Changement de politique de tarification alimentaire à Ottawa sous la pression de l’industrie

Olivia Carter
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Dans un revirement politique remarquable qui a largement échappé à l’attention du public, le gouvernement fédéral a discrètement abandonné son controversé code de conduite pour l’industrie alimentaire, marquant un changement significatif dans l’approche d’Ottawa concernant la réglementation des prix alimentaires. Ce recul survient après des mois de pressions croissantes de la part des grands détaillants et distributeurs qui s’opposaient à ce qu’ils considéraient comme une intervention gouvernementale excessive sur le marché.

Le code proposé, initialement défendu par le gouvernement libéral comme une mesure visant à créer de l’équité dans le secteur de l’alimentation hautement concentré du Canada, aurait établi des règles régissant les relations commerciales entre détaillants et fournisseurs. Alors que les prix alimentaires continuaient d’augmenter tout au long de 2023, le gouvernement avait présenté ce code comme un mécanisme potentiel pour répondre à la crise d’abordabilité croissante à laquelle font face les consommateurs canadiens.

“Ce à quoi nous avons assisté est un cas classique de démonstration de force de l’industrie,” explique Dr. Sylvia Moreau, professeure d’économie alimentaire à l’Université de Toronto. “Les grandes chaînes d’alimentation ont effectivement démontré qu’elles disposent d’un capital politique considérable, suffisant pour modifier l’orientation de la politique fédérale malgré les préoccupations du public concernant l’abordabilité alimentaire.”

Les géants de l’industrie, notamment Loblaw, Metro et Sobeys, avaient exprimé des inquiétudes quant au fait que le code obligatoire introduirait une bureaucratie inutile et pourrait augmenter les coûts opérationnels qui seraient ultimement répercutés sur les consommateurs. Leur résistance coordonnée semble avoir porté ses fruits, les responsables gouvernementaux signalant désormais une préférence pour une adhésion volontaire plutôt qu’une application législative.

Selon des documents gouvernementaux internes obtenus grâce à des demandes d’accès à l’information, les rencontres entre les dirigeants de l’industrie et les hauts fonctionnaires se sont intensifiées à la fin de 2023, coïncidant avec ce changement de politique. Les documents révèlent une préoccupation croissante au sein des cercles gouvernementaux concernant d’éventuelles perturbations du marché si les grands détaillants refusaient de coopérer avec les réglementations proposées.

Les conséquences pour les consommateurs canadiens demeurent incertaines. Alors que les représentants de l’industrie soutiennent que des solutions dictées par le marché profiteront ultimement aux acheteurs grâce à l’efficacité et la concurrence, les groupes de défense des consommateurs tirent la sonnette d’alarme concernant la concentration continue du pouvoir entre les mains d’une poignée de grandes sociétés d’alimentation.

“Lorsque cinq acteurs principaux contrôlent plus de 80 pour cent de la distribution alimentaire, la conformité volontaire devient essentiellement vide de sens,” note Martin Chen, directeur exécutif de l’Alliance canadienne de protection des consommateurs. “Sans mécanismes réglementaires contraignants, quelle incitation ces entreprises ont-elles à privilégier l’abordabilité plutôt que les marges bénéficiaires?”

Ce revirement politique survient à un moment particulièrement délicat, alors que les données de Statistique Canada indiquent que les prix alimentaires ont augmenté d’environ 5,9 pour cent d’une année à l’autre, dépassant significativement l’inflation globale. Pour de nombreux ménages canadiens qui luttent déjà contre les coûts du logement et l’inflation générale, ces prix alimentaires élevés représentent un fardeau financier substantiel.

Le ministre de l’Agriculture Lawrence MacAulay, lorsqu’interrogé sur la question lors d’une récente session parlementaire, a souligné que le gouvernement reste engagé envers l’abordabilité alimentaire mais croit que “des approches collaboratives avec les partenaires de l’industrie produiront des résultats plus durables qu’une réglementation conflictuelle.”

Les critiques suggèrent que cette position représente une capitulation significative face aux intérêts des entreprises aux dépens des consommateurs. Elizabeth Warren, ancienne responsable du Bureau de la concurrence (sans lien de parenté avec la sénatrice américaine), a décrit ce recul comme “décevant mais pas surprenant” compte tenu de l’influence politique exercée par les grands détaillants.

“Ce qui est particulièrement troublant, c’est la discrétion avec laquelle ce changement s’est produit,” a observé Warren. “Un revirement politique majeur sur une question affectant chaque foyer canadien mérite un débat public, pas des accords en coulisse.”

Alors que les chaînes d’épicerie annoncent des profits records tandis que l’utilisation des banques alimentaires atteint des sommets historiques à travers le pays, la question demeure: Ottawa a-t-il abandonné sa responsabilité d’assurer des pratiques équitables dans l’une de nos industries les plus essentielles, ou ce repli stratégique fait-il partie d’un plan à plus long terme pour aborder l’abordabilité alimentaire par d’autres moyens?

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