre est prévue le mois prochain, qui imposerait une taxe de 3% sur les revenus générés par les grandes entreprises technologiques sur le territoire canadien. Cette mesure, similaire à celles adoptées dans plusieurs pays européens, vise à garantir que les géants de la technologie paient des impôts là où ils génèrent des revenus, indépendamment de leur présence physique.
La ministre canadienne des Finances, Marie Leblanc, a défendu cette taxe comme nécessaire pour l’équité dans l’économie numérique. “Les entreprises qui gagnent des milliards grâce aux consommateurs canadiens doivent contribuer à notre assiette fiscale comme toute autre entreprise opérant ici,” a-t-elle affirmé. “Il s’agit de créer des règles du jeu équitables, pas de cibler les entreprises américaines.”
Les analystes économiques préviennent que les conséquences pourraient être graves. Le dollar canadien a chuté de 1,8% face au USD dans les heures suivant l’annonce, tandis que la Bourse de Toronto a connu sa plus forte baisse en une seule journée depuis mars 2023.
Pour les fabricants canadiens, particulièrement dans les secteurs automobile et agricole, l’effondrement des pourparlers suscite des craintes de nouvelles menaces tarifaires. “Nous envisageons des perturbations potentielles dans notre relation commerciale la plus importante,” a expliqué Dr. Raymond Chen, professeur d’économie à l’Université de Toronto. “Les entreprises qui dépendent des chaînes d’approvisionnement transfrontalières s’empressent maintenant d’élaborer des plans d’urgence.”
Le différend sur la taxe numérique met en évidence la tension mondiale croissante entre les cadres fiscaux traditionnels et la nature sans frontières de l’économie numérique. Alors que l’OCDE travaille à une solution mondiale, des pays individuels ont avancé avec leurs propres mesures, créant une mosaïque de réglementations que les entreprises multinationales doivent naviguer.
La réaction de l’industrie a été rapide et divisée. Le Conseil canadien de la technologie a salué la position du gouvernement, tandis que l’Association américaine de l’économie numérique a qualifié la taxe de “discriminatoire et nuisible à l’innovation.”
La suite des événements reste incertaine. Des sources au sein du gouvernement canadien suggèrent que le Premier ministre Taylor pourrait contacter directement le président Trump, bien que les négociations directes précédentes entre les dirigeants aient donné des résultats mitigés. Pendant ce temps, les entreprises des deux côtés de la frontière se préparent à d’éventuelles mesures de représailles qui pourraient perturber les 1,7 milliard de dollars de biens et services qui traversent quotidiennement la frontière canado-américaine.
Pour les consommateurs, le différend commercial pourrait bientôt se traduire par des prix plus élevés et un choix réduit si les entreprises répercutent les coûts accrus ou retirent certains services du marché canadien.
Alors que les partenaires commerciaux les plus intégrés d’Amérique du Nord s’orientent vers une potentielle guerre commerciale, la question demeure: le pragmatisme économique finira-t-il par l’emporter sur les postures politiques, ou sommes-nous témoins du début d’une refonte fondamentale de la relation économique du continent?