Dans une démonstration extraordinaire d’unité nationale, le premier ministre Justin Trudeau a convoqué une réunion virtuelle d’urgence avec les premiers ministres provinciaux et des ministres clés du cabinet jeudi soir, alors que le Canada fait face à la menace économique soudaine posée par les nouvelles propositions tarifaires annoncées par Washington.
Ce sommet organisé à la hâte survient moins de 24 heures après que la présidente américaine Harris ait révélé des plans pour de nouveaux droits d’importation visant l’acier, l’aluminium et les produits agricoles canadiens—une mesure qui, selon les analystes, pourrait affecter plus de 47 milliards de dollars d’échanges transfrontaliers annuellement.
“Nous faisons face à un moment critique qui nécessite une réponse canadienne unifiée,” a déclaré Trudeau aux leaders assemblés, selon des sources familières avec les discussions. “Les tarifs proposés représentent non seulement un défi économique, mais un test fondamental pour notre relation commerciale avec notre partenaire le plus proche.”
La réunion, qui s’est étendue sur près de trois heures, s’est concentrée sur l’élaboration d’une stratégie fédérale-provinciale coordonnée qui équilibre l’engagement diplomatique avec d’éventuelles mesures de représailles. Des sources indiquent que les discussions étaient remarquablement exemptes des divisions partisanes qui ont caractérisé les récentes relations fédérales-provinciales sur la politique climatique et le financement des soins de santé.
La première ministre de l’Alberta, Danielle Smith, souvent critique vocale des politiques fédérales, a adopté un ton collaboratif après la réunion. “Quand il s’agit de défendre les travailleurs et les industries canadiennes contre des pratiques commerciales déloyales, nous sommes unis avec Ottawa,” a affirmé Smith. “Il ne s’agit pas de politique—il s’agit de protéger des centaines de milliers d’emplois canadiens.”
L’analyse économique présentée lors du sommet a dressé un tableau sobre. Le ministère des Finances prévoit que les tarifs pourraient réduire la croissance du PIB canadien de 0,8 point de pourcentage et potentiellement éliminer jusqu’à 85 000 emplois dans les secteurs de la fabrication, de l’extraction des ressources et de l’agriculture.
Le premier ministre du Québec François Legault a souligné l’impact disproportionné que les mesures proposées auraient sur l’industrie de l’aluminium de sa province. “Nous parlons de communautés où un emploi sur trois dépend directement ou indirectement de la production d’aluminium,” a déclaré Legault. “Ces tarifs ne sont pas seulement des chiffres sur une feuille de calcul—ils menacent la subsistance de régions entières.”
Le cabinet fédéral envisage plusieurs options de réponse, notamment des contre-tarifs ciblés sur les importations américaines, des contestations via les mécanismes de règlement des différends de l’ALENA 2.0 et l’Organisation mondiale du commerce, ainsi que des appels diplomatiques directs aux principaux leaders du Congrès américain.
La ministre du Commerce international, Mary Ng, a confirmé qu’elle se rendra à Washington la semaine prochaine pour rencontrer son homologue américain. “Nous nous engageons à résoudre ce problème par le dialogue en premier lieu,” a déclaré Ng. “Le Canada et les États-Unis entretiennent la relation commerciale la plus réussie au monde, avec près de 2 milliards de dollars en biens et services traversant notre frontière quotidiennement.”
Des représentants des secteurs touchés ont été invités à participer à une séance d’information technique de suivi prévue pour lundi. L’Association canadienne des producteurs d’acier estime que le tarif proposé de 25 % sur les produits d’acier augmenterait les coûts pour les fabricants canadiens d’environ 3,4 milliards de dollars par année.
“La nature intégrée des chaînes d’approvisionnement nord-américaines signifie que ces tarifs finiront par nuire également aux consommateurs et aux entreprises américains,” a noté Perrin Beatty, président de la Chambre de commerce du Canada. “Des coûts d’intrants plus élevés seront répercutés sur les consommateurs américains à un moment où l’inflation demeure une préoccupation importante.”
Alors que les efforts diplomatiques s’intensifient, la question fondamentale demeure: le Canada peut-il naviguer avec succès dans ces tensions commerciales sans déclencher une confrontation économique plus large avec son plus grand partenaire commercial, ou sommes-nous témoins du début d’une nouvelle ère plus protectionniste dans le commerce nord-américain?