En réponse décisive aux ambitions croissantes du Canada en matière d’énergie nucléaire, le Collège Humber de Toronto a dévoilé une expansion considérable de ses programmes de formation en technologie nucléaire visant à combler une pénurie imminente de main-d’œuvre. Cette initiative survient alors que les experts de l’industrie préviennent que des milliers de professionnels qualifiés seront nécessaires pour soutenir la renaissance nucléaire du pays, particulièrement avec les projets de petits réacteurs modulaires (PRM) qui gagnent du terrain dans plusieurs provinces.
“Nous faisons face à une potentielle crise de compétences dans le secteur nucléaire,” explique Dr. Melissa Chen, Doyenne des Sciences Appliquées au Collège Humber. “Nos prévisions indiquent que le Canada aura besoin d’environ 7 500 nouveaux professionnels du nucléaire d’ici 2030, et actuellement, notre infrastructure éducative n’est simplement pas prête à répondre à cette demande.”
Le programme élargi introduira des certificats et diplômes spécialisés axés sur les protocoles de sécurité nucléaire, l’entretien des réacteurs, la radioprotection et la conformité réglementaire. Ce qui distingue l’approche de Humber, c’est son partenariat direct avec des leaders de l’industrie, notamment Ontario Power Generation, Bruce Power et les Laboratoires Nucléaires Canadiens, créant un programme explicitement aligné sur les besoins réels de l’industrie.
La stratégie nucléaire ambitieuse de l’Ontario représente le principal moteur de cette initiative éducative. La province a récemment annoncé des plans pour remettre à neuf les réacteurs CANDU existants tout en développant simultanément la technologie PRM de prochaine génération, créant ainsi des milliers de postes hautement qualifiés nécessitant une formation spécialisée.
L’analyste de l’industrie Trevor McKenzie de l’Association Nucléaire Canadienne souligne des implications plus larges: “Ce n’est pas simplement un phénomène ontarien. La Saskatchewan et le Nouveau-Brunswick ont signé des protocoles d’entente concernant le développement des PRM, tandis que l’Alberta explore activement les options nucléaires pour réduire son empreinte carbone tout en répondant à la demande énergétique croissante.”
Le moment est particulièrement critique alors que la main-d’œuvre nucléaire existante du Canada approche de l’âge de la retraite. Selon les données de Ressources naturelles Canada, environ 40% des professionnels du nucléaire actuels quitteront le marché du travail au cours de la prochaine décennie, créant un potentiel vide d’expertise précisément au moment où l’industrie prévoit une expansion significative.
“Nous concevons ces programmes avec plusieurs points d’entrée,” note Chen. “Cela comprend des parcours directs pour les récents diplômés du secondaire, des programmes de transition spécialisés pour les professionnels en milieu de carrière provenant d’industries connexes, et des opportunités de perfectionnement pour les travailleurs existants du secteur énergétique.”
L’expansion du programme reflète également la politique énergétique évolutive du Canada, qui positionne de plus en plus l’énergie nucléaire comme une pierre angulaire de la stratégie climatique du pays. Des documents récents de politique fédérale identifient l’énergie nucléaire comme essentielle pour atteindre des émissions nettes nulles d’ici 2050, marquant un changement significatif par rapport aux décennies précédentes où l’expansion nucléaire demeurait politiquement controversée.
L’analyse économique suggère que l’initiative apportera des rendements substantiels. Le Conference Board du Canada estime que chaque emploi nucléaire crée environ 2,5 postes supplémentaires dans les industries de soutien, tandis que les professionnels du nucléaire gagnent typiquement 30-45% au-dessus du salaire national moyen pour les postes techniques.
L’expansion du programme de Humber commencera à inscrire des étudiants dès le prochain semestre, avec la première cohorte de diplômés spécialisés en technologie nucléaire entrant sur le marché du travail en 2026. Le collège prévoit former environ 350 étudiants par an une fois que le programme aura atteint sa pleine capacité.
Alors que le Canada navigue dans sa transition énergétique au milieu des préoccupations climatiques mondiales croissantes, la question demeure de savoir si les établissements d’enseignement à travers le pays suivront l’exemple de Humber en préparant la main-d’œuvre spécialisée nécessaire pour alimenter l’avenir nucléaire du Canada. Avec des milliards d’investissements et des milliers de carrières en jeu, la réponse pourrait déterminer si les ambitions nucléaires du Canada se concrétisent ou font face à des retards importants en raison de pénuries de compétences.