Dans une bataille juridique sans précédent qui se déroule en Colombie-Britannique, un propriétaire de ferme s’apprête à porter devant la Cour suprême du Canada son combat contre l’abattage ordonné par le gouvernement de 400 autruches, ouvrant la voie à une décision historique sur les protocoles de gestion des maladies animales.
Le différend a commencé lorsque les responsables de l’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA) ont détecté la grippe aviaire dans une ferme de la région de la vallée du Fraser en C.-B., ordonnant rapidement la destruction de toute la population d’autruches évaluée à environ 2 millions de dollars. Les propriétaires de la ferme, qui ont choisi de rester anonymes pendant le litige en cours, soutiennent que l’ordre d’abattage est disproportionné et manque de justification scientifique.
“Ces oiseaux représentent non seulement notre gagne-pain, mais aussi des années d’élevage minutieux et de soins spécialisés”, a déclaré le représentant de la ferme dans une déclaration obtenue par CO24. “Nous avons effectué des tests indépendants qui montrent que l’infection est isolée à une petite partie du troupeau, ce qui rend un abattage complet inutile et économiquement dévastateur.”
L’ACIA a défendu sa position, citant des protocoles conçus pour prévenir la propagation de l’influenza aviaire hautement pathogène (IAHP), qui a touché des exploitations avicoles partout en Amérique du Nord. “Nos mesures suivent les normes internationales pour le confinement des maladies”, a déclaré Dre Eleanor Winters, directrice vétérinaire régionale de l’ACIA. “Bien que nous comprenions l’impact financier, empêcher une épidémie plus large reste notre responsabilité première.”
Les experts en agriculture soulignent la nature complexe de la gestion des maladies dans les exploitations d’élevage spécialisées. Dr Martin Chen, spécialiste en pathologie aviaire à l’Université de la Colombie-Britannique, a expliqué à CO24 que les fermes d’autruches présentent des défis uniques. “Contrairement à la volaille conventionnelle, les autruches ont une durée de vie plus longue et une valeur individuelle plus élevée. Cela crée une tension entre les protocoles standard et les réalités économiques pour les producteurs”, a expliqué Chen.
L’affaire a attiré l’attention du secteur agricole canadien, les associations industrielles suivant attentivement les résultats. L’Association des oiseaux spécialisés de la C.-B. a exprimé son inquiétude quant au précédent qui pourrait affecter d’autres exploitations d’oiseaux exotiques confrontées à des circonstances similaires.
Les experts juridiques suggèrent que cette affaire pourrait remodeler la façon dont les autorités agricoles canadiennes équilibrent le contrôle des maladies avec les droits des producteurs. “Cette contestation remet en question la proportionnalité de l’intervention gouvernementale dans la gestion du bétail”, a déclaré Catherine Williams, spécialiste du droit agricole. “La Cour suprême devra considérer à la fois les impératifs de santé publique et les droits économiques des producteurs.”
Si elle réussit, la contestation juridique de la ferme pourrait établir de nouvelles exigences pour des protocoles de réponse gradués qui pourraient permettre des abattages partiels ou des mesures d’isolation renforcées plutôt que la destruction complète du troupeau. Plusieurs groupes agricoles provinciaux ont indiqué qu’ils pourraient demander le statut d’intervenant dans l’affaire.
Les implications économiques vont au-delà de cette seule exploitation. L’industrie canadienne des oiseaux spécialisés contribue environ 150 millions de dollars annuellement à l’économie nationale, l’élevage d’autruches représentant un marché de niche croissant pour la viande, le cuir et les plumes. Le secteur a déjà traversé d’importants défis liés aux récentes épidémies de grippe aviaire en Amérique du Nord.
Alors que l’affaire se dirige vers la Cour suprême, beaucoup se demandent si notre approche actuelle de la gestion des maladies dans les exploitations agricoles spécialisées établit le bon équilibre entre la biosécurité et la durabilité économique. Pouvons-nous développer des protocoles plus nuancés qui protègent à la fois notre approvisionnement alimentaire et les moyens de subsistance de ceux qui le produisent?