Dans l’obscurité précédant l’aube au nord de Gaza, ce qui a commencé comme une tentative désespérée pour obtenir de l’aide alimentaire s’est transformé en un nouveau chapitre meurtrier dans la crise humanitaire de la région. Au moins 32 Palestiniens ont été tués et plus de 175 blessés jeudi alors qu’ils tentaient d’atteindre des points de distribution alimentaire soutenus par les États-Unis, selon les responsables de la santé à Gaza.
La violence a éclaté alors que des milliers de civils affamés se rassemblaient près de la route côtière dans le nord de Gaza où des camions d’aide étaient attendus. Selon plusieurs témoignages oculaires, les forces israéliennes ont ouvert le feu sur les foules qui attendaient des fournitures désespérément nécessaires, bien que l’armée israélienne conteste cette caractérisation des événements.
“Les gens attendent depuis des jours, dormant dans les rues juste pour s’assurer un sac de farine,” a déclaré Mohammed Saleh, un résident de Gaza qui a été témoin du chaos. “Quand les camions sont finalement apparus à l’horizon, la foule s’est précipitée désespérément, et c’est à ce moment que les tirs ont commencé.”
Les Forces de défense israéliennes ont publié un communiqué affirmant que leurs troupes ont tiré des coups de semonce après que “des milliers de Gazaouis ont manifesté violemment et pillé des camions d’aide humanitaire,” ajoutant que plusieurs Palestiniens ont été piétinés dans la bousculade qui a suivi. Cependant, le personnel médical de l’hôpital Al-Awda de Gaza rapporte que de nombreuses victimes présentaient des blessures par balle compatibles avec des munitions réelles.
Cet incident marque la journée la plus meurtrière pour les Palestiniens cherchant de l’aide depuis février, lorsqu’au moins 115 personnes ont été tuées dans des circonstances similaires. La violence récurrente aux points de distribution d’aide souligne l’effondrement presque total de l’infrastructure humanitaire de Gaza après plus de sept mois de conflit.
“Ce que nous observons est l’effondrement systématique du système de distribution d’aide,” a expliqué Dr. Amira Hasan, analyste des affaires humanitaires spécialisée dans les conflits du Moyen-Orient. “Quand les gens meurent de faim, une distribution ordonnée devient pratiquement impossible sans sécurité et coordination adéquates.”
Les Nations Unies ont averti à plusieurs reprises que des conditions de famine émergent dans toute la bande de Gaza, particulièrement dans le nord où l’accès à la nourriture, à l’eau potable et aux fournitures médicales a été sévèrement restreint. Selon la dernière évaluation du Programme alimentaire mondial, plus de 90% des 2,3 millions d’habitants de Gaza font face à une insécurité alimentaire aiguë.
La réaction internationale aux décès de jeudi a été rapide et pointue. Le Département d’État américain a qualifié la perte de vies de “tragique et inacceptable,” tout en soulignant le besoin urgent d’améliorer les mécanismes de livraison d’aide. Le chef de la politique étrangère de l’Union européenne Josep Borrell a décrit la situation comme “un échec moral de la communauté internationale.”
L’incident survient dans un contexte de pression politique croissante sur les gouvernements occidentaux pour conditionner le soutien militaire à Israël à un meilleur accès humanitaire à Gaza. Les responsables canadiens se sont joints aux appels internationaux pour une plus grande protection des civils et un accès humanitaire sans entrave.
Les impacts économiques continuent également de s’accumuler. La Banque mondiale estime que l’infrastructure de Gaza a subi plus de 18,5 milliards de dollars de dommages, avec une activité commerciale effectivement arrêtée dans la plupart des secteurs. La réhabilitation économique à long terme du territoire nécessitera un investissement international substantiel, à condition qu’une résolution politique puisse être trouvée.
Alors que la nuit tombait sur Gaza après la violence de jeudi, les organisations d’aide se sont précipitées pour ajuster les plans de distribution tandis que les familles pleuraient leurs morts. La question fondamentale reste sans réponse : dans un conflit où même la recherche de nourriture peut s’avérer fatale, quels mécanismes peuvent protéger le droit le plus fondamental des civils à la survie?
