Dans les communautés tranquilles de Grey Bruce, une tendance inquiétante a émergé sur les routes rurales. Alors que la légalisation du cannabis approche de son sixième anniversaire au Canada, les responsables de la santé publique font face à une réalité inconfortable : la conduite sous l’influence du cannabis demeure un problème persistant et dangereux dans toute la région.
L’Unité de santé publique de Grey Bruce a récemment annoncé une réorientation stratégique de ses initiatives de sécurité routière, soulignant des progrès significatifs dans les domaines traditionnels tout en reconnaissant la nécessité d’une action ciblée sur la conduite sous l’influence du cannabis. L’approche globale de l’unité de santé a produit des améliorations mesurables dans le port de la ceinture de sécurité et une réduction des incidents liés à l’alcool, selon la Dre Melissa Thompson, médecin-hygiéniste en chef de la région.
“Nous avons constaté des données encourageantes montrant une augmentation du port de la ceinture de sécurité dans tous les groupes démographiques, particulièrement chez les conducteurs ruraux où nous avons historiquement rencontré des difficultés,” a expliqué la Dre Thompson lors de l’annonce d’hier. “Cependant, notre surveillance indique que l’effet du cannabis sur la conduite reste mal compris par de nombreux conducteurs, avec des idées fausses sur ses effets sur les performances de conduite.”
La décision de l’unité de santé fait suite à des statistiques préoccupantes des services de police régionaux indiquant qu’environ 17% des collisions graves de véhicules motorisés à Grey Bruce impliquent maintenant des conducteurs avec des niveaux détectables de THC. Cela représente une augmentation inquiétante de 4% depuis 2021, malgré des campagnes robustes d’éducation publique.
L’initiative introduira plusieurs composantes innovantes, y compris des sessions d’éducation communautaire avec des démonstrations interactives simulant les effets de l’altération par le cannabis sur le temps de réaction et la perception. Les détaillants locaux de cannabis s’associeront avec la santé publique pour distribuer du matériel d’information directement aux consommateurs au point d’achat.
“Contrairement à l’alcool, où le public comprend généralement la relation entre la consommation et l’altération des facultés, le cannabis présente des défis uniques,” a noté l’agent David Harrington du détachement de la PPO de Grey Bruce. “Beaucoup d’usagers croient sincèrement que leur conduite s’améliore sous l’influence, ce qui rend cela particulièrement dangereux.”
Les responsables de la santé publique ont souligné l’importance de ce changement, citant des recherches du Centre canadien sur les dépendances et l’usage de substances montrant que le cannabis peut altérer les capacités de conduite jusqu’à 24 heures après l’usage, une durée significativement plus longue que ce que beaucoup d’usagers réalisent. Ces effets incluent une coordination réduite, des temps de réaction plus lents, et une altération du jugement de la vitesse et de la distance.
L’initiative de Grey Bruce arrive au milieu de préoccupations nationales croissantes concernant la conduite sous l’influence du cannabis. Les données de Transports Canada indiquent que les incidents de circulation liés au cannabis ont augmenté de 8% à l’échelle nationale depuis 2020, les zones rurales connaissant des taux disproportionnellement plus élevés.
L’approche multidimensionnelle de l’unité de santé comprendra également des programmes d’éducation en milieu de travail ciblant les industries avec des taux plus élevés de consommation de cannabis, des campagnes de sensibilisation axées sur les jeunes dans les écoles secondaires, et une formation améliorée de détection pour les forces de l’ordre. Le financement de l’initiative provient principalement de subventions provinciales dédiées à la sécurité routière et à la prévention de l’usage de substances.
La détaillante locale de cannabis Sarah Jennings a accueilli favorablement l’initiative : “En tant que propriétaires d’entreprise, nous voulons promouvoir un usage responsable. La plupart de nos clients ne réalisent pas combien de temps l’altération peut durer, surtout avec les produits à plus forte teneur d’aujourd’hui. Cette éducation est absolument nécessaire.”
Alors que l’Unité de santé publique de Grey Bruce met en œuvre cette stratégie recentrée, la question demeure de savoir si une sensibilisation accrue peut à elle seule changer des comportements et des idées fausses profondément enracinés concernant le cannabis et la conduite. Cette approche régionale fournira-t-elle un modèle pour d’autres communautés aux prises avec des défis similaires dans le paysage post-légalisation?