Sous la chaleur écrasante de l’été torontois, 35 jeunes femmes et jeunes non-binaires délaissent les piscines pour les lances à incendie dans le cadre d’un programme novateur conçu pour diversifier le domaine traditionnellement masculin de la lutte contre les incendies. Le Camp Molly, qui en est à sa sixième année, offre une expérience pratique aux participant·e·s âgé·e·s de 16 à 19 ans, défiant les stéréotypes de genre et suscitant des aspirations professionnelles dans les services d’incendie.
“Je n’aurais jamais pensé devenir pompière avant le Camp Molly,” confie Ella Nguyen, une participante de 17 ans qui manie habilement une lance à incendie sous l’œil attentif de ses instructeurs. “Mais voir des femmes exercer réellement ce métier me fait penser : ‘pourquoi pas moi ?'”
Nommé en l’honneur de Molly Hanlan, première femme pompière de Toronto embauchée en 1987, le programme représente plus qu’une simple exploration de carrière—il s’agit de transformer la composition des services d’incendie partout au Canada. Malgré les progrès réalisés dans de nombreux domaines professionnels, les femmes ne représentent actuellement que 4,4 % des pompiers à l’échelle nationale, selon Statistique Canada.
“Quand j’ai commencé, il y avait à peine des femmes dans le service,” explique la Capitaine Sarah Mendez, vétérane depuis 15 ans des Services d’incendie de Toronto qui sert d’instructrice au camp. “Des programmes comme celui-ci créent un vivier de talents diversifiés qui renforcera nos services pendant des décennies.”
Le camp d’une semaine immerge les participant·e·s dans des expériences authentiques de lutte contre les incendies—de l’utilisation d’équipements hydrauliques et l’escalade d’échelles aériennes aux opérations de recherche et sauvetage dans des conditions de fumée simulée. Ce ne sont pas des activités édulcorées; ce sont les mêmes compétences requises dans les programmes réels de formation des pompiers.
Le chef des pompiers de Toronto, Matthew Pegg, souligne l’importance de telles initiatives pour l’avenir des services d’urgence. “Le service d’incendie doit refléter les communautés que nous servons,” a déclaré Pegg lors d’une journée de démonstration. “Le Camp Molly change les perceptions sur qui peut faire ce travail, tant pour ces jeunes que pour le public.”
L’impact du programme va au-delà des statistiques de recrutement. Des recherches publiées dans le Journal of Emergency Management indiquent que les équipes d’intervention d’urgence diversifiées démontrent des capacités accrues de résolution de problèmes et un meilleur engagement communautaire—des facteurs critiques pour la sécurité publique.
Pour Jessie Williams, participante de 16 ans, le camp a été transformateur. “On m’a toujours dit que j’étais trop petite ou pas assez forte,” dit-elle après avoir réussi un exercice difficile de transport d’équipement. “Mais ici, j’apprends que c’est une question de technique, de travail d’équipe et de détermination—pas seulement de force brute.”
L’initiative aborde également les obstacles persistants à la diversité dans la lutte contre les incendies. Selon un rapport de 2022 de l’Association internationale des chefs de pompiers, le manque d’exposition au métier de pompier comme option de carrière reste l’un des principaux obstacles pour les groupes sous-représentés. Le Camp Molly affronte directement ce défi en offrant non seulement une exposition, mais un engagement significatif.
Toronto n’est pas seule dans cet effort. Des programmes similaires ont émergé partout en Amérique du Nord, faisant partie d’un mouvement mondial croissant visant à diversifier les services d’urgence. Le “Phoenix Firecamp” de New York et le “Camp Ignite” de Vancouver représentent des efforts parallèles pour transformer la démographie de la lutte contre les incendies.
Alors que le Camp Molly conclut sa sixième année réussie, les organisateurs planifient déjà son expansion. “Nous avons reçu plus de 200 candidatures pour seulement 35 places cette année,” note Jasmine Chen, coordinatrice du programme. “La demande montre que nous répondons à un besoin réel dans notre communauté.”
Avec plusieurs anciennes du camp qui poursuivent maintenant des carrières dans la lutte contre les incendies et les services d’urgence, le programme démontre comment des initiatives ciblées peuvent créer des voies tangibles vers la diversité. Alors que ces jeunes participant·e·s apprennent aujourd’hui à manier des lances à incendie et à gérer des scénarios d’urgence, ils et elles pourraient bien répondre à nos appels d’urgence demain.
Alors que nous assistons à l’évolution de cette profession traditionnellement masculine, une question demeure : comment nos services d’urgence—et nos communautés—pourraient-ils bénéficier d’équipes de pompiers qui reflètent mieux la diversité des populations qu’ils servent?