Dans une décision qui a secoué le secteur canadien de l’énergie verte, le gouvernement fédéral a brusquement annoncé la semaine dernière la suppression du Programme de prêts pour des maisons plus vertes, laissant des milliers de propriétaires et de conseillers en énergie dans l’incertitude. Le programme, qui offrait des prêts sans intérêt jusqu’à 40 000 $ pour des rénovations écoénergétiques, a été fermé avec un préavis minimal, créant ce que les initiés de l’industrie qualifient de “coup dévastateur” pour les efforts canadiens en matière d’action climatique résidentielle.
“Nous avons été complètement pris au dépourvu,” confie Marion Thibault, conseillère en énergie certifiée de Vancouver qui a appris l’annulation via les médias sociaux. “Un jour, nous aidons les propriétaires à planifier d’importantes améliorations énergétiques, et le lendemain, nous les appelons pour leur expliquer que leur financement a disparu.”
Le Programme de prêts pour des maisons plus vertes du Canada, lancé en 2022, était devenu une pierre angulaire de la stratégie climatique résidentielle du gouvernement, facilitant plus de 18 000 projets approuvés à l’échelle nationale avec plus de 175 millions de dollars de financement distribués. Les conseillers en énergie partout au pays rapportent que des milliers d’autres demandes étaient à différentes étapes de traitement lors de l’annonce.
Selon Canada News, la fin du programme arrive à un moment particulièrement difficile, alors que les Canadiens font face à des coûts énergétiques croissants et à une pression accrue pour réduire les émissions de carbone des ménages. Les données de Statistique Canada indiquent que les bâtiments résidentiels représentent environ 17 % des émissions de gaz à effet de serre du pays, faisant des améliorations d’efficacité domiciliaire une composante essentielle des engagements climatiques du Canada.
“Ce programme produisait des résultats concrets,” explique Dr. Thomas Chen, économiste environnemental à l’Université de Toronto. “Nous constations des réductions significatives d’émissions grâce aux projets complétés, tout en créant des emplois dans le secteur de la rénovation écologique. L’effet multiplicateur économique de ces investissements était considérable.”
La Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL), qui administrait le programme, a cité une “demande sans précédent” comme raison de la fermeture, notant que le volume des demandes avait dépassé le financement disponible. Cependant, les conseillers en énergie et les représentants de l’industrie se demandent pourquoi le programme n’a pas simplement été mis en pause pour restructuration plutôt que complètement supprimé.
“Si la demande est le problème, c’est en fait un signe de réussite, pas d’échec,” soutient Jessica Moulton, directrice exécutive d’Efficacité Canada. “La réponse appropriée serait d’élargir le programme, pas de l’annuler entièrement, surtout sans stratégie de remplacement claire.”
Pour les propriétaires dont la demande était en cours, la situation est particulièrement frustrante. Le bureau CO24 Business a reçu des dizaines de messages de Canadiens qui avaient programmé des entrepreneurs et pris des engagements financiers basés sur les prêts attendus.
“Nous avons déjà effectué notre évaluation énergétique et signé des contrats pour de nouvelles fenêtres et isolation,” explique Michael Desjardins, propriétaire à Halifax. “Maintenant, nous nous démenons pour déterminer si nous pouvons même nous permettre de poursuivre. La banque n’offre rien de comparable aux conditions sans intérêt du programme gouvernemental.”
Les conseillers en énergie—des professionnels certifiés pour effectuer des évaluations énergétiques domiciliaires—signalent des impacts commerciaux importants. Beaucoup ont élargi leurs opérations spécifiquement pour répondre à la demande générée par le programme et font maintenant face à des licenciements potentiels ou des fermetures d’entreprises.
La décision soulève également des questions sur l’orientation de la politique climatique du Canada, selon les analystes de CO24 Politics. L’annulation survient quelques mois seulement après que le gouvernement ait réaffirmé son engagement à réduire les émissions de 40-45 % sous les niveaux de 2005 d’ici 2030, un objectif que les experts considèrent plus difficile à atteindre sans fortes incitations à l’efficacité résidentielle.
“Cela représente un modèle inquiétant de politique climatique intermittente qui crée de l’incertitude sur le marché,” note Dr. Sarah Richardson, experte en politique environnementale. “Pour que les initiatives climatiques réussissent, elles ont besoin de stabilité et de prévisibilité. Les entreprises et les propriétaires prennent des décisions à long terme basées sur ces programmes.”
Les groupes industriels réclament un programme de remplacement immédiat, idéalement avec un financement élargi pour répondre à la demande démontrée. Pendant ce temps, les services publics provinciaux et les prêteurs privés signalent une augmentation des demandes concernant des options de financement alternatives pour les améliorations écologiques des maisons.
Alors que le Canada approche d’une nouvelle saison de chauffage hivernal avec des prix de l’énergie qui devraient encore augmenter, le moment choisi pour l’annulation du programme soulève des questions cruciales : le gouvernement fédéral introduira-t-il une initiative de remplacement avant que l’élan dans les améliorations d’efficacité résidentielle ne soit perdu ? Et plus fondamentalement, dans quelle mesure le Canada s’engage-t-il à soutenir les propriétaires individuels dans la transition vers une économie à plus faible émission de carbone ?