Dans une décision controversée qui agite le paysage des soins de santé de l’Alberta, le gouvernement de la première ministre Danielle Smith a annoncé la semaine dernière que les Albertains devront bientôt payer pour les vaccins contre la COVID-19—une décision qui semble davantage motivée par un positionnement idéologique que par une prudence fiscale.
Ce changement de politique, qui entrera en vigueur le 1er avril, met fin à l’accès universel et gratuit aux vaccins contre la COVID-19, limitant la couverture aux populations vulnérables seulement, tandis que tous les autres devront débourser environ 30 $ par dose. Les responsables gouvernementaux ont présenté cette mesure comme un “recouvrement des coûts”, mais une analyse attentive révèle des motivations plus profondes derrière ce changement.
“Cette décision reflète l’engagement de notre gouvernement envers la responsabilité fiscale et la normalisation de notre approche face à la COVID-19”, a déclaré la ministre de la Santé Adriana LaGrange lors de l’annonce de cette politique. Cependant, la justification financière s’effondre rapidement sous l’examen. Le gouvernement fédéral continue de fournir gratuitement les vaccins aux provinces, ce qui signifie que le “recouvrement des coûts” de l’Alberta concerne principalement les frais d’administration—des coûts que la province a régulièrement absorbés pour d’autres vaccins dans ses programmes de santé publique.
Le moment choisi pour cette annonce coïncide avec une période de positionnement politique accru en Alberta, où les mesures pandémiques sont devenues fortement clivantes. Smith, qui a accédé au pouvoir en partie en critiquant les interventions de santé publique liées à la COVID-19, semble consolider son image politique plutôt que mettre en œuvre une politique de santé fondée sur des preuves.
Les experts en santé publique ont exprimé leur inquiétude quant aux conséquences potentielles. La Dre Neeja Bakshi, spécialiste en médecine interne à Edmonton, a averti : “Facturer des vaccins essentiels crée des obstacles inutiles aux soins préventifs. Nous savons, grâce à des décennies d’expérience en santé publique, que même de modestes obstacles financiers réduisent considérablement les taux de vaccination.”
Le calcul économique soulève également des questions. Toute économie à court terme réalisée grâce aux frais d’utilisation doit être évaluée par rapport aux augmentations potentielles des coûts de soins de santé dues aux hospitalisations évitables liées à la COVID-19. Chaque admission coûte généralement au système de santé entre 20 000 $ et 50 000 $—dépassant largement les frais d’administration des vaccins.
Cette politique diverge des approches adoptées dans d’autres provinces canadiennes, où les vaccins contre la COVID-19 restent gratuitement disponibles pour tous les résidents. La position exceptionnelle de l’Alberta la place aux côtés du Nouveau-Brunswick uniquement dans la restriction de l’accès gratuit aux vaccins, créant ce que certains critiques appellent une “approche fragmentée” de la santé publique à travers la fédération.
L’Association médicale de l’Alberta a appelé à un réexamen, soulignant que les vaccins représentent l’un des investissements de santé publique les plus rentables. “La prévention est invariablement moins coûteuse que le traitement”, a déclaré le Dr Paul Parks, président de l’AMA, dans une récente déclaration sur la politique COVID-19.
Les partisans du changement soutiennent qu’il représente une transition nécessaire pour traiter la COVID-19 comme d’autres maladies respiratoires. Cependant, cette équivalence néglige les taux d’hospitalisation significativement plus élevés et les impacts à long terme sur la santé de la COVID-19 par rapport à la grippe saisonnière.
Une analyse plus approfondie suggère que cette politique s’inscrit dans un schéma plus large de décisions apparemment conçues pour signaler un alignement politique plutôt que d’optimiser les résultats de santé publique. Le gouvernement de Smith a précédemment contesté les mesures de santé fédérales et supprimé d’autres protections pandémiques, présentant constamment la santé publique comme une question de choix personnel plutôt que de responsabilité collective.
Alors que l’Alberta met en œuvre cette approche controversée, les résidents sont confrontés à une question fondamentale qui dépasse le coût des vaccins : dans un système de santé moderne, l’accès aux soins préventifs devrait-il être déterminé par la capacité de payer, ou reconnaissons-nous certaines interventions de santé comme des biens publics qui profitent à tous lorsqu’ils sont universellement disponibles?
La réponse façonne non seulement notre réponse à la COVID-19, mais aussi l’avenir de la santé publique au Canada.