Les paisibles communautés côtières du Canada atlantique connaissent une transformation remarquable, défiant des décennies de stagnation économique et de déclin démographique. Un virage stratégique vers l’immigration est devenu le catalyseur d’une relance économique sans précédent à travers la Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick, l’Île-du-Prince-Édouard et Terre-Neuve-et-Labrador.
“Nous assistons à ce que de nombreux économistes considèrent comme un petit miracle,” affirme Dre Elena Barkley, économiste principale au Conseil économique des provinces atlantiques. “Des régions autrefois définies par l’émigration et le vieillissement démographique comptent maintenant parmi les économies canadiennes à la croissance la plus rapide, principalement grâce aux nouveaux arrivants qui s’établissent et créent des opportunités.”
Les chiffres racontent une histoire convaincante. Depuis 2016, le Canada atlantique a accueilli plus de 62 000 résidents permanents, avec des taux d’immigration annuels qui ont triplé dans certaines provinces. Plus significativement, les taux de rétention—historiquement un défi pour la région—sont passés de moins de 50 % à environ 75 % en Nouvelle-Écosse et au Nouveau-Brunswick.
Ce changement démographique a déclenché d’importants dividendes économiques. Les marchés immobiliers se sont stabilisés dans des communautés auparavant en déclin, avec une activité de construction atteignant des niveaux jamais vus depuis les années 1970. À Halifax seulement, plus de 2 500 nouveaux logements ont été approuvés l’année dernière, avec des booms de construction similaires dans des centres plus petits comme Moncton et Charlottetown.
Les impacts sur le marché du travail ont été tout aussi transformateurs. “Nous sommes passés d’entreprises fermant en raison de pénuries de main-d’œuvre à une nouvelle ère d’expansion,” explique James McPherson, président de la Chambre de commerce de l’Atlantique. “Des secteurs allant de la santé à la technologie signalent des gains de productivité significatifs, et les taux d’entrepreneuriat chez les nouveaux arrivants dépassent les moyennes nationales.”
En effet, les entreprises fondées par des immigrants ont créé plus de 14 000 emplois dans la région depuis 2018, selon les recherches de CO24 Affaires. Ces entreprises vont des petites exploitations familiales aux startups innovantes s’adressant aux marchés mondiaux.
Le Programme d’immigration de l’Atlantique, lancé comme projet pilote en 2017 et rendu permanent en 2022, a joué un rôle déterminant dans ce succès. Contrairement aux voies d’immigration traditionnelles, le programme connecte directement les employeurs avec les talents internationaux et offre un soutien complet à l’établissement. Les programmes de nomination provinciale ont également évolué pour cibler des besoins économiques spécifiques.
“Ce qui distingue l’approche du Canada atlantique, c’est l’accent mis sur l’intégration communautaire,” note l’experte en politique d’immigration Dre Sarah Thompson. “Plutôt que de traiter les nouveaux arrivants simplement comme des unités économiques, il y a un véritable accent sur la cohésion sociale et le sentiment d’appartenance.”
Les communautés ont répondu avec des initiatives d’accueil innovantes. Le programme “Voisins du monde” de Moncton jumelle des familles de nouveaux arrivants avec des résidents locaux pour des échanges culturels et du réseautage, tandis que des communautés rurales comme le comté de Colchester en Nouvelle-Écosse ont créé des centres de ressources spécialisés pour les immigrants qui combinent services d’emploi et activités sociales.
Les effets économiques s’étendent au-delà de la création immédiate d’emplois. Les dépenses de consommation ont augmenté d’environ 4,3 % par an depuis 2018, dépassant la moyenne nationale. Les recettes fiscales ont également augmenté, permettant aux municipalités de réinvestir dans les infrastructures et les services qui profitent à tous les résidents.
Tout le monde n’a cependant pas embrassé ces changements. Des préoccupations concernant l’abordabilité du logement ont émergé sur des marchés auparavant accessibles, et certaines communautés signalent des défis d’intégration alors que la démographie culturelle change rapidement. Des médias locaux Nouvelles du Canada ont documenté des tensions occasionnelles concernant les différences culturelles et l’allocation des ressources.
“Nous devons reconnaître que les changements démographiques rapides entraînent des difficultés d’adaptation,” admet Katherine Morgan, mairesse de Fredericton. “Mais l’alternative—un déclin démographique continu et une contraction économique—était bien plus préoccupante pour notre avenir.”
Les gouvernements provinciaux de toute la région ont répondu par des initiatives ciblées pour relever ces défis. La Nouvelle-Écosse a récemment annoncé un fonds d’accélération du logement de 30 millions de dollars ciblant spécifiquement les communautés à fort taux d’immigration, tandis que le Nouveau-Brunswick a élargi ses programmes de formation linguistique pour faciliter l’intégration en milieu de travail.
L’expérience du Canada atlantique offre de précieuses leçons pour d’autres régions confrontées à des défis démographiques. Au cœur de son succès se trouve l’intégration des objectifs économiques avec le développement communautaire, créant un environnement où les nouveaux arrivants se sentent à la fois nécessaires et bienvenus.
“Ce qui se passe au Canada atlantique représente un puissant contre-récit aux visions simplistes de l’immigration,” observe le sociologue Dr Martin Chen. “Cela démontre que lorsqu’elle est correctement structurée et soutenue, l’immigration peut transformer des régions aux prises avec un déclin démographique.”
Alors que des communautés à travers le Canada et au-delà sont aux prises avec le vieillissement de la population et des pénuries de main-d’œuvre, la renaissance du Canada atlantique stimulée par l’immigration soulève une question essentielle : ce modèle d’immigration économique intégrée à la communauté pourrait-il fournir un plan pour revitaliser d’autres régions en déclin, ou les conditions spécifiques du Canada atlantique sont-elles trop uniques pour être reproduites ailleurs?