Les effets des politiques commerciales agressives du président Trump ont déferlé sur les côtes canadiennes, une nouvelle enquête approfondie révélant que près de la moitié des entreprises canadiennes mettent leurs projets d’investissement en veilleuse. Cette hésitation économique survient alors que les tensions transfrontalières continuent de s’intensifier et que l’incertitude concernant l’avenir de l’ALENA plane sur les conseils d’administration à l’échelle nationale.
Selon des données exclusives obtenues par CO24, 45 % des dirigeants d’entreprises canadiennes déclarent retarder ou reconsidérer des investissements importants directement en raison des tarifs américains et des frictions commerciales persistantes. L’enquête, menée auprès de 400 entreprises de taille moyenne à grande, fournit les premières preuves concrètes de la façon dont les tensions commerciales remodèlent le paysage économique du Canada au-delà des simples spéculations.
« Nous étions prêts à lancer un agrandissement de 12 millions de dollars le trimestre dernier », déclare Martin Lefevre, PDG de NexTech Components, un fabricant de pièces automobiles basé à Montréal. « Mais avec les tarifs sur l’aluminium qui frappent notre chaîne d’approvisionnement et l’incertitude concernant les règles de contenu automobile, nous avons dû faire une pause. Ce sont 60 emplois qui ne sont pas créés en ce moment. »
Le secteur manufacturier signale l’impact le plus sévère, 62 % des entreprises retenant les achats d’équipement et les expansions d’installations planifiés. Les entreprises technologiques suivent de près à 53 %, beaucoup citant des préoccupations concernant la protection de la propriété intellectuelle dans le cadre de nouveaux accords commerciaux potentiels.
La distribution géographique de cette paralysie des investissements est particulièrement révélatrice. Les entreprises ontariennes, profondément intégrées aux chaînes d’approvisionnement américaines, affichent les taux d’hésitation les plus élevés à 58 %, tandis que les entreprises albertaines signalent un recul de 41 %, principalement dans les projets d’infrastructure énergétique.
Au-delà des chiffres globaux, l’enquête révèle trois préoccupations spécifiques qui motivent ce retrait des investissements : l’imprévisibilité des niveaux tarifaires futurs (citée par 73 %), les retards potentiels à la frontière affectant les livraisons juste-à-temps (68 %), et l’incertitude concernant la position concurrentielle du Canada en cas d’effondrement de l’ALENA (61 %).
Malgré les assurances gouvernementales concernant des programmes de soutien et d’aide à la transition, la communauté d’affaires semble peu convaincue. Seulement 27 % des dirigeants interrogés ont exprimé leur confiance dans les stratégies d’atténuation fédérales, beaucoup les décrivant comme « trop peu, trop tard » ou « passant à côté des défis structurels » posés par les différends commerciaux.
Les analystes économiques observent ces développements avec une inquiétude croissante. L’économiste de la Banque TD, Patricia Mendoza, note que des retards d’investissement soutenus pourraient déclencher une « boucle de rétroaction négative » dans l’économie canadienne.
« Quand les entreprises retiennent leur expansion, elles ne retardent pas seulement la construction ou les achats d’équipement – elles retiennent également l’embauche, l’innovation, tout l’écosystème qui stimule la croissance économique », explique Mendoza. « Une pause temporaire peut rapidement devenir une réduction permanente des ambitions. »
La recherche a également recensé des exemples précis de projets mis en attente : une usine de transformation alimentaire de 35 millions de dollars prévue à Saskatoon, un centre de développement logiciel de 22 millions de dollars à Waterloo, et environ 140 millions de dollars d’initiatives de modernisation manufacturière dans le sud de l’Ontario.
Pour les petites entreprises au sein des chaînes d’approvisionnement, l’impact est souvent plus immédiat et grave. « Nous n’avons pas le luxe d’attendre que ça passe », déclare Darren Wilson, qui exploite un atelier d’usinage de précision près de Windsor. « Nous avons déjà réduit notre plan quinquennal et nous nous concentrons simplement sur le mode survie jusqu’à ce que nous sachions dans quelle direction cela va. »
Les responsables gouvernementaux reconnaissent en privé le refroidissement des investissements tout en maintenant un optimisme public. Un haut responsable commercial, s’exprimant sous couvert d’anonymat, a admis : « Nous observons des signaux préoccupants de la part du milieu des affaires, mais restons confiants que la rationalité finira par prévaloir dans les discussions commerciales. »
Reste à voir si cette confiance est justifiée. Avec les deux pays apparemment retranchés dans leurs positions et l’approche du cycle électoral américain, la paralysie des investissements documentée dans cette enquête pourrait représenter non pas une hésitation temporaire, mais le début d’une refonte fondamentale de la relation économique du Canada avec son plus grand partenaire commercial.
La question qui se pose maintenant aux dirigeants d’entreprises canadiennes est crue : attendre que la tempête passe, ou réorienter définitivement leurs stratégies d’investissement vers des marchés moins turbulents?
Pour plus d’informations sur cette histoire en développement, visitez CO24 Affaires pour une couverture continue des tendances économiques canadiennes et CO24 Actualités pour les derniers développements des relations commerciales entre les États-Unis et le Canada.