La brusque fermeture du Programme pilote agroalimentaire du Canada a envoyé des ondes de choc dans le secteur de la production alimentaire du pays, perturbant potentiellement le parcours des aliments de la ferme à la table. La décision du gouvernement fédéral de mettre fin à cette voie d’immigration spécialisée—conçue pour remédier aux pénuries chroniques de main-d’œuvre dans la transformation des viandes, la production de champignons et la culture en serre—a laissé les leaders de l’industrie à la recherche de solutions dans un marché du travail déjà fragile.
“Cette décision ne pouvait pas tomber à un pire moment,” déclare Martin Caron, président de la Fédération canadienne de l’agriculture. “Nos producteurs font face à des défis de personnel sans précédent tout en essayant de maintenir la sécurité alimentaire des Canadiens. Le programme pilote était une rare lueur d’espoir dans notre stratégie de main-d’œuvre.”
Le programme de trois ans, lancé en mai 2020, visait à offrir une voie claire vers la résidence permanente pour les travailleurs étrangers temporaires dans des secteurs agricoles clés. Contrairement au Programme des travailleurs étrangers temporaires traditionnel, le Programme pilote agroalimentaire créait une stabilité en offrant aux participants et à leurs familles une voie pour devenir résidents permanents canadiens après avoir accumulé une expérience de travail suffisante.
Le ministre de l’Immigration Marc Miller a défendu la fermeture, affirmant que le programme avait atteint son plafond de 2 750 demandes. Cependant, les associations de l’industrie soutiennent que la fin du programme laisse un écart critique dans la stratégie de développement de la main-d’œuvre agricole du Canada qu’aucun programme existant ne comble adéquatement.
Des données récentes de Statistique Canada révèlent la gravité de la situation—le secteur agricole fait actuellement face à près de 20 000 postes vacants, représentant presque 7 % de tous les postes. Ce taux de vacance dépasse considérablement la moyenne nationale dans tous les secteurs et crée une vulnérabilité dans la chaîne d’approvisionnement alimentaire du Canada.
“Ce ne sont pas simplement des chiffres sur une page,” explique Dr. Sylvain Charlebois, directeur du Laboratoire de sciences analytiques en agroalimentaire de l’Université Dalhousie. “Chaque poste non pourvu dans la transformation alimentaire peut affecter la capacité de production de 15 à 20 %. Multiplié à l’échelle de l’industrie, nous parlons de pénuries alimentaires potentielles et d’augmentations de prix qui touchent directement les consommateurs canadiens.”
Le Conseil des viandes du Canada rapporte que les usines de transformation à travers le pays fonctionnent à 30 % de capacité réduite en raison des pénuries de personnel—une situation que le Programme pilote agroalimentaire était spécifiquement conçu pour résoudre. Sans programme de remplacement, les experts de l’industrie préviennent que les prix des aliments pourraient augmenter davantage et la production alimentaire nationale pourrait être compromise.
Les économistes agricoles évoquent une tempête parfaite de défis : une main-d’œuvre vieillissante, l’urbanisation qui éloigne les jeunes Canadiens des emplois agricoles ruraux, et la nature physiquement exigeante de nombreux postes de transformation. Le programme pilote avait été conçu pour aborder ces problèmes structurels en créant des voies durables pour les travailleurs prêts à occuper ces rôles essentiels.
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