La Gendarmerie royale du Canada a émis un avertissement sévère au gouvernement nouvellement formé du Premier ministre Mark Carney, soulignant que la lutte contre les opérations sophistiquées d’ingérence étrangère nécessite une augmentation substantielle des ressources et une priorisation stratégique.
Dans un briefing complet présenté aux ministres du cabinet la semaine dernière, la commissaire de la GRC Michaela Buckley-Pearson a détaillé comment des acteurs étrangers—particulièrement la Chine, la Russie et l’Iran—ont intensifié leurs campagnes d’influence clandestines ciblant les institutions démocratiques du Canada, ses atouts économiques et ses communautés diasporiques.
“Ce que nous observons est sans précédent, tant par l’ampleur que par la sophistication,” a déclaré la commissaire Buckley-Pearson lors de cette session à huis clos. “Il ne s’agit pas d’incidents isolés, mais de campagnes coordonnées à vecteurs multiples conçues pour miner la souveraineté canadienne et nos processus démocratiques.”
Le briefing, dont les détails ont été obtenus par l’intermédiaire de sources gouvernementales s’exprimant sous couvert d’anonymat, a souligné comment les Équipes intégrées de la sécurité nationale de la GRC ont identifié une augmentation de 47% des activités présumées d’ingérence étrangère depuis 2023. Ces opérations vont des campagnes cybernétiques sophistiquées aux opérations traditionnelles de renseignement humain ciblant des Canadiens influents.
Le ministre de la Sécurité publique Dominic LeBlanc a reconnu la gravité de la situation après le briefing. “Le gouvernement reconnaît que l’ingérence étrangère représente l’un des défis les plus importants en matière de sécurité nationale auxquels le Canada fait face aujourd’hui,” a déclaré LeBlanc aux journalistes. “Nous sommes déterminés à assurer que nos agences de sécurité disposent des outils nécessaires pour protéger nos institutions démocratiques.”
La GRC a demandé un financement supplémentaire de 175 millions de dollars sur trois ans, spécifiquement destiné aux opérations de contre-ingérence. Cela comprendrait l’expansion des équipes d’enquête spécialisées, l’amélioration des capacités techniques pour détecter les campagnes de manipulation numérique et le renforcement de la collaboration avec les partenaires internationaux.
Les experts en renseignement notent que la position du Canada en tant que nation du G7 avec d’importantes ressources naturelles et des technologies avancées en fait une cible de choix pour les opérations d’influence étrangère. Dr. Stephanie Carvin, ancienne analyste en sécurité nationale et professeure à l’Université Carleton, a expliqué que “la société ouverte du Canada et sa population diverse créent des vulnérabilités que les acteurs hostiles sont de plus en plus habiles à exploiter.”
Le briefing de la GRC a spécifiquement mis en lumière les préoccupations concernant l’ingérence étrangère dans la politique canadienne et les processus électoraux. Le renseignement indique que plusieurs candidats aux élections fédérales de 2025 qui ont porté Carney au pouvoir ont été ciblés par des opérations d’influence étrangère, bien que les responsables aient souligné qu’il n’y a aucune preuve que ces efforts aient matériellement affecté les résultats électoraux.
La commissaire Buckley-Pearson a souligné que des opérations réussies de contre-ingérence nécessitent non seulement des ressources supplémentaires, mais une approche pangouvernementale. “Il ne s’agit pas uniquement d’une question d’application de la loi,” a-t-elle noté. “Cela requiert une coordination entre les agences de renseignement, les organismes de réglementation et des initiatives politiques conçues pour renforcer la résilience démocratique du Canada.”
Le gouvernement Carney, encore dans les premiers jours de son mandat, fait face à des décisions difficiles concernant l’allocation des ressources de sécurité parmi des priorités concurrentes, notamment la reprise économique, les initiatives climatiques et la réforme des soins de santé. Cependant, des hauts fonctionnaires indiquent que l’administration considère la menace d’ingérence étrangère avec une urgence croissante suite à l’évaluation détaillée de la GRC.
Alors que le Canada navigue dans ce paysage sécuritaire complexe, une question fondamentale émerge : nos institutions démocratiques peuvent-elles s’adapter assez rapidement pour contrer ces menaces en évolution, ou resterons-nous perpétuellement un pas derrière des campagnes d’ingérence étrangère de plus en plus sophistiquées ?