Le premier appel mobile au Canada a été passé le 1er juillet 1985 — un début délibérément patriotique lors de la fête du Canada. Le maire de Toronto de l’époque, Art Eggleton, a appelé le maire de Montréal, Jean Drapeau, marquant la naissance officielle de la communication cellulaire dans notre pays. L’appareil utilisé ce jour-là n’avait rien à voir avec le smartphone élégant que nous glissons machinalement dans nos poches aujourd’hui; c’était le Cantel 400, un engin volumineux pesant près de 800 grammes avec un prix d’environ 4 000 $ (à peu près 10 000 $ en dollars actuels).
En réfléchissant à quatre décennies de technologie mobile au Canada, il est bon de se rappeler que ce que nous considérons maintenant comme un prolongement essentiel de nous-mêmes a commencé comme un luxe exclusif. Ces premiers utilisateurs ne défilaient pas sur TikTok ou ne commandaient pas sur Uber Eats — ils faisaient simplement des appels, à environ 1 $ la minute, sur des appareils qui nécessitaient parfois une batterie séparée de la taille d’une mallette.
“Les premiers téléphones cellulaires étaient des symboles de statut, pas des outils pratiques,” explique Dre Melissa Vincent, historienne de la technologie à l’Université McGill. “Seuls les cadres, les médecins de garde et les personnes fortunées pouvaient justifier cette dépense. L’idée que les enfants puissent un jour avoir leurs propres téléphones mobiles aurait semblé absurde.”
La transformation de la nouveauté en nécessité s’est produite progressivement, puis soudainement. Au milieu des années 1990, les téléphones cellulaires avaient considérablement diminué en taille et en prix. L’emblématique Nokia 5110 avec son révolutionnaire jeu Snake a été la première introduction de nombreux Canadiens au divertissement mobile. Des entreprises comme Fido et Clearnet (plus tard absorbées par Rogers et Telus) ont étendu la couverture et introduit des prix compétitifs qui ont poussé l’adoption du mobile au-delà des centres urbains.
La révolution BlackBerry a marqué la contribution la plus significative du Canada à la culture mobile mondiale. L’entreprise Research In Motion basée à Waterloo a créé des appareils qui ont transformé la façon dont les affaires étaient menées dans le monde entier. Pendant un bref moment glorieux, le Canada a mené la révolution des smartphones, notre “CrackBerry” local devenant si essentiel à la vie professionnelle que même Barack Obama a refusé d’abandonner le sien en devenant président américain en 2009.
“BlackBerry représentait l’innovation canadienne à son meilleur,” note l’analyste technologique Jean Tremblay. “Cela montrait que nous pouvions concurrencer mondialement dans la technologie de pointe. Malheureusement, l’entreprise n’a pas su anticiper la rapidité avec laquelle les écrans tactiles et les écosystèmes d’applications révolutionneraient l’industrie.”
En effet, l’introduction de l’iPhone en 2007 a fondamentalement changé notre relation avec la technologie mobile. Soudainement, l’aspect téléphonique de l’appareil est devenu presque secondaire par rapport à ses autres capacités. Médias sociaux, cartographie, photographie, services bancaires, rencontres, suivi de la condition physique — des industries entières ont été bouleversées alors que ces fonctions migraient vers les superordinateurs dans nos poches.
Les impacts sociétaux ont été profonds. La technologie mobile a démocratisé la création de contenu, connecté les communautés éloignées, révolutionné les interventions d’urgence et transformé notre façon de naviguer dans les espaces physiques et les relations sociales. Un rapport de Statistique Canada de 2023 a révélé que 99 % des Canadiens entre 15 et 34 ans possèdent maintenant un smartphone, l’adoption nationale globale dépassant 90 %.
Pourtant, cette transformation n’a pas été sans conséquences. La dépendance aux écrans, les préoccupations liées à la vie privée, les fractures numériques et les impacts environnementaux de la production et des déchets électroniques présentent des défis importants. Le smartphone moderne contient des dizaines de matériaux provenant du monde entier, souvent dans des conditions de travail discutables, créant des questions éthiques sur notre dépendance technologique collective.
Pour les communautés autochtones du Nord canadien, la technologie mobile est arrivée plus tard mais est devenue vitale pour la préservation culturelle et pour surmonter l’isolement. “Les smartphones nous ont permis de documenter les connaissances traditionnelles et de connecter les jeunes avec les aînés d’une manière auparavant impossible,” explique Sarah Koonoo, technologue inuite qui développe des applications d’apprentissage des langues. “Mais nous luttons toujours pour l’équité d’infrastructure que les Canadiens du sud tiennent pour acquise.”
Pour l’avenir, les réseaux 5G promettent d’inaugurer une autre révolution dans notre utilisation de la technologie mobile, avec la réalité augmentée, les véhicules autonomes et l’Internet des objets qui brouillent davantage les frontières entre les domaines numériques et physiques. Les entreprises de télécommunications canadiennes ont investi des milliards dans cette infrastructure de nouvelle génération, bien que la couverture rurale demeure un défi persistant.
Ce qui a commencé comme un article de luxe pour l’élite est devenu si profondément intégré dans la vie canadienne que les pannes temporaires de réseau sont maintenant considérées comme des urgences nationales. Le smartphone a évolué d’une technologie révolutionnaire à une nécessité banale, quelque chose que nous remarquons seulement quand il ne fonctionne pas correctement — peut-être le marqueur ultime de son caractère essentiel.
Alors que nous célébrons quatre décennies de communication mobile au Canada, l’aspect le plus remarquable n’est peut-être pas la technologie elle-même, mais comment elle nous a complètement transformés. Des affaires à l’éducation, des soins de santé au divertissement, des relations amoureuses aux dynamiques familiales — aucun aspect de la vie canadienne ne reste intact face aux appareils que nous tenons maintenant complètement pour acquis.
Regarderons-nous les smartphones d’aujourd’hui avec le même amusement que nous dirigeons maintenant vers ces pionniers de la taille d’une brique? Presque certainement. La seule question est de savoir quelle technologie inimaginable les aura remplacés.
Pour plus de perspectives sur l’impact de la technologie sur la société canadienne, visitez notre section CO24 Culture, ou explorez les tendances numériques émergentes dans notre couverture CO24 Tendances.