Dans un conflit de travail qui s’intensifie et menace de perturber le réseau de transport en commun de Montréal, les employés du transport ont annoncé jeudi qu’ils refuseront toutes les heures supplémentaires à partir de la semaine prochaine, créant potentiellement d’importantes lacunes de service à travers les réseaux d’autobus et de métro de la ville.
Le Syndicat du Transport de Montréal (STM), qui représente près de 4 500 chauffeurs et travailleurs de maintenance, a voté massivement contre les quarts de travail supplémentaires à partir du 22 avril, alors que les négociations avec l’autorité de transport atteignent une impasse critique.
“Ce n’est pas une décision que nos membres ont prise à la légère,” a déclaré François Lemieux, président du syndicat de la STM. “Après des mois de négociations au point mort et une frustration croissante, les travailleurs estiment qu’ils n’ont pas d’autre choix que de prendre cette mesure pour faire entendre leur voix.”
Le différend porte sur plusieurs questions clés, notamment les augmentations salariales, la flexibilité des horaires et des conditions de travail que les représentants syndicaux décrivent comme “de plus en plus exigeantes.” Selon des documents internes obtenus par CO24 News, l’autorité de transport dépend fortement des quarts supplémentaires pour maintenir les niveaux de service réguliers, environ 18 % de tous les itinéraires prévus dépendant de l’acceptation d’heures supplémentaires par les travailleurs.
Le réseau de transport de Montréal, qui dessert plus de 1,5 million d’usagers quotidiens, fonctionne déjà sous tension suite aux compressions budgétaires liées à la pandémie et aux pénuries de personnel. La direction de la STM a publié un communiqué reconnaissant l’impact potentiel sur le service tout en exhortant la direction du syndicat à revenir à la table des négociations.
“Nous reconnaissons le droit de nos employés d’exprimer leurs préoccupations, mais cette action pénalisera malheureusement les milliers de Montréalais qui dépendent quotidiennement du transport en commun,” a déclaré Sophie Tremblay, directrice des communications pour la STM. “Nous restons déterminés à trouver une résolution qui équilibre les préoccupations des travailleurs avec nos réalités financières.”
Les représentants municipaux s’efforcent d’évaluer l’impact potentiel et de développer des plans d’urgence. La mairesse Valérie Plante a abordé la situation lors d’une conférence de presse hier, soulignant la nature essentielle du transport public pour la deuxième plus grande ville du Canada.
“Nous comprenons qu’il y a des préoccupations légitimes de la part des travailleurs, mais nous devons trouver des solutions qui ne compromettent pas la mobilité des Montréalais,” a affirmé Plante. “J’appelle les deux parties à intensifier les négociations et à éviter toute perturbation du service.”
Les experts en transport prévoient que le refus des heures supplémentaires pourrait réduire le service jusqu’à 20 % aux heures de pointe, affectant particulièrement les circuits de banlieue et le service de fin de semaine. Dr. Martin Cohen, chercheur en politique de transport à l’Université de Montréal, estime que ce conflit met en lumière des problèmes structurels au sein du système.
“Le réseau de transport de Montréal, comme beaucoup d’autres en Amérique du Nord, est devenu trop dépendant des heures supplémentaires pour maintenir les niveaux de service de base,” a expliqué Cohen. “Cela crée une situation insoutenable où la direction et les travailleurs sont pris dans un cycle qui menace ultimement la fiabilité du service.”
Les représentants syndicaux indiquent qu’ils sont prêts à intensifier les mesures si des progrès significatifs ne sont pas réalisés dans les négociations. La convention collective actuelle a expiré en janvier et, bien que les pourparlers se soient poursuivis, les deux parties font état de désaccords fondamentaux sur des questions clés.
Pour les usagers comme Isabelle Tremblay, qui compte sur les transports en commun pour son trajet quotidien de Laval au centre-ville de Montréal, la perturbation potentielle crée une anxiété importante.
“Je n’ai pas d’options de transport alternatives,” a déclaré Tremblay. “Si le service d’autobus devient peu fiable, je ne sais honnêtement pas comment je vais me rendre au travail régulièrement.”
Cette action syndicale survient dans un contexte de tensions politiques plus larges concernant le financement des transports en commun à travers le Canada, les gouvernements fédéral et provinciaux étant sous pression pour accroître leur soutien aux réseaux de transport urbain confrontés aux défis de fréquentation post-pandémie et aux coûts opérationnels croissants.
Alors que Montréal se prépare à d’éventuelles perturbations de service, la question demeure : les responsables municipaux peuvent-ils négocier un compromis qui réponde aux préoccupations des travailleurs tout en préservant ce lien de transport essentiel au fonctionnement économique et social de la ville?