Dans une manœuvre parlementaire inattendue lundi après-midi, les députés du Bloc Québécois ont formellement demandé au gouvernement fédéral de diviser son imposante législation économique en deux projets de loi distincts, soutenant que l’approche omnibus actuelle mine l’examen démocratique et le débat appropriés.
“Ce que nous observons est une tentative délibérée de précipiter des réformes économiques complexes sans examen adéquat,” a déclaré le leader parlementaire du Bloc Québécois, Alain Therrien, lors d’un échange animé à la Chambre des communes. “Le gouvernement a regroupé des mesures économiques très différentes sous un même parapluie pour limiter le débat sur des dispositions controversées qui méritent leur propre considération législative.”
La Loi sur l’économie canadienne unifiée, présentée le mois dernier par la ministre des Finances Chrystia Freeland, contient plus de 400 pages de mesures économiques allant des initiatives d’abordabilité du logement aux modifications des règles de concurrence commerciale et de développement des ressources naturelles. Cette législation représente une pierre angulaire de l’agenda économique du gouvernement libéral à l’approche de ce que plusieurs analystes anticipent comme une période préélectorale.
Les représentants du Bloc ont particulièrement contesté les dispositions relatives à la surveillance fédérale des ressources naturelles, qu’ils considèrent comme un empiètement sur la juridiction provinciale du Québec. “Ce projet de loi contient des mesures qui défient directement l’autorité constitutionnelle du Québec sur ses ressources,” a souligné le député bloquiste Gabriel Ste-Marie. “Dissimuler ces changements juridictionnels controversés au sein d’un énorme ensemble économique est un tour de passe-passe législatif.”
Le gouvernement a défendu son approche globale, la vice-première ministre Freeland affirmant pendant la période des questions que “les défis économiques auxquels font face les Canadiens sont interconnectés et nécessitent des solutions coordonnées.” Elle a ajouté que diviser le projet de loi “retarderait inutilement des mesures de soulagement cruciales pour les familles canadiennes aux prises avec des problèmes d’abordabilité.”
Les experts parlementaires suggèrent que le défi procédural du Bloc fait face à d’importants obstacles. “Bien que le Président ait occasionnellement décidé de diviser une législation dans le passé, cela exige généralement de démontrer que le projet de loi contient des questions clairement sans rapport,” a expliqué Lori Turnbull, professeure de sciences politiques à l’Université Dalhousie. “Le gouvernement fera probablement valoir que ces mesures économiques forment un ensemble cohérent.”
Cette initiative survient dans un contexte de tensions croissantes dans la politique canadienne concernant l’utilisation de projets de loi omnibus, une pratique que les libéraux critiquaient lorsqu’ils étaient dans l’opposition mais qu’ils ont maintenue au gouvernement. Le chef conservateur Pierre Poilievre a fait écho à certaines préoccupations du Bloc, bien que principalement axées sur les dispositions réglementaires du projet de loi affectant le développement énergétique de l’Ouest canadien.
Le débat sur la division du projet de loi soulève des questions fondamentales sur l’efficacité parlementaire et la responsabilité démocratique à une époque de législation de plus en plus complexe. Alors que les législateurs canadiens naviguent dans ces eaux procédurales, les citoyens pourraient bien se demander: quand l’efficacité législative franchit-elle la ligne pour miner la fonction parlementaire essentielle d’examiner minutieusement les lois qui façonneront notre avenir économique?