Dans un changement diplomatique historique, le Canada s’est joint cette semaine à 144 autres nations aux Nations Unies pour reconnaître formellement l’État palestinien, marquant une évolution significative dans la politique canadienne de longue date au Moyen-Orient. La résolution, adoptée à une écrasante majorité à l’Assemblée générale de l’ONU, élève le statut de la Palestine et représente ce que ses partisans appellent une étape cruciale vers une solution à deux États dans l’un des conflits les plus insolubles du monde.
“Ce vote reflète l’engagement du Canada envers le principe fondamental selon lequel Israéliens et Palestiniens méritent de vivre en paix et en sécurité à l’intérieur de frontières internationalement reconnues,” a déclaré la ministre des Affaires étrangères Mélanie Joly dans un communiqué après le vote. Le gouvernement canadien a souligné que son soutien ne doit pas être interprété comme un abandon d’Israël, mais plutôt comme un renforcement de la voie vers une stabilité régionale durable.
La résolution accorde à la Palestine des droits élargis à l’ONU, notamment la possibilité de participer aux débats et de parrainer des résolutions, bien qu’elle n’atteigne pas le statut de membre à part entière. La mission d’observation palestinienne sera désormais autorisée à siéger parmi les États membres plutôt que d’être reléguée en marge des procédures officielles.
Le gouvernement israélien a réagi rapidement, le Premier ministre Benjamin Netanyahou dénonçant le vote comme “récompensant le terrorisme” et “un jour sombre pour les Nations Unies”. Les diplomates israéliens ont rappelé leurs ambassadeurs de plusieurs pays soutenant la résolution, bien qu’au moment de mettre sous presse, aucune action similaire n’ait été annoncée concernant le Canada.
Le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas a qualifié la résolution de “victoire pour le droit international” lors d’un discours émouvant devant ses partisans à Ramallah. “Cette reconnaissance n’est pas simplement symbolique—elle reconnaît le droit inaliénable du peuple palestinien à l’autodétermination,” a déclaré Abbas.
Cette percée diplomatique survient dans le contexte du conflit dévastateur à Gaza, où plus de 35 000 Palestiniens ont été tués depuis octobre selon le ministère de la Santé dirigé par le Hamas, suite à l’attaque du Hamas contre Israël le 7 octobre qui a tué 1 200 personnes.
Le vote du Canada représente un changement notable par rapport à sa position traditionnelle. Sous l’ancien Premier ministre Stephen Harper, le Canada s’opposait régulièrement aux initiatives palestiniennes dans les forums internationaux. L’actuel gouvernement libéral de Justin Trudeau a maintenu un soutien fort à Israël tout en adoptant progressivement des positions plus équilibrées sur les questions palestiniennes.
Les organisations juives canadiennes ont exprimé leur inquiétude face à ce vote. Le Centre pour Israël et les Affaires juives l’a qualifié de “profondément décevant” et a remis en question le moment choisi, en pleine négociation pour la libération des otages. À l’inverse, Canadiens pour la Justice et la Paix au Moyen-Orient a salué cette décision comme “attendue depuis longtemps” tout en exhortant à des mesures plus fortes pour faire pression sur Israël afin qu’il mette fin aux opérations militaires à Gaza.
Les experts en relations internationales suggèrent que ce vote pourrait signaler un réalignement plus large des attitudes mondiales envers le conflit israélo-palestinien. “Nous assistons à un moment potentiellement décisif où les alliés traditionnels d’Israël démontrent une volonté accrue de faire pression sur le gouvernement de Netanyahou par des moyens diplomatiques,” a déclaré Dr. Elena Karachenko, professeure de relations internationales à l’Université de Toronto.
Pour les Canadiens d’origine palestinienne, le vote revêt une profonde signification émotionnelle. “Cette reconnaissance de notre État par le Canada valide des décennies de lutte et de souffrance,” a déclaré Leila Hamdani, directrice de la Fondation canadienne palestinienne. “Bien qu’elle ne change pas immédiatement les conditions sur le terrain, elle offre l’espoir que la justice reste possible.”
Les implications pratiques de cette reconnaissance demeurent incertaines. Cette dynamique diplomatique se traduira-t-elle par des progrès significatifs vers un État palestinien viable, ou deviendra-t-elle un autre geste symbolique perdu dans le paysage politique complexe de la région?