Les couloirs en béton des écoles de la Saskatchewan se transforment en passerelles vers la compréhension agricole grâce à un programme novateur qui relie les élèves aux origines de leur nourriture. L’initiative «De la Ferme à l’École», qui opère discrètement mais efficacement dans toute la province depuis plusieurs années, comble le fossé grandissant entre le champ et l’assiette—une distance qui s’élargit à chaque génération.
«Beaucoup d’enfants aujourd’hui croient que la nourriture apparaît simplement sur les étagères des épiceries», explique Maria Deptuch, coordinatrice principale de l’initiative. «Quand on demande d’où viennent les œufs, on obtient encore des réponses comme ‘le magasin’ plutôt que ‘les poules’. C’est cette déconnexion fondamentale que nous cherchons à résoudre.»
Le programme adopte une approche multifacette de l’alphabétisation agricole, apportant les expériences fermières directement dans les salles de classe tout en organisant des sorties pédagogiques dans des exploitations agricoles en activité. Ce qui a commencé comme un effort modeste dans la région de Yorkton a progressivement étendu son empreinte, touchant maintenant des milliers d’élèves chaque année à travers la Saskatchewan.
Les données du programme révèlent des tendances préoccupantes concernant les connaissances alimentaires modernes. Selon leurs sondages préalables au programme, environ 65 pour cent des élèves urbains âgés de 8 à 12 ans ne peuvent pas identifier correctement cinq cultures courantes cultivées en Saskatchewan, tandis que près de 40 pour cent sont incapables d’expliquer les étapes de base de la transformation alimentaire pour des aliments de base comme le blé qui devient du pain.
«Nous n’enseignons pas seulement l’agriculture—nous formons des consommateurs informés», souligne Tyler Gabert, un agriculteur participant de la région de Melville. «Quand les jeunes comprennent le travail, la science et les soins nécessaires à la production alimentaire, ils développent à la fois une appréciation et des compétences de pensée critique concernant nos systèmes alimentaires.»
L’initiative a attiré l’attention des éducateurs bien au-delà de sa portée initiale. Les responsables de l’éducation provinciale ont commencé à intégrer des éléments du programme De la Ferme à l’École dans des objectifs d’apprentissage plus larges, reconnaissant sa valeur pour relier l’apprentissage en classe aux applications du monde réel. Le programme s’aligne particulièrement bien avec les normes de sciences et d’études sociales, créant des opportunités d’enseignement naturelles à travers le curriculum.
Ce qui distingue cette initiative des autres efforts d’éducation agricole est son approche pratique. Plutôt que de simplement présenter des informations, les élèves participent activement à des activités agricoles adaptées à leur âge—de la plantation de graines et la compréhension de la santé des sols à l’apprentissage des innovations technologiques en agriculture.
«Le moment où un élève comprend pour la première fois que les frites qu’il adore proviennent de pommes de terre cultivées sous terre, ou que l’huile de canola commence comme de minuscules graines noires—ce sont des moments éducatifs puissants», dit Deptuch. «Nous créons des connexions qui durent bien au-delà de la salle de classe.»
Le soutien financier du programme provient d’une combinaison d’associations agricoles, de subventions gouvernementales et de partenaires du secteur privé ayant des intérêts dans l’avenir agricole du Canada. Cependant, le financement demeure un défi permanent car la demande pour le programme continue de dépasser les ressources disponibles.
L’initiative aborde également le défi continu du secteur agricole en matière de développement de la main-d’œuvre. Avec l’âge moyen des agriculteurs canadiens dépassant maintenant 55 ans, présenter aux jeunes les possibilités de carrière agricole est devenu de plus en plus urgent pour la durabilité du secteur.
Alors que les populations urbaines continuent de s’éloigner de la production agricole, des programmes comme l’initiative De la Ferme à l’École servent de ponts essentiels vers la compréhension. La question demeure: à une époque où la technologie nous sépare de plus en plus de nos sources alimentaires, comment allons-nous garantir que les générations futures maintiennent les connaissances et les liens nécessaires pour comprendre d’où vient réellement leur nourriture?