Dans un virage diplomatique majeur qui pourrait remodeler les efforts de paix au Moyen-Orient, l’Allemagne a annoncé mercredi qu’elle soutiendra une prochaine résolution des Nations Unies affirmant l’État palestinien comme pierre angulaire du droit international. Cette décision marque un changement notable dans l’approche traditionnellement prudente de Berlin face au conflit israélo-palestinien.
La ministre allemande des Affaires étrangères, Anna Leutheusser-Schnarrenberger, a confirmé ce changement de position lors d’une conférence de presse à Berlin, déclarant que le soutien de l’Allemagne s’aligne sur son engagement de longue date envers une solution à deux États.
“Après mûre réflexion et consultation avec nos partenaires internationaux, l’Allemagne votera en faveur de la résolution reconnaissant l’État palestinien comme partie intégrante du cadre juridique international,” a déclaré Leutheusser-Schnarrenberger. “Cette décision reflète notre conviction inébranlable qu’une paix durable ne peut être atteinte que par une solution négociée à deux États.”
La résolution, qui devrait être présentée à l’Assemblée générale de l’ONU le mois prochain, appelle à la reconnaissance formelle de la souveraineté palestinienne dans les frontières d’avant 1967, avec Jérusalem-Est comme capitale. Bien que les résolutions de l’Assemblée générale ne soient pas contraignantes, des sources diplomatiques suggèrent que cette initiative pourrait influencer considérablement les normes juridiques internationales concernant les revendications territoriales palestiniennes.
La réaction d’Israël a été rapide et directe, le Premier ministre Benjamin Netanyahu qualifiant la décision de l’Allemagne de “profondément décevante” et “contre-productive pour les efforts de paix”. Dans un communiqué publié par son bureau, Netanyahu a soutenu que “la reconnaissance unilatérale mine les négociations directes, qui demeurent la seule voie viable vers une résolution durable.”
Le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, a salué l’annonce de l’Allemagne comme “une étape cruciale vers la justice et la légitimité internationale”. S’exprimant depuis Ramallah, Abbas a appelé d’autres nations européennes à suivre l’exemple de l’Allemagne, suggérant que cette initiative pourrait revitaliser les négociations de paix au point mort.
La décision allemande fait suite à des positions similaires récemment adoptées par l’Espagne, l’Irlande et la Norvège, signalant une impatience croissante de l’Europe face au statu quo. Des analystes politiques suggèrent que cela représente un réalignement plus large de la politique internationale concernant le conflit israélo-palestinien.
Dr. Elise Hoffmann, directrice des études sur le Moyen-Orient à l’Institut berlinois pour les affaires internationales, a déclaré à CO24 que le changement de position de l’Allemagne est particulièrement significatif étant donné son alliance historiquement forte avec Israël.
“L’Allemagne a longtemps été l’un des plus fervents soutiens d’Israël en Europe, s’abstenant souvent lors des votes de l’ONU critiques envers les politiques israéliennes,” a expliqué Hoffmann. “Cela représente un recalibrage calculé de la politique étrangère allemande qui reconnaît à la fois les obligations morales envers la sécurité d’Israël et les droits légitimes des Palestiniens à l’autodétermination.”
L’administration Biden a exprimé son inquiétude quant au calendrier de la résolution, les responsables du Département d’État indiquant une préférence pour des négociations directes plutôt que des déclarations de l’ONU. Cependant, des sources au sein de l’administration suggèrent que les États-Unis pourraient s’abstenir plutôt que d’opposer leur veto, ouvrant potentiellement un espace pour des progrès diplomatiques.
La résolution intervient dans un contexte de frustration internationale croissante face à l’expansion des colonies en Cisjordanie et à la détérioration des conditions humanitaires à Gaza. Selon des rapports de l’ONU, les territoires palestiniens ont connu un déclin économique sans précédent depuis 2022, avec un taux de chômage atteignant 45% à Gaza.
Les implications financières de la reconnaissance de l’État pourraient être substantielles, débloquant potentiellement des milliards en aide internationale au développement et en opportunités d’investissement. Des experts économiques suggèrent que la reconnaissance formelle pourrait augmenter le PIB palestinien jusqu’à 35% sur cinq ans si elle s’accompagne d’une levée des restrictions sur les mouvements et le commerce.
Alors que les dirigeants mondiaux se préparent à se réunir pour l’Assemblée générale de l’ONU le mois prochain, la question demeure: la décision de l’Allemagne représentera-t-elle un point de bascule dans le consensus international, ou renforcera-t-elle davantage les divisions dans un processus de paix déjà fracturé?