Dans les vénérables salles du Parlement canadien, une question constitutionnelle intrigante a émergé : Un député de l’opposition pourrait-il occuper le fauteuil du président? Alors que le paysage politique évolue suite aux récentes tensions parlementaires, ce scénario autrefois théorique fait l’objet d’une réflexion sérieuse parmi les experts constitutionnels et les parlementaires.
Le rôle du président, traditionnellement confié à un député du gouvernement, est d’être l’arbitre impartial des délibérations de la Chambre. Cependant, rien dans nos règles parlementaires n’empêche explicitement un membre de l’opposition d’occuper cette prestigieuse fonction. “La Constitution ne précise pas l’affiliation politique du président,” explique Dr. Eleanor Chambers, historienne parlementaire à l’Université McGill. “Ce qui importe, c’est de maintenir la neutralité une fois au fauteuil.”
Plusieurs parlements de type Westminster à travers le monde se sont déjà aventurés sur ce terrain. Le Parlement britannique a promu John Bercow, député de l’opposition, au poste de président en 2009, qui a ensuite servi sous plusieurs gouvernements de différentes couleurs politiques. L’Australie a également installé des présidents issus de partis non gouvernementaux, démontrant la faisabilité de cet arrangement.
Pour le Canada, une telle démarche représenterait un écart significatif par rapport à la convention. Le calcul politique est complexe – un gouvernement ne sacrifie rien en nombre en nommant l’un des siens, puisque le président ne vote qu’en cas d’égalité. Cependant, un président issu de l’opposition réduirait effectivement la force de vote de ce parti d’un député, ce qui pourrait modifier l’arithmétique dans un Parlement étroitement divisé.
L’expert en procédure parlementaire James Robertson note que “bien que procéduralement possible, les défis pratiques demeurent importants. Le président doit commander le respect de tous les partis et être perçu comme véritablement impartial – des qualités qui transcendent l’identification partisane.”
La dynamique du Parlement actuel rend cette discussion particulièrement pertinente. Avec l’intensification des tensions gouvernementales et les questions d’équité procédurale soulevées par tous les partis, certains députés ont suggéré en privé qu’un président issu de l’opposition pourrait rétablir la confiance dans l’impartialité de l’institution.
L’ancien leader parlementaire Michael Donovan souligne que “le processus de sélection lui-même devrait changer. Actuellement, les membres du gouvernement coordonnent généralement leurs efforts pour s’assurer qu’un des leurs obtienne le fauteuil. Un président de l’opposition nécessiterait un véritable soutien transpartisan.”
Un tel changement s’alignerait avec les tendances plus larges vers une réforme parlementaire dans la politique canadienne. Les partisans de la réforme soutiennent qu’un président issu de l’opposition pourrait renforcer l’indépendance du Parlement face au contrôle exécutif – une préoccupation de longue date dans notre système de Westminster.
La professeure de droit constitutionnel Miranda Ng suggère que “ce qui semble radical aujourd’hui pourrait devenir conventionnel demain. Les traditions parlementaires évoluent à mesure que les besoins changent, et cela pourrait représenter une évolution saine vers une plus grande indépendance institutionnelle.”
Bien qu’aucune proposition formelle n’ait encore émergé, la simple discussion signale des changements potentiels dans notre conception de la gouvernance parlementaire. Alors que le Parlement reprend sa prochaine session,