Dans une étape politique majeure qui redéfinit l’engagement militaire du Canada sur la scène mondiale, le ministre des Finances Mark Carney a annoncé aujourd’hui que le Canada atteindra l’objectif de l’OTAN de consacrer 2% du PIB à la défense cette année, bien avant l’échéance initiale de 2025. Ce calendrier accéléré représente l’une des augmentations les plus substantielles du financement militaire canadien des dernières décennies, dans un contexte de tensions géopolitiques croissantes et de pression des alliés de l’OTAN.
“Il ne s’agit pas simplement d’atteindre un objectif chiffré,” a déclaré Carney lors d’une conférence de presse au quartier général du ministère de la Défense nationale à Ottawa. “Il s’agit pour le Canada de se tenir côte à côte avec nos alliés à un moment où l’ordre international fondé sur des règles fait face à des défis sans précédent.”
Cette annonce survient après des années de critiques de la part des partenaires de l’OTAN, particulièrement des États-Unis, concernant les dépenses de défense historiquement modestes du Canada. Aussi récemment qu’en 2022, le Canada ne consacrait qu’environ 1,33% de son PIB à la défense, le plaçant parmi les membres les moins contributifs de l’alliance des 32 nations.
Le programme d’investissement accéléré comprend 40 milliards de dollars pour moderniser les systèmes d’alerte précoce du NORAD dans le Nord, d’importantes mises à niveau de la flotte vieillissante d’avions de chasse CF-18 du Canada, et des capacités de cyberdéfense renforcées. De plus, les Forces armées canadiennes bénéficieront d’initiatives de recrutement élargies et de services de soutien améliorés pour le personnel militaire et les anciens combattants.
Le ministre de la Défense Bill Blair a souligné que l’augmentation du financement reflète l’évolution des réalités sécuritaires. “Le monde a changé de façon dramatique depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie et l’affirmation croissante des États autoritaires. Cet investissement assure que le Canada peut contribuer de manière significative à la sécurité collective tout en protégeant notre souveraineté dans l’Arctique et au-delà,” a noté Blair.
Les analystes militaires soulignent plusieurs facteurs qui motivent ce calendrier accéléré. Dre Stephanie Carvin, professeure associée en relations internationales à l’Université Carleton, explique: “Les effets combinés de l’agression russe en Europe de l’Est, des ambitions territoriales de la Chine et des cybermenaces de plus en plus sophistiquées ont créé un environnement de sécurité qui exige des capacités plus robustes de tous les membres de l’OTAN.”
Cette décision a recueilli un rare soutien bipartisan au Parlement, bien que les partis d’opposition aient questionné certains aspects de sa mise en œuvre. Le critique conservateur en matière de défense, James Bezan, a salué l’augmentation du financement tout en exprimant des préoccupations quant à l’efficacité des approvisionnements. “Nous soutenons le respect de nos obligations envers l’OTAN, mais les Canadiens méritent l’assurance que ces milliards se traduiront par des capacités réelles, et non par des retards bureaucratiques.”
Selon les reportages de CO24 Politique, cette dépense sera financée par une combinaison de priorités de dépenses réaffectées et de déficits modérés, plutôt que par des augmentations d’impôts spécifiques. Les experts économiques du Bureau du directeur parlementaire du budget prévoient des impacts minimes sur l’inflation, bien que certains aient mis en garde contre une pression potentielle sur les taux d’intérêt si l’approvisionnement militaire sollicite de façon significative la capacité de fabrication.
Le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, a salué l’engagement du Canada comme “une démonstration claire de solidarité” lors de sa récente visite à Ottawa. “À un moment où les valeurs démocratiques font face à des défis coordonnés dans le monde entier, cet investissement renforce non seulement la sécurité du Canada, mais aussi la défense collective de tous les alliés,” a remarqué Stoltenberg.
Le calendrier accéléré des dépenses aligne le Canada sur d’autres alliés qui ont considérablement augmenté leurs budgets de défense ces dernières années. L’Allemagne, longtemps critiquée pour ses dépenses insuffisantes, s’est engagée à atteindre le seuil de 2% suite à l’invasion de l’Ukraine par la Russie. De même, les pays nordiques ont substantiellement renforcé leurs capacités militaires en réponse aux tensions régionales accrues.
Pour les Canadiens ordinaires, les implications vont au-delà des chiffres budgétaires abstraits. Les investissements devraient créer des milliers d’emplois dans la fabrication de défense à travers plusieurs provinces, avec un accent particulier sur la cybersécurité, les matériaux avancés et la recherche en intelligence artificielle, comme souligné dans la récente couverture de CO24 Affaires.
Alors que le paysage de la sécurité internationale continue d’évoluer à un rythme rapide, une question reste centrale pour la politique de défense du Canada: dans une ère de menaces multiformes allant de la guerre conventionnelle aux défis de sécurité climatique, atteindre un objectif de dépenses sera-t-il suffisant pour assurer la capacité du Canada à protéger ses intérêts et à contribuer de manière significative à la stabilité mondiale?