L’autoroute Transcanadienne a connu une congestion sans précédent lundi alors que des membres de la Première Nation Biigtigong Nishnaabeg ont orchestré un ralentissement stratégique sur un tronçon critique de l’autoroute 17 près de Marathon, en Ontario. Cette manifestation soigneusement planifiée — et non un blocage — visait à mettre en lumière les préoccupations croissantes des Autochtones concernant la controversée Loi sur les mines de l’Ontario et son application sur les territoires traditionnels.
“Il ne s’agit pas de perturber pour le plaisir de perturber,” a expliqué le Chef Duncan Michano de Biigtigong Nishnaabeg. “Nous exerçons notre droit souverain de protéger des terres qui ont soutenu notre peuple pendant d’innombrables générations, tout en sensibilisant à un système de réglementation minière qui continue de marginaliser les voix autochtones.”
La manifestation a créé un ralentissement continu sur environ 40 kilomètres, avec des véhicules circulant à vitesse réduite entre Marathon et la communauté de Biigtigong Nishnaabeg. Les manifestants ont distribué des dépliants d’information aux automobilistes concernés, expliquant leurs préoccupations concernant les lois minières de l’Ontario et les pratiques d’extraction des ressources.
Au cœur du différend se trouve le système de “libre accès” de l’Ontario, qui permet aux sociétés minières de jalonner des claims sur les terres de la Couronne avec des exigences minimales de consultation. Cette approche a déclenché à plusieurs reprises des controverses parmi les communautés des Premières Nations qui soutiennent qu’elle mine leurs droits issus de traités et les protections constitutionnelles concernant les territoires traditionnels.
“Le cadre réglementaire actuel permet essentiellement aux intérêts miniers de jalonner des claims sur nos terres ancestrales sans consentement véritable,” a déclaré la porte-parole de la communauté, Sarah Desmoulin. “Nous avons tenté le dialogue par les canaux établis pendant des années, mais nos préoccupations continuent d’être mises de côté en faveur de politiques privilégiant l’extraction.”
Les données provinciales révèlent plus de 31 000 claims miniers actifs dans le Nord de l’Ontario, dont beaucoup chevauchent des territoires où les Premières Nations affirment leurs droits ancestraux et issus de traités. Le gouvernement ontarien a défendu sa réglementation minière comme équilibrant le développement économique avec les considérations environnementales et culturelles, mais les critiques pointent des échecs systémiques dans le respect du devoir de consulter les communautés autochtones.
L’action de lundi s’inscrit dans le contexte de tensions nationales plus larges concernant le développement des ressources sur les terres autochtones. Le mois dernier, l’Assemblée des Premières Nations a adopté une résolution appelant à une réforme complète des lois minières provinciales à travers le Canada pour les aligner sur la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, que le Canada a formellement adoptée en 2021.
Les analystes économiques notent que la manifestation souligne les risques commerciaux croissants associés à l’incertitude réglementaire dans le secteur minier. “Les entreprises reconnaissent de plus en plus que l’acceptabilité sociale est aussi précieuse que les permis gouvernementaux,” a expliqué Dre Miranda Chen, professeure d’économie des ressources à l’Université Lakehead. “Les investisseurs intègrent maintenant les relations autochtones dans leurs évaluations des risques pour les projets miniers canadiens.”
La Police provinciale de l’Ontario a maintenu une présence pendant la manifestation de lundi mais n’a signalé aucun incident ni arrestation. La protestation s’est terminée pacifiquement en fin d’après-midi après avoir réussi à attirer l’attention sur les préoccupations de la communauté.
Le Chef Michano a indiqué que bien que cette action soit terminée, leur plaidoyer se poursuivra. “Nous restons ouverts au dialogue constructif avec les autorités provinciales, mais un changement significatif exige la reconnaissance que le système actuel désavantage fondamentalement les détenteurs de droits autochtones.”
Alors que les pressions d’extraction de ressources s’intensifient dans le Nord de l’Ontario, poussées par la demande mondiale croissante de minéraux critiques essentiels aux technologies vertes, les lois minières provinciales pourront-elles évoluer pour honorer véritablement les droits autochtones tout en facilitant un développement responsable qui profite à toutes les parties prenantes?