Dans une démonstration de solidarité transfrontalière sans précédent, les associations d’affaires de l’Ontario et du Michigan ont conjointement tiré la sonnette d’alarme concernant ce qu’elles décrivent comme des “politiques protectionnistes” menaçant la relation économique intégrée entre le Canada et les États-Unis. Cet avertissement survient à un moment critique alors que les deux nations se préparent à d’éventuelles renégociations des cadres commerciaux qui ont soutenu le commerce nord-américain depuis des décennies.
La déclaration conjointe—émise par la Chambre de commerce de l’Ontario et la Chambre de commerce du Michigan—souligne les préoccupations croissantes selon lesquelles des politiques économiques de plus en plus nationalistes pourraient gravement perturber les 2,6 milliards de dollars d’échanges commerciaux quotidiens traversant la frontière canado-américaine. Ces organisations, représentant des milliers d’entreprises des deux côtés de la frontière, ont souligné que la récente rhétorique politique menace de saper ce qui a historiquement été le partenariat commercial le plus réussi au monde.
“Ce que nous observons est un dangereux virage vers un nationalisme économique qui ne reconnaît pas la nature profondément intégrée de nos économies,” a déclaré Rocco Rossi, président de la Chambre de commerce de l’Ontario. “Près de 80% des exportations de l’Ontario sont destinées aux marchés américains, soutenant des millions d’emplois dans nos deux régions.”
Le corridor économique Michigan-Ontario représente l’une des routes commerciales les plus fréquentées en Amérique du Nord, avec des chaînes d’approvisionnement automobile particulièrement vulnérables à toute perturbation. Selon une récente analyse économique, environ 150 000 personnes traversent quotidiennement la frontière pour le travail, les affaires ou le tourisme—créant un écosystème économique qui a prospéré dans des conditions commerciales relativement ouvertes.
Les politiques comme la Loi américaine sur la réduction de l’inflation suscitent une inquiétude particulière, les deux chambres la caractérisant comme contenant des dispositions problématiques “Buy American” qui menacent d’exclure les fabricants canadiens des chaînes d’approvisionnement critiques. Les groupes d’affaires ont noté que de telles politiques ignorent la réalité que de nombreux produits traversent la frontière plusieurs fois pendant la production, rendant les distinctions nationales de plus en plus arbitraires.
Le moment choisi pour cet avertissement conjoint est particulièrement significatif alors que l’Accord Canada-États-Unis-Mexique (ACEUM) approche de sa première révision en 2026. Les experts en commerce suggèrent que les pressions politiques dans les deux pays pourraient transformer ce qui était prévu comme un examen technique en une renégociation plus fondamentale, surtout si certaines factions politiques gagnent en influence lors des prochaines élections.
La modélisation économique réalisée par les deux chambres suggère que l’introduction même de barrières commerciales modestes pourrait réduire la croissance du PIB jusqu’à 0,5% dans les régions frontalières et éliminer des milliers d’emplois dans les communautés à forte concentration manufacturière déjà aux prises avec des transitions économiques.
“La nature intégrée de nos économies signifie que les politiques protectionnistes ne nuisent pas seulement à l’autre pays—elles nous nuisent à tous les deux,” a expliqué Jim Holcomb, président de la Chambre du Michigan. “Quand une usine automobile du Michigan ne peut pas obtenir des pièces des fournisseurs ontariens en raison de restrictions commerciales, ce sont les travailleurs et les consommateurs américains qui en paient ultimement le prix.”
Les chambres ont appelé à l’établissement d’une commission binationale permanente pour traiter les irritants commerciaux avant qu’ils ne s’intensifient en disputes plus importantes. Elles ont également exhorté les citoyens des deux pays à reconnaître que le commerce transfrontalier a été globalement positif, malgré les récits politiquement motivés suggérant le contraire.
L’avertissement survient alors que la politique commerciale du Canada fait l’objet d’un examen croissant au niveau national, certains analystes suggérant qu’une dépendance excessive aux marchés américains a rendu l’économie canadienne vulnérable aux changements politiques au sud de la frontière. Pendant ce temps, les stratégies de développement économique du Michigan ont de plus en plus souligné l’importance de maintenir un accès transparent aux fournisseurs et marchés canadiens.
Alors que les deux nations approchent des cycles électoraux qui pourraient remodeler les paysages politiques, une question fondamentale émerge : la relation économique profondément intégrée entre le Canada et les États-Unis peut-elle résister à la marée montante du nationalisme économique, ou sommes-nous témoins du début d’un découplage douloureux qui diminuerait la prospérité des deux côtés de la frontière?