Abus financier des aînés : le Canada constate une menace croissante parmi les seniors

Olivia Carter
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Quand Marguerite Tremblay, 78 ans, a reçu un appel prétendant que son petit-fils était en prison et avait besoin d’une caution, elle n’a pas hésité à virer 8 000 $ à l’inconnu au téléphone. Ce n’est que trois jours plus tard, lors de la visite de sa fille, que la vérité dévastatrice a éclaté – Marguerite était tombée victime d’une des arnaques financières les plus courantes ciblant les aînés canadiens aujourd’hui.

“Ils connaissaient le nom de mon petit-fils. Ils ont même mis quelqu’un au téléphone qui lui ressemblait,” m’a confié Marguerite lors de notre entretien dans son modeste appartement à Montréal. “J’étais tellement inquiète que je n’arrivais pas à réfléchir clairement.”

L’histoire de Marguerite n’est qu’un cas parmi ce que les experts appellent une “épidémie silencieuse” d’exploitation financière des aînés qui sévit à travers le Canada. Avec le vieillissement de notre population, comptant près de 7 millions de Canadiens de plus de 65 ans, les prédateurs financiers ciblent de plus en plus les aînés vulnérables.

Selon le Centre antifraude du Canada, les Canadiens ont perdu plus de 530 millions de dollars à cause de fraudes en 2022, les aînés étant surreprésentés parmi les victimes. Plus alarmant encore, les experts estiment que ce chiffre ne représente que 5 à 10 % des cas réels, car beaucoup d’aînés se sentent trop embarrassés ou confus pour signaler l’exploitation financière.

“L’isolement que de nombreux aînés ont connu pendant la pandémie a créé des conditions parfaites pour les prédateurs financiers,” explique Dr. Sophie Bergeron, gérontologue à l’Université de Montréal. “Beaucoup d’aînés sont devenus plus dépendants de la technologie sans nécessairement avoir les connaissances numériques pour se protéger.”

L’exploitation financière prend plusieurs formes, des arnaques d’investissement sophistiquées à l’exploitation par des membres de la famille. Le Réseau canadien pour la prévention de la maltraitance des aînés identifie plusieurs tactiques courantes : les “arnaques des grands-parents” comme celle vécue par Marguerite, les arnaques amoureuses, les fausses opportunités d’investissement et, peut-être le plus troublant, l’exploitation financière par des personnes de confiance comme des membres de la famille ou des soignants.

“Ce qui rend l’exploitation financière des aînés particulièrement insidieuse, c’est qu’environ 66 % des auteurs sont des membres de la famille,” note le Sergent Jean Tremblay de l’Unité des crimes financiers de la Sûreté du Québec. “Beaucoup de victimes hésitent à porter plainte quand c’est leur propre enfant ou petit-enfant qui profite d’eux.”

Les institutions financières mettent de plus en plus en place des mesures de protection. La Banque Nationale a récemment lancé un programme de formation amélioré pour le personnel de première ligne afin d’identifier les abus financiers potentiels, tandis que Desjardins a développé un système d’intelligence artificielle qui signale les schémas de transactions inhabituels dans les comptes des aînés.

“Nous avons formé notre personnel à reconnaître les signaux d’alarme, comme des aînés effectuant des retraits inhabituels ou paraissant nerveux pendant les transactions,” explique Marie Lavoie, VP de la Protection des clients chez Desjardins. “Parfois, il suffit de poser quelques questions en privé pour révéler une situation coercitive.”

Les protections législatives varient d’une province à l’autre. La Loi sur la protection des adultes de la Colombie-Britannique offre des protections robustes, tandis que les lois du Québec se concentrent principalement sur les exigences de signalement pour les professionnels réglementés. Les défenseurs soutiennent que le Canada a besoin d’une législation nationale plus forte et plus cohérente traitant spécifiquement de l’exploitation financière des aînés.

Pour les membres de la famille inquiets, les experts recommandent une communication régulière sur les finances, la désignation de personnes de confiance auprès des institutions financières et l’utilisation d’outils comme des comptes conjoints avec des alertes de transaction. La formation à la littératie numérique spécialement adaptée aux aînés s’est révélée prometteuse pour aider les personnes âgées à reconnaître les arnaques en ligne.

“La prévention est absolument cruciale,” souligne Gisèle Bouchard, PDG de ÂgeCanada, l’organisation nationale de défense des aînés au Canada. “La récupération financière est extrêmement difficile une fois l’argent pris, surtout pour les aînés vivant avec des revenus fixes.”

De retour dans son appartement, Marguerite Tremblay me montre un nouveau système d’identification d’appelant que sa fille a installé après l’arnaque. “Je suis plus prudente maintenant,” dit-elle avec un mélange de détermination et de regret. “Mais je m’inquiète pour les autres aînés qui n’ont peut-être pas de famille qui veille sur eux.”

Alors que le changement démographique du Canada se poursuit avec plus de citoyens vivant plus longtemps, souvent avec des actifs substantiels, comment nos systèmes financiers, juridiques et sociaux évolueront-ils pour protéger nos aînés les plus vulnérables de ceux qui les considèrent non pas comme des aînés valorisés mais comme des cibles lucratives?

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