Les retards dans l’intervention d’urgence en santé mentale au Canada suscitent l’inquiétude

Olivia Carter
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Aux premières heures d’un matin glacial de janvier, Sarah Chen a appelé le 911 après que son fils adolescent ait subi une grave crise de santé mentale. Ce qui a suivi n’était pas l’intervention rapide qu’elle espérait désespérément, mais plutôt une attente angoissante de quatre heures avant l’arrivée des services d’urgence. À ce moment-là, son fils était tombé dans un sommeil épuisé, laissant passer des occasions cruciales d’intervention et une famille se sentant abandonnée par un système censé les protéger.

“On nous avait dit d’appeler si la situation s’aggravait, que l’aide viendrait,” a raconté Chen, la voix brisée. “Mais quand nous en avions le plus besoin, le système nous a laissé tomber. Quatre heures, c’est une éternité quand quelqu’un que vous aimez est en crise.”

L’expérience de Chen est loin d’être unique. À travers le Canada, de plus en plus d’indices suggèrent que les délais d’intervention d’urgence en santé mentale atteignent des niveaux dangereux, créant ce que les experts décrivent comme une “deuxième crise” qui se superpose à l’urgence initiale. Selon les données obtenues auprès des services d’urgence de cinq grandes municipalités canadiennes, les temps de réponse pour les appels liés à la santé mentale ont augmenté en moyenne de 37 % au cours des trois dernières années.

La Dre Maya Krishnan, directrice de la psychiatrie d’urgence à l’Hôpital général de Toronto, évoque un concours de circonstances parfait. “Nous constatons une demande record de services de santé mentale tout en faisant face à des pénuries de personnel soignant et à des infrastructures de crise inadéquates,” a-t-elle expliqué lors d’une entrevue avec CO24. “La pandémie a considérablement accéléré les besoins en santé mentale tout en mettant à rude épreuve nos systèmes d’intervention déjà fragiles.”

Les conséquences de ces retards vont bien au-delà du simple inconvénient. Une étude récente de l’Association canadienne pour la santé mentale a montré qu’une intervention tardive dans les crises aiguës de santé mentale est corrélée à des résultats plus médiocres, notamment des taux d’hospitalisation plus élevés et des périodes de rétablissement plus longues. Pour les personnes souffrant de psychose, d’idées suicidaires ou de graves crises d’angoisse, ce sont les minutes — et non les heures — qui peuvent déterminer les résultats critiques.

À Vancouver, où les temps de réponse ont augmenté de 42 % depuis 2019, les autorités ont commencé à mettre en place des équipes d’urgence spécialisées en santé mentale qui fonctionnent indépendamment des services d’urgence traditionnels. Ces équipes, composées d’infirmières psychiatriques et de travailleurs sociaux, visent à fournir des soins plus appropriés et plus rapides tout en réduisant la charge de travail de la police et des ambulanciers.

“Nous avons reconnu que le modèle traditionnel ne fonctionne pas,” a déclaré la conseillère municipale de Vancouver, Amita Sharma. “Quand quelqu’un vit une crise de santé mentale, envoyer des agents armés aggrave souvent la situation au lieu de la désamorcer. Nos équipes spécialisées abordent ces appels avec une formation spécifiquement adaptée aux urgences de santé mentale.”

Malgré ces innovations, le financement demeure un obstacle majeur à l’échelle nationale. Une analyse approfondie des budgets provinciaux de santé révèle que, bien que la santé mentale représente environ 30 % du fardeau des maladies au Canada, elle ne reçoit en moyenne que 7 % du financement des soins de santé dans les provinces. Cette disparité crée ce que les défenseurs de la santé mentale appellent un “écart de traitement” qui se manifeste le plus visiblement pendant les situations d’urgence.

“Nous continuons à traiter la santé mentale comme si elle était moins urgente que la santé physique,” a déclaré Michael Taylor, directeur général de la Coalition canadienne pour la réforme de la santé mentale. “Si quelqu’un appelait pour des douleurs thoraciques et attendait quatre heures une ambulance, l’indignation publique serait générale. Pourtant, nous avons d’une certaine façon normalisé ces délais pour les urgences psychologiques.”

Pour des familles comme les Chen, les discussions politiques n’apportent que peu de réconfort. Le fils de Sarah a finalement reçu un traitement, mais seulement après qu’elle l’ait conduit elle-même au service des urgences le lendemain — une pratique que les experts déconseillent dans les cas graves mais à laquelle de nombreuses familles ont recours lorsque les réponses officielles tardent.

“Ce qui me tient éveillée la nuit, c’est de penser aux familles qui n’ont pas de moyen de transport, qui ne parlent pas couramment français ou anglais, ou qui n’ont pas les ressources pour naviguer dans ces systèmes défaillants,” a dit Chen. “Qu’advient-il d’elles lorsque les appels à l’aide restent sans réponse?”

Alors que le Canada continue de faire face aux défis de santé mentale post-pandémiques, la question demeure : nos systèmes d’intervention d’urgence évolueront-ils assez rapidement pour répondre aux besoins croissants? Pour des milliers de Canadiens qui vivent des crises de santé mentale chaque année, la réponse pourrait littéralement être une question de vie ou de mort.

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