Les évacués des incendies de forêt du nord de l’Ontario s’adaptent à la vie dans la région du Grand Toronto

Olivia Carter
6 Min Read
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Alors que la fumée envahissait leurs communautés et que les flammes menaçaient leurs maisons, des milliers de résidents du Nord de l’Ontario se sont retrouvés brusquement déracinés de leur environnement familier et relocalisés dans la région métropolitaine du Grand Toronto. La transition brutale d’une nature sauvage isolée à l’étalement urbain a créé des défis mais aussi des moments de connexion inattendus pour ces évacués.

“Je n’ai jamais vu d’immeubles aussi hauts de ma vie,” confie Martha Beardy, une aînée de 67 ans de la Première Nation de Kashechewan, en contemplant la silhouette de Toronto depuis son hébergement temporaire. “Le bruit ne s’arrête jamais ici, même pas la nuit. Chez nous, on entend le vent dans les arbres et parfois un loup qui hurle.”

L’opération d’évacuation, l’une des plus importantes de l’histoire de l’Ontario, a débuté fin mai lorsque de graves feux de forêt ont menacé plusieurs communautés nordiques. Les responsables provinciaux de la gestion des urgences ont collaboré avec Services aux Autochtones Canada pour reloger plus de 4 000 résidents en sécurité dans le sud de l’Ontario, la majorité trouvant refuge temporaire dans des hôtels à travers le Grand Toronto.

Pour de nombreux évacués, les différences culturelles et environnementales se sont avérées désorientantes. Habitués à des communautés soudées où tout le monde se connaît, plusieurs naviguent maintenant dans des couloirs d’hôtels anonymes et des rues urbaines bondées. Les aliments traditionnels sont difficiles à trouver, et les activités quotidiennes nécessitent l’apprentissage de nouveaux systèmes de transport et de commerce.

L’équipe des Services de santé Peetabeck, dirigée par Janet Nakogee, a établi un centre culturel improvisé dans une salle de conférence d’un des hôtels hébergeant les évacués de la Première Nation de Fort Albany. “Nous offrons des cercles de guérison traditionnels, des cours de langue pour les enfants et des repas communautaires quand c’est possible,” explique Nakogee. “Il est crucial que notre peuple maintienne ses liens culturels pendant ce déplacement.”

Les organismes torontois ont répondu avec des initiatives de soutien. Le Centre canadien autochtone de Toronto a organisé des collectes de fournitures et des événements culturels, tandis que plusieurs groupes confessionnels ont ouvert leurs portes pour des rassemblements communautaires. Les conseils scolaires du Grand Toronto ont travaillé pour accueillir les enfants évacués dans des programmes estivaux, offrant à la fois une continuité éducative et des opportunités sociales.

“La générosité que nous avons rencontrée ici est extraordinaire,” témoigne William Metatawabin, un membre du conseil de la Première Nation de Fort Albany. “Mais beaucoup de nos aînés ont du mal avec la chaleur, la pollution et la déconnexion de la terre. Ils demandent tous les jours quand nous pourrons rentrer chez nous.”

Cette question reste difficile à répondre. Les responsables provinciaux qui surveillent la situation des feux de forêt rapportent que, bien que certains incendies aient été maîtrisés, d’autres continuent de menacer les infrastructures et rendent impossible un retour sécuritaire pour plusieurs communautés. Les évaluations des dommages révèlent que certaines zones nécessiteront d’importantes reconstructions avant que les résidents puissent revenir.

Pour les jeunes évacués, l’expérience a été un mélange d’anxiété et de découverte. Darren Wesley, 17 ans, de la Première Nation d’Attawapiskat, documente sa vie temporaire à Toronto à travers des vidéos TikTok qui ont recueilli des milliers de vues. “Ma communauté me manque, mais j’ai aussi pu visiter l’aquarium et assister à un match des Blue Jays,” dit-il. “J’essaie d’apprendre tout ce que je peux pendant que je suis ici.”

Les professionnels de la santé mettent en garde contre l’impact psychologique du déplacement, particulièrement pour ceux qui ont vécu des traumatismes historiques. “La relocalisation forcée, même lorsqu’elle est nécessaire pour la sécurité, peut déclencher des traumatismes intergénérationnels liés aux pensionnats autochtones et autres déplacements historiques,” explique Dre Suzanne Stewart, directrice de l’Institut Waakebiness-Bryce pour la santé autochtone à l’Université de Toronto.

Le gouvernement provincial a alloué 22 millions de dollars pour la réponse d’urgence aux feux de forêt du nord, avec un financement supplémentaire prévu à mesure que la situation évolue. Pendant ce temps, les climatologues soulignent la fréquence et la gravité croissantes de ces incendies comme preuves des impacts des changements climatiques sur les communautés nordiques.

Alors que les semaines de déplacement s’étirent en mois pour certains évacués, des questions tant pratiques que philosophiques se posent sur l’avenir. Les efforts de reconstruction tiendront-ils compte de la résilience climatique? Comment les connaissances écologiques traditionnelles peuvent-elles éclairer la gestion des feux de forêt? Et peut-être plus immédiatement pour ceux qui vivent dans des chambres d’hôtel loin de chez eux: comment les communautés maintiennent-elles leur identité culturelle lorsqu’elles sont physiquement séparées de leurs territoires traditionnels?

Alors que le Canada fait face à ce qui pourrait devenir des déplacements de plus en plus fréquents causés par le climat, les expériences de ces évacués du Nord de l’Ontario offrent d’importantes leçons sur la réponse d’urgence, la préservation culturelle et la signification profonde du foyer. Quand la fumée se dissipera enfin, qu’est-ce qui aura changé—et qu’est-ce qui doit rester inchangé?

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