Alors que Postes Canada perd environ 10 millions de dollars par jour durant la grève nationale en cours, l’ancien gouverneur de la Banque du Canada, Mark Carney, a critiqué sévèrement le modèle d’affaires actuel de la société d’État. Le conflit de travail prolongé entre Postes Canada et le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes (STTP) s’étire maintenant dans sa deuxième semaine, paralysant la livraison du courrier à travers le pays et suscitant des appels urgents à une réforme structurelle.
“Le modèle actuel de Postes Canada est tout simplement insoutenable dans l’économie numérique d’aujourd’hui,” a déclaré Carney lors d’une entrevue télévisée avec CO24 News. “Bien que les services postaux demeurent essentiels, particulièrement pour les communautés rurales, la société nécessite une restructuration fondamentale pour s’adapter aux comportements changeants des consommateurs et aux réalités technologiques.”
La grève, qui a débuté le 15 novembre, a effectivement arrêté les opérations dans les installations de Postes Canada à l’échelle nationale, avec environ 55 000 travailleurs en débrayage. Les négociations sont au point mort sur plusieurs questions litigieuses, notamment les augmentations salariales, les mesures de sécurité au travail et la sécurité d’emploi face à l’automatisation.
Carney, qui occupe maintenant le poste d’envoyé spécial des Nations Unies pour l’action climatique et le financement après son mandat à la Banque du Canada et à la Banque d’Angleterre, a souligné les conséquences économiques de cette interruption prolongée de service. “Au-delà des pertes quotidiennes immédiates, nous constatons des impacts significatifs sur les entreprises canadiennes qui dépendent des services postaux pour les livraisons, la facturation et les communications avec les clients,” a-t-il noté.
Le conflit survient à un moment particulièrement difficile pour Postes Canada, qui a déclaré une perte de 429 millions de dollars pour 2023, alors que le volume du courrier continue sa forte baisse. La livraison de colis, bien qu’en croissance, fait face à une concurrence intense des services de messagerie privés et des géants du commerce électronique qui développent leurs propres réseaux de livraison.
Le premier ministre Justin Trudeau a jusqu’à présent résisté aux appels des partis d’opposition pour légiférer un retour au travail des postiers, préférant exhorter les deux parties à parvenir à un règlement négocié. “Nous croyons au processus de négociation collective,” a déclaré Trudeau pendant la période des questions. “Ce sont des négociations difficiles mais nécessaires sur l’avenir du service postal au Canada.”
Les analystes de l’industrie suggèrent que les défis de Postes Canada reflètent ceux auxquels font face les services postaux mondialement, alors que la communication numérique continue d’éroder les volumes de courrier traditionnel. “Ce que nous observons est un moment existentiel pour Postes Canada,” a expliqué Dr. Elaine Wong, professeure de stratégie d’entreprise à l’Université de Toronto. “La société doit réinventer son rôle dans une économie numérique tout en maintenant des services essentiels pour les Canadiens.”
La présidente du STTP, Jan Simpson, a défendu la position du syndicat, soutenant que les travailleurs ne devraient pas faire les frais de l’échec de la direction à innover. “Nos membres fournissent des services essentiels aux Canadiens chaque jour, souvent dans des conditions difficiles. Nous luttons pour une rémunération équitable et des conditions de travail sécuritaires pendant que la société se concentre sur la réduction des coûts plutôt que sur des stratégies de croissance.”
Les petites entreprises à travers le Canada ont été particulièrement touchées par la grève. Un récent sondage de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante a révélé que 68% des propriétaires de petites entreprises ont signalé des perturbations importantes dans leurs opérations, beaucoup se précipitant pour trouver des méthodes de livraison alternatives à des coûts considérablement plus élevés.
Alors que les négociations se poursuivent sous un black-out médiatique, la question demeure de savoir si Postes Canada peut émerger de ce conflit avec une voie viable pour l’avenir. Carney et d’autres experts économiques suggèrent que toute résolution doit inclure une réforme substantielle du modèle d’affaires de la société, incluant potentiellement des réductions de service, des changements de tarification et une diversification vers de nouvelles sources de revenus.
Ce qui reste incertain, c’est si les Canadiens sont prêts pour une transformation fondamentale d’un service qui fait partie du tissu national depuis 1867. Alors que les alternatives numériques continuent de remplacer le courrier traditionnel, comment Postes Canada peut-elle se réinventer tout en maintenant son mandat de fournir un service universel à tous les Canadiens, peu importe où ils vivent?