Face à l’escalade de la violence contre ceux qui servent en première ligne de la sécurité publique, un élan de soutien se développe à travers le Canada pour renforcer les protections juridiques des premiers répondants et des travailleurs de la santé. L’inquiétante montée des agressions a suscité des appels urgents, tant des organisations professionnelles que des législateurs, pour modifier le Code criminel et établir des mesures dissuasives plus robustes contre les attaques visant ceux qui consacrent leur vie à sauver celle des autres.
“Nous constatons des niveaux d’agression sans précédent dirigés contre les ambulanciers, les infirmières et les pompiers,” explique Dr. Marcus Benevides, président de l’Association canadienne des médecins d’urgence. “Ce qui était autrefois considéré comme rare est devenu un phénomène presque quotidien dans de nombreux centres urbains, laissant nos travailleurs essentiels traumatisés et nos systèmes de santé sous tension.”
Les statistiques récentes dressent un tableau inquiétant, les données de Santé Canada révélant une augmentation de 43% des agressions physiques signalées contre les travailleurs de la santé au cours des trois dernières années. Les ambulanciers des grandes villes canadiennes rapportent qu’environ un appel sur quatre implique désormais une forme d’agression verbale ou physique.
L’Association des professionnels de la santé du Manitoba est devenue particulièrement vocale suite à plusieurs attaques médiatisées à Winnipeg. “Quand nos membres répondent aux appels d’urgence, ils entrent de plus en plus dans des situations où ils deviennent des cibles plutôt que des aidants,” affirme la présidente de l’Association, Leanne Sanders. “Le bilan psychologique est immense, et nous voyons des professionnels expérimentés quitter le domaine.”
Plusieurs provinces ont déjà mis en œuvre des mesures localisées pour faire face à la crise. L’Alberta a récemment renforcé les sanctions pour les agressions survenant dans les services d’urgence, tandis que la Colombie-Britannique a élargi la présence de sécurité dans les établissements de santé à haut risque. Cependant, les défenseurs soutiennent qu’une approche fédérale à travers des amendements au Code criminel offrirait une protection plus cohérente à l’échelle nationale.
La législation proposée, qui gagne actuellement du terrain dans les cercles parlementaires, créerait une infraction spécifique pour l’agression des premiers répondants et des travailleurs de la santé avec des peines minimales obligatoires. Cette approche reflète celle adoptée dans plusieurs États américains et au Royaume-Uni, où des cadres juridiques similaires ont montré des résultats prometteurs dans la réduction des taux d’incidents.
“Les dispositions actuelles ne reflètent simplement pas la gravité et les conséquences de ces attaques,” déclare la députée fédérale Catherine Moreau, qui mène la poussée législative. “Quand un ambulancier est agressé, ce n’est pas seulement une attaque contre un individu—c’est une attaque contre notre système entier d’intervention d’urgence et met potentiellement en danger d’autres personnes qui attendent des soins.”
Les responsables des forces de l’ordre ont exprimé leur soutien aux changements proposés, notant que des directives plus claires aideraient les procureurs à poursuivre les charges appropriées. “Actuellement, ces cas aboutissent souvent à des accusations moindres en raison de divers facteurs atténuants invoqués par les accusés,” explique le surintendant de la police de Winnipeg, James Taylor. “Une législation plus spécifique aiderait à combler ces lacunes.”
Les critiques des amendements proposés avertissent que l’adressage des causes profondes—y compris les crises de santé mentale, la toxicomanie et les déficiences systémiques des soins de santé—devrait accompagner toute mesure punitive. Les défenseurs de la santé mentale soulignent que de nombreuses agressions se produisent lorsque les individus sont en détresse psychologique ou subissent une psychose induite par la drogue.
“Nous avons besoin d’une approche globale qui inclut à la fois la responsabilisation et l’adressage des facteurs sous-jacents,” affirme Dr. Emily Kwon, directrice de l’Institut canadien de politique de santé mentale. “Simplement augmenter les sanctions sans élargir les services de santé mentale pourrait faire rater une opportunité de prévention significative.”
Les syndicats de travailleurs de la santé ont proposé des mesures supplémentaires au-delà des amendements au Code criminel, notamment des systèmes de signalement obligatoire, une formation améliorée en désescalade, des améliorations de la conception des installations et de meilleurs ratios de personnel pour réduire les situations volatiles.
Alors que les responsables fédéraux soupèsent ces considérations complexes, le coût humain continue d’augmenter. L’ambulancier Jordan Nesbitt, qui a nécessité une intervention chirurgicale après avoir été attaqué en répondant à un appel pour surdose à Vancouver le mois dernier, représente le visage humain de ces statistiques.
“Je suis devenu ambulancier pour aider les gens dans leurs pires moments,” a confié Nesbitt à CO24 durant sa convalescence. “Maintenant, je me demande si je peux continuer dans cette profession que j’aime quand le risque de préjudice est devenu si important.”
Alors que les législateurs débattent de la réponse législative appropriée, une question persiste qui touche chaque Canadien: dans une société où ceux qui se précipitent vers le danger pour sauver les autres deviennent de plus en plus des cibles eux-mêmes, quelle responsabilité portons-nous collectivement pour assurer leur protection pendant qu’ils assurent la nôtre?