Dans un virage diplomatique sans précédent, le Canada s’est aligné avec le Royaume-Uni et la France en menaçant d’entreprendre des “actions concrètes” contre Israël, incluant potentiellement des sanctions économiques, si le gouvernement du Premier ministre Benjamin Netanyahu poursuit ses plans controversés d’expansion des colonies en Cisjordanie. Cela marque la position la plus ferme jamais adoptée par des nations traditionnellement comptées parmi les plus proches alliés d’Israël.
“Le temps des simples expressions d’inquiétude est révolu,” a déclaré la ministre canadienne des Affaires étrangères Mélanie Joly lors d’une conférence de presse d’urgence à Ottawa hier. “Le Canada défend fermement le droit international et n’hésitera pas à mettre en œuvre des mesures appropriées si Israël continue sur cette voie.”
La déclaration conjointe, publiée simultanément depuis Londres, Paris et Ottawa, définit des lignes rouges spécifiques qui, si franchies, déclencheraient une réponse coordonnée. Cette initiative représente un durcissement significatif de la position du Canada, qui a historiquement maintenu des relations bilatérales solides avec Israël tout en critiquant périodiquement les activités de colonisation.
Les analystes économiques de la Banque Royale du Canada suggèrent que les sanctions potentielles pourraient cibler des secteurs spécifiques de l’économie israélienne particulièrement exposés aux marchés canadiens, notamment la technologie, la défense et les produits agricoles. Les échanges commerciaux entre le Canada et Israël ont totalisé environ 2,8 milliards de dollars en 2024, selon Statistique Canada.
“Cette approche coordonnée augmente considérablement la pression sur le gouvernement de coalition de Netanyahu,” explique Dre Sarah Levinson, Directrice des études sur le Moyen-Orient à l’Université de Toronto. “Ce qui rend cela particulièrement remarquable, c’est le front uni de nations qui ont traditionnellement offert un soutien diplomatique indéfectible à Israël.”
L’ambassade israélienne à Ottawa a réagi par une déclaration exprimant sa “profonde déception” face à la position du Canada, soutenant que les politiques de colonisation demeurent des questions de souveraineté interne. Cependant, les représentants palestiniens au Canada ont accueilli favorablement cette annonce, la qualifiant de “reconnaissance tardive de la réalité sur le terrain.”
Ce développement survient dans un contexte de critiques internationales croissantes à l’égard des politiques d’Israël en Cisjordanie. Le Conseil de sécurité des Nations Unies a récemment adopté une résolution condamnant l’expansion des colonies, les États-Unis s’étant abstenus plutôt que d’exercer leur veto traditionnel en faveur d’Israël.
Les organisations juives canadiennes ont exprimé des réactions mitigées. Le Centre pour Israël et les Affaires juives a qualifié la position du gouvernement de “profondément troublante et potentiellement préjudiciable aux relations canado-israéliennes,” tandis que Voix juives indépendantes Canada a salué cette initiative comme “une étape nécessaire vers la responsabilisation.”
Le Premier ministre Justin Trudeau a défendu la position du gouvernement pendant la période des questions, déclarant : “L’amitié du Canada avec Israël reste inébranlable, mais les vrais amis s’expriment honnêtement lorsqu’ils constatent des actions préoccupantes. Notre engagement envers une solution à deux États exige des principes cohérents.”
Les analystes politiques notent que cette position représente un risque calculé pour le gouvernement libéral, aliénant potentiellement certains électeurs pro-israéliens tout en séduisant d’autres préoccupés par les droits humains et le droit international. L’opposition conservatrice a déjà critiqué cette décision comme “l’abandon de notre allié à un moment critique.”
Alors que les tensions diplomatiques s’intensifient, les entreprises canadiennes ayant des partenariats avec Israël évaluent discrètement les impacts potentiels. La Bourse de Toronto a connu une légère pression vendeuse sur les entreprises ayant d’importantes activités en Israël, particulièrement dans le secteur technologique.
Ce qui reste incertain, c’est si cette pression coordonnée influencera efficacement la politique israélienne, ou poussera simplement Israël à renforcer ses liens avec d’autres partenaires internationaux moins préoccupés par les activités de colonisation. Jusqu’où le Canada et ses alliés sont-ils vraiment prêts à aller pour transformer les avertissements en actions, et à quel prix pour des relations diplomatiques établies de longue date?