Dans un développement marquant qui a fait des vagues tant dans les conseils d’administration que dans les communautés autochtones, un important chef des Premières Nations de la Colombie-Britannique a exprimé de sérieuses préoccupations concernant la fusion proposée entre les géants miniers Teck Resources et Anglo American. Cette transaction de 9,6 milliards de dollars, qui créerait l’un des plus grands conglomérats miniers au monde, fait maintenant l’objet d’un examen minutieux quant à ses impacts potentiels sur les droits autochtones et les accords de gestion environnementale établis depuis des décennies.
“Il ne s’agit pas simplement d’une restructuration d’entreprise—c’est une question d’honorer des engagements générationnels envers les peuples dont les terres ancestrales sont exploitées par ces entreprises,” a déclaré le Chef Robert Phillips de la Nation Nlaka’pamux lors d’une entrevue exclusive. “Les accords que nous avons négociés laborieusement avec Teck au fil des années pourraient être compromis par cette acquisition.”
La fusion proposée, annoncée le mois dernier, verrait Anglo American acquérir les vastes opérations de charbon métallurgique de Teck dans la vallée d’Elk en Colombie-Britannique, une région où plusieurs Premières Nations détiennent des territoires traditionnels et ont établi des ententes sur les répercussions et les avantages. Ces contrats juridiquement contraignants comprennent généralement des dispositions pour la protection de l’environnement, les opportunités d’emploi et le partage des revenus.
Les analystes de l’industrie chez RBC Marchés des Capitaux estiment que les accords actuels entre Teck et les communautés des Premières Nations représentent environ 75 millions de dollars en avantages annuels, y compris des paiements directs, des opportunités de contrats et des programmes de surveillance environnementale. L’incertitude entourant ces accords a déclenché des demandes urgentes de consultation de la part des communautés touchées.
“Nous ne sommes pas fondamentalement opposés aux transactions commerciales,” a précisé Phillips, “mais nous nous attendons à être des participants significatifs dans toute décision qui affecte nos terres et l’avenir de notre peuple.” Il a souligné que les dirigeants d’Anglo American n’ont pas encore défini leur approche pour honorer les accords autochtones existants, créant un vide d’information préoccupant.
Le moment est particulièrement délicat alors que la fusion coïncide avec la mise en œuvre par la Colombie-Britannique de la Loi sur la Déclaration des droits des peuples autochtones, une législation provinciale qui exige une consultation significative avec les Premières Nations sur le développement des ressources. Des experts juridiques suggèrent que cette transaction pourrait devenir un cas test important sur la façon dont la restructuration d’entreprise s’entrecroise avec les droits autochtones dans le droit canadien.
Sarah Davidson, porte-parole d’Anglo American, a déclaré que l’entreprise “demeure engagée envers des relations respectueuses avec les partenaires autochtones” mais a reconnu que des plans spécifiques pour la transition des accords existants sont encore en cours d’élaboration. “Nous reconnaissons l’importance de ces partenariats et avons l’intention d’engager directement les communautés touchées dans les semaines à venir,” a ajouté Davidson.
Pour des communautés comme les Nlaka’pamux, dont le territoire traditionnel comprend des zones où Teck exploite la mine de cuivre Highland Valley, les enjeux vont au-delà des considérations financières. Les sites du patrimoine culturel, la surveillance de la qualité de l’eau et les engagements de remise en état des terres sont tous en jeu.
La fusion soulève également des questions plus larges sur l’investissement étranger dans le secteur des ressources naturelles du Canada et sur la façon dont la consolidation des entreprises affecte les parties prenantes locales. Bien que le gouvernement fédéral examine les acquisitions étrangères majeures en vertu de la Loi sur Investissement Canada, les critiques soutiennent que les intérêts autochtones reçoivent un poids insuffisant dans ces délibérations.
Alors que les régulateurs fédéraux commencent leur évaluation de la transaction proposée, le Chef Phillips et les dirigeants de cinq autres Premières Nations ont demandé une participation formelle au processus d’examen. “Ce qui se passe ici établira un précédent sur la façon dont les droits autochtones sont respectés—ou ignorés—dans les fusions d’entreprises à travers le Canada,” a averti Phillips.
À une époque où les considérations environnementales, sociales et de gouvernance influencent de plus en plus les décisions d’investissement, la résolution de ces préoccupations des Premières Nations pourrait s’avérer cruciale pour le succès ultime de la fusion. Cette transaction historique établira-t-elle une nouvelle norme pour l’inclusion autochtone dans les transitions d’entreprises, ou répétera-t-elle les schémas historiques de marginalisation que les efforts de réconciliation canadiens ont cherché à résoudre?