Le compte à rebours est lancé pour les entreprises de la Colombie-Britannique alors que la date limite du 1er juillet pour la conformité à l’ACEUM approche, poussant plusieurs à revoir en urgence leurs chaînes d’approvisionnement et leurs processus de documentation. À moins de trois mois de l’échéance, les entreprises de toute la province risquent des perturbations commerciales si elles ne respectent pas les exigences rigoureuses de l’Accord Canada–États-Unis–Mexique.
“Nous voyons un nombre important d’entreprises qui n’étaient simplement pas conscientes de l’ampleur de ces changements,” explique Martin Reynolds, consultant en commerce international à la Chambre de commerce de la C.-B. “Plusieurs pensaient que la transition de l’ALENA serait simple, mais la réalité implique des ajustements substantiels aux processus de documentation et de vérification des chaînes d’approvisionnement.”
L’accord, qui a remplacé l’ALENA en 2020, contient des règles d’origine plus rigoureuses que les entreprises doivent satisfaire pour bénéficier des échanges en franchise de droits. Pour le secteur manufacturier de la C.-B., particulièrement dans l’aérospatiale, les composants automobiles et l’industrie textile, ces changements exigent un suivi méticuleux de la provenance des matériaux et des méthodes de transformation des produits.
Selon une récente enquête de la Fondation Canada Ouest, environ 42% des exportateurs de la C.-B. se déclarent mal préparés à la mise en œuvre complète de l’ACEUM, les petites et moyennes entreprises faisant face aux plus grands défis. La fondation estime que la non-conformité pourrait coûter aux entreprises provinciales plus de 300 millions de dollars annuellement en avantages perdus d’exemption de droits et en pénalités administratives.
La ministre provinciale du Développement économique, Jennifer Bradley, a reconnu ces préoccupations lors de la conférence de presse d’hier à Victoria. “Nous reconnaissons la pression que ces exigences exercent sur notre communauté d’affaires, surtout après les défis liés à la reprise post-pandémique. Le ministère a mis en place un bureau de soutien dédié à la conformité ACEUM et organise des ateliers virtuels hebdomadaires pour aider les entreprises pendant cette transition.”
Les exigences de conformité vont au-delà de la simple paperasserie. Les entreprises doivent mettre en œuvre des systèmes de traçabilité complets qui vérifient l’origine des composants tout au long de leurs chaînes d’approvisionnement—une tâche particulièrement difficile pour les entreprises ayant des processus de fabrication complexes ou dépendantes de fournisseurs internationaux.
MedTech Solutions, fabricant de dispositifs médicaux basé à Vancouver, a investi plus de 200 000 $ dans de nouveaux systèmes de conformité. “Nous avons essentiellement dû reconstruire tout notre processus de documentation de la chaîne d’approvisionnement,” déclare la PDG Sarah Chen. “Pour les petites entreprises sans équipes de conformité dédiées, cela représente un fardeau énorme auquel plusieurs n’étaient pas préparées.”
Les experts en commerce recommandent aux entreprises de prendre des mesures immédiates, notamment en effectuant des audits complets de leurs chaînes d’approvisionnement, en mettant en œuvre des solutions de traçabilité numérique et en envisageant, lorsque possible, de rapatrier certains éléments de production en Amérique du Nord.
Le Conseil des affaires de la C.-B. s’est associé aux responsables fédéraux du commerce pour offrir des évaluations de conformité accélérées aux entreprises les plus à risque. “Ce n’est pas quelque chose que les entreprises peuvent se permettre d’aborder à la dernière minute,” avertit le président du conseil, Greg Wilson. “Les processus de vérification sont longs et les exigences de documentation étendues. Les entreprises qui commencent maintenant courront quand même contre la montre.”
Pour les secteurs vitaux de l’économie de la C.-B. que sont la foresterie et l’agriculture, les enjeux sont particulièrement élevés. Les produits qui ne répondent pas aux exigences de l’ACEUM pourraient faire face à des tarifs de 5 à 25% à l’entrée sur le marché américain, ce qui pourrait les rendre non compétitifs face aux alternatives domestiques américaines.
Alors que les entreprises naviguent à travers ces défis, les analystes économiques se demandent si des mécanismes de soutien suffisants sont en place pour aider les petites entreprises à gérer la transition. Avec des chaînes d’approvisionnement mondiales déjà sous pression en raison de l’inflation et des défis logistiques persistants, la communauté d’affaires de la C.-B. sortira-t-elle de cet obstacle réglementaire avec des relations commerciales nord-américaines renforcées, ou la conformité à l’ACEUM créera-t-elle un obstacle supplémentaire à la reprise économique post-pandémique?