Derrière le glamour et l’effervescence de la scène musicale canadienne se cache une réalité troublante qui est longtemps restée dans l’ombre. Une enquête révolutionnaire a finalement quantifié ce que de nombreux initiés de l’industrie soupçonnaient depuis des années : les problèmes de santé mentale sont omniprésents dans l’industrie musicale canadienne, créant une situation alarmante qui exige une attention immédiate.
La première évaluation complète de la santé mentale dans le secteur musical canadien révèle des statistiques inquiétantes qui dressent le portrait d’une industrie en crise. Plus de 80 % des professionnels de l’industrie musicale signalent avoir éprouvé d’importants problèmes de santé mentale, soit près du double du taux observé dans la population canadienne générale. Ces résultats proviennent d’une étude détaillée menée par l’Alliance canadienne pour la santé musicale en partenariat avec le département de recherche musicale de l’Université Ryerson.
“Les chiffres sont pires que ce que nous avions prévu, mais malheureusement pas surprenants pour ceux d’entre nous qui travaillent dans cette industrie depuis des décennies,” déclare Marie Leblanc, directrice générale de l’Alliance canadienne pour la santé musicale. “Nous sommes confrontés à un environnement où l’emploi précaire, l’instabilité financière et la pression intense créent un terrain propice aux problèmes de santé mentale.”
L’enquête, qui a recueilli les réponses de plus de 1 500 professionnels de la musique à travers le pays, a identifié plusieurs facteurs contributifs clés. L’instabilité financière est apparue comme le principal facteur de stress, 74 % des répondants signalant une anxiété importante concernant leur avenir économique. La nature précaire de l’industrie signifie que de nombreux professionnels n’ont pas la sécurité d’un emploi stable, d’avantages sociaux et d’un revenu prévisible – des défis qui ont été gravement exacerbés pendant la pandémie.
L’équilibre travail-vie personnelle semble presque inexistant pour de nombreux professionnels du secteur. Plus de 60 % des répondants ont déclaré travailler régulièrement plus de 60 heures par semaine pendant les périodes de pointe, les musiciens en tournée et le personnel de production étant confrontés à des horaires particulièrement épuisants. L’enquête a révélé que 68 % des professionnels en tournée présentaient des symptômes correspondant à l’épuisement professionnel.
Shannon Williams, ingénieure du son basée à Toronto avec quinze ans d’expérience, donne son point de vue sur ces résultats : “Il y a cette attente que l’on devrait être reconnaissant de simplement travailler dans la musique, alors les gens ne parlent pas du tribut que cela exige. J’ai vu des collègues sombrer dans la dépression tout en continuant à travailler selon des horaires épuisants parce qu’ils ne peuvent pas se permettre de prendre congé ou craignent d’être remplacés.”
Les statistiques sur la consommation de substances sont tout aussi préoccupantes. L’enquête a révélé que 42 % des répondants déclaraient consommer de l’alcool ou d’autres substances pour faire face au stress lié au travail – un taux nettement plus élevé que dans la population générale. Ce modèle d’automédication évolue souvent vers des problèmes de dépendance qui restent non traités en raison de la stigmatisation et du manque de ressources accessibles.
Plus troublante encore est la réticence que beaucoup ont exprimée à demander de l’