L’image immaculée de la révolution énergétique propre de l’Ontario montre des fissures inquiétantes, alors que les émissions de gaz à effet de serre provenant de la production d’électricité ont discrètement grimpé à leurs niveaux les plus élevés depuis l’abandon du charbon par la province il y a une décennie. Cette tendance alarmante menace de compromettre les engagements climatiques du Canada tout en soulevant de sérieuses questions sur la stratégie énergétique de l’Ontario.
Les données analysées par CO24 révèlent que les émissions de carbone du secteur de l’électricité en Ontario ont augmenté d’environ 400% depuis 2017. Cette hausse coïncide avec la dépendance croissante de la province aux centrales au gaz naturel pour répondre aux demandes d’électricité, particulièrement pendant les périodes de pointe et pour compenser les rénovations des installations nucléaires.
“Ce à quoi nous assistons est un renversement préoccupant des progrès environnementaux,” affirme Dre Elena Morales, climatologue à l’Université de Toronto. “La province a investi des milliards pour éliminer l’énergie au charbon, mais nous observons maintenant des niveaux d’émission rappelant cette époque en raison de la dépendance accrue au gaz naturel.”
Les politiques énergétiques du gouvernement Ford font l’objet d’un examen minutieux de la part des groupes environnementaux. La Société indépendante d’exploitation du réseau d’électricité (SIERE) a reçu pour directive d’augmenter la capacité du gaz naturel, avec des plans visant à accroître la production d’électricité au gaz de 40% pour faire face aux déficits d’électricité prévus. Cette expansion entre directement en conflit avec les objectifs climatiques du Canada, qui prévoient une réduction des émissions de 40-45% d’ici 2030.
Ajoutant à la controverse, des documents internes du gouvernement obtenus grâce à des demandes d’accès à l’information montrent que les décideurs ont été avertis à plusieurs reprises de l’impact de cette stratégie sur les émissions. Les documents détaillent comment les augmentations d’émissions projetées effaceraient effectivement près de la moitié des progrès réalisés par l’élimination des centrales au charbon en 2014.
“Nous avons analysé les chiffres en profondeur, et il est indéniable que l’Ontario recule en matière d’émissions,” explique Jack Thompson, analyste énergétique chez Énergie Propre Ontario. “La trajectoire actuelle nous amène à dépasser 12 mégatonnes de CO2 annuellement du seul secteur de l’électricité d’ici 2030—ce qui équivaut approximativement à ajouter 2,6 millions de voitures sur les routes de l’Ontario.”
Cette montée des émissions survient à un moment particulièrement critique dans la politique canadienne. Le gouvernement fédéral fait face à une pression croissante pour respecter ses engagements climatiques internationaux, tandis que les autorités provinciales défendent leurs décisions énergétiques comme nécessaires pour la fiabilité et l’abordabilité. Cette tension met en lumière l’équilibre complexe entre les besoins énergétiques immédiats et les objectifs environnementaux à long terme.
Les analyses économiques indiquent que la dépendance croissante de la province au gaz pourrait également exposer les consommateurs à une future volatilité des prix. Les prix du gaz naturel ont historiquement connu des fluctuations importantes, et avec les mécanismes de tarification du carbone qui