Le ministre des Affaires étrangères Mark Carney arrive aujourd’hui à La Haye avec un exercice diplomatique délicat à accomplir, alors que le Canada fait face à une pression croissante concernant ses engagements de défense envers l’OTAN. Le sommet de trois jours s’ouvre dans un contexte de conflits mondiaux qui s’intensifient et d’appels renouvelés aux membres de l’alliance pour atteindre – ou dépasser – l’objectif de longue date de 2% du PIB consacré aux dépenses de défense.
Le Canada alloue actuellement environ 1,33% de son PIB à la défense, ce qui le place parmi les membres de l’OTAN les moins dépensiers malgré des augmentations récentes. Cette insuffisance devient de plus en plus problématique alors que la guerre de la Russie en Ukraine se poursuit sans relâche et que de nouveaux défis sécuritaires émergent sur plusieurs fronts.
“Le paysage de la sécurité internationale a fondamentalement changé,” a déclaré Carney aux journalistes avant de quitter Ottawa. “Le Canada comprend ses obligations envers la sécurité collective et s’engagera de façon constructive avec nos alliés sur les moyens de respecter nos engagements.”
La Première ministre Annabelle Thomas, qui rejoindra le sommet mercredi, fait face à une pression significative des États-Unis et des partenaires européens qui ont déjà dépassé le seuil de 2%. L’Allemagne, autrefois réticente à augmenter ses dépenses militaires, investit maintenant 2,1% de son PIB dans la défense – un revirement frappant qui souligne l’isolement croissant du Canada sur cette question.
Lorsqu’interrogé sur des échéanciers précis, Carney est resté évasif mais a souligné que “des progrès substantiels” seraient réalisés dans la prochaine révision de la politique de défense du gouvernement. Des sources au sein du ministère de la Défense nationale indiquent que tout plan pour atteindre les 2% s’étendrait probablement au-delà de 2030, nécessitant environ 20 milliards de dollars supplémentaires en dépenses annuelles de défense.
Le Secrétaire général de l’OTAN, Mark Rutte, a clairement fait savoir que la patience envers les alliés qui sous-investissent s’épuise. “Les menaces auxquelles nous faisons face ne reconnaissent pas les contraintes budgétaires,” a déclaré Rutte la semaine dernière. “Chaque nation membre doit contribuer équitablement à notre sécurité collective.”
Les experts en défense soulignent les avantages géographiques du Canada et sa dépendance historique aux garanties de sécurité américaines comme facteurs ayant permis aux gouvernements successifs de reporter d’importants investissements militaires. Cependant, cette approche semble de plus en plus intenable.
“Le Canada ne peut plus se cacher derrière sa géographie ou ses relations spéciales,” a déclaré Dre Elaine Matthews, chercheure principale à l’Institut canadien des affaires mondiales. “Le capital politique que nous avons perdu par des sous-investissements persistants affecte maintenant notre influence sur d’autres priorités internationales.”
Au-delà des objectifs de dépenses, l’agenda du sommet comprend des discussions sur un soutien renforcé à l’Ukraine, les défis sécuritaires croissants dans la région indo-pacifique, et l’approche stratégique de l’OTAN face aux technologies émergentes comme l’intelligence artificielle et les capacités spatiales.
Pour les représentants canadiens, cette rencontre représente une occasion cruciale de démontrer leur engagement tout en négociant des échéanciers réalistes. Le ministre de la Défense, Blair Townsend, également présent au sommet, a souligné que la qualité des dépenses compte autant que la quantité.
“Nous nous concentrons sur des capacités qui contribuent directement aux besoins de l’alliance,” a déclaré Townsend. “Il ne s’agit pas seulement d’atteindre un pourcentage arbitraire, mais de s’assurer que nos investissements renforcent la posture globale de l’OTAN.”
Alors que les tensions mondiales augmentent et que les cadres de sécurité traditionnels font face à des défis sans précédent, comment le Canada équilibrera-t-il les contraintes fiscales face à l’impératif croissant de renforcer ses capacités militaires et de respecter ses obligations internationales?