Dans un moment solennel sans précédent, le roi Charles III a rendu hommage aux victimes de l’attentat d’Air India de 1985 lors de la cérémonie Trooping the Colour de samedi à Londres. Ce geste du monarque marque la première fois que cette tragédie canadienne est reconnue pendant le prestigieux défilé d’anniversaire royal, signalant une reconnaissance accrue de ce douloureux chapitre des relations canado-britanniques.
Alors que les tambours cérémoniels se taisaient sur la Horse Guards Parade, le roi Charles a marqué une pause pour honorer les 329 personnes qui ont perdu la vie lorsque le vol 182 d’Air India a explosé au large des côtes irlandaises le 23 juin 1985. L’attentat, qui a fait 280 victimes canadiennes, demeure l’acte terroriste le plus meurtrier de l’histoire du Canada et l’une des catastrophes aériennes les plus dévastatrices avant le 11 septembre.
“Aujourd’hui, nous nous souvenons de ceux qui ont péri dans la tragédie d’Air India, dont tant de Canadiens dont la vie a été tragiquement écourtée,” a déclaré le roi Charles, s’adressant à la foule assemblée et au personnel militaire. “Leur mémoire nous rappelle notre responsabilité commune de combattre la haine et l’extrémisme sous toutes ses formes.”
Cette commémoration survient quelques jours avant le 39e anniversaire de l’attentat, attribué à des extrémistes sikhs cherchant à se venger du gouvernement indien. Pendant des décennies, les familles des victimes se sont battues pour une plus grande reconnaissance de l’attaque, qui, selon certains critiques, n’a pas reçu l’attention adéquate à l’époque en raison de l’origine sud-asiatique prédominante des victimes.
Le premier ministre canadien Justin Trudeau, qui assistait à la cérémonie dans le cadre de sa tournée diplomatique européenne, a exprimé sa gratitude pour la reconnaissance du monarque. “Cette reconnaissance de Sa Majesté signifie énormément pour les familles qui portent ce deuil depuis près de quatre décennies,” a déclaré Trudeau. “Cela renforce le fait que leurs proches n’ont pas été oubliés sur la scène mondiale.”
Pour les Canadiens d’origine sud-asiatique, l’hommage du roi représente une étape importante vers la guérison. Dr Padmini Sharma, qui a perdu trois membres de sa famille dans l’attentat, a confié que cette reconnaissance ressemble à “une validation du long combat de notre communauté pour être reconnue.”
Le moment choisi pour cet hommage s’aligne avec les efforts de la monarchie pour renforcer les liens avec les nations du Commonwealth et reconnaître les torts historiques. Les commentateurs royaux notent que le roi Charles utilise de plus en plus sa position pour aborder des événements historiques complexes qui s’entrecroisent avec le passé colonial britannique et les relations internationales actuelles.
“Le roi comprend qu’un leadership significatif dans le monde d’aujourd’hui nécessite de reconnaître les événements historiques douloureux,” a expliqué Dr Elizabeth Harper, professeure d’études du Commonwealth au King’s College de Londres. “Cet hommage n’est pas simplement une courtoisie diplomatique—c’est la reconnaissance que la pertinence de la monarchie dépend de sa capacité à établir des liens avec toutes les communautés au sein du Commonwealth.”
L’enquête sur l’attentat d’Air India reste l’une des affaires criminelles les plus complexes et controversées du Canada, avec une seule personne condamnée en lien avec l’attaque. Pour de nombreuses familles, la justice demeure insaisissable malgré des décennies de plaidoyer et de nombreuses enquêtes gouvernementales.
Alors que le spectacle coloré du Trooping the Colour se poursuivait après le moment de recueillement, la juxtaposition de la tradition festive et de la commémoration solennelle a mis en lumière le rôle évolutif de la monarchie dans la reconnaissance des douleurs historiques. Dans un monde de plus en plus divisé, de tels gestes symboliques de la part d’institutions traditionnelles peuvent-ils aider à combler les divisions culturelles et promouvoir la guérison au-delà des frontières internationales?