La Marine royale canadienne continue de faire face à de graves pénuries de personnel en 2025, avec des niveaux de recrutement nettement inférieurs aux objectifs nécessaires pour maintenir sa capacité opérationnelle. Malgré une série de campagnes de recrutement intensives lancées plus tôt cette année, le vice-amiral Angus Topshee a reconnu hier que la Marine demeure environ 14 % en dessous des niveaux de dotation optimaux.
« Nous sommes confrontés à une tempête parfaite de défis de recrutement », a expliqué Topshee lors d’une conférence de presse à la BFC Halifax. « La combinaison des salaires concurrentiels du secteur privé, l’évolution des attentes professionnelles des jeunes Canadiens et notre infrastructure vieillissante créent des lacunes persistantes dans tous nos services. »
Des documents internes obtenus par le biais de demandes d’accès à l’information révèlent que les postes techniques spécialisés font face aux pénuries les plus critiques. Le génie naval, la cybersécurité et les opérations de systèmes d’armement avancés—des rôles qui nécessitent une formation et une expertise considérables—affichent des taux de vacance dépassant 20 % dans certains départements.
Cette crise de recrutement survient à un moment particulièrement difficile pour la stratégie de défense maritime du Canada. Les tensions récentes dans la région arctique et l’activité navale croissante de la Russie et de la Chine ont souligné l’importance stratégique de maintenir une force navale pleinement opérationnelle. Les analystes de défense avertissent que les pénuries de personnel continues pourraient compromettre la capacité du Canada à remplir ses engagements envers l’OTAN et à protéger ses eaux souveraines.
« Ce que nous observons n’est pas simplement un problème de dotation—c’est une préoccupation de sécurité nationale », affirme Dre Margaret Chambers, experte en politique de défense au Collège militaire royal. « Les lacunes de capacité de la Marine ont un impact direct sur la position du Canada dans le cadre de sécurité internationale. »
Le ministère de la Défense nationale a répondu par une stratégie de recrutement d’urgence qui comprend des primes à la signature allant jusqu’à 25 000 $ pour les postes critiques, des programmes de formation accélérés et des services améliorés de soutien aux familles. De plus, la Marine a révisé plusieurs politiques de longue date concernant les horaires de déploiement et l’avancement professionnel pour rendre le service naval plus attrayant pour les jeunes Canadiens.
La capitaine de corvette Sophia Martinez, qui supervise le recrutement pour la flotte de l’Atlantique, souligne que l’évolution des attentes de la main-d’œuvre constitue un défi central. « Les recrues d’aujourd’hui recherchent des choses différentes des générations précédentes. Ils veulent un travail significatif, certes, mais aussi un équilibre travail-vie personnelle, l’innovation technologique et une progression de carrière claire. Nous adaptons notre approche pour répondre à ces priorités. »
Les problèmes de recrutement s’étendent au-delà de la force régulière. La Réserve navale a signalé des difficultés similaires pour attirer et retenir du personnel, certaines unités de réserve fonctionnant à peine à 65 % de leur capacité. Cela a davantage mis à l’épreuve la capacité de la force régulière à répondre aux exigences opérationnelles, car les réserves complètent traditionnellement les capacités de la force régulière pendant les périodes de tempo opérationnel élevé.
Les réponses politiques à la crise ont été mitigées. Le gouvernement a promis 340 millions de dollars supplémentaires pour les initiatives de recrutement et de rétention dans le cadre d’un ensemble plus large de dépenses de défense, tandis que les critiques de l’opposition soutiennent que des années de sous-investissement dans l’infrastructure militaire et le personnel ont créé la crise actuelle.
Les experts de l’industrie maritime notent que les difficultés de la Marine reflètent des tendances plus larges dans le secteur naval mondial. « La plupart des marines occidentales connaissent des défis similaires », explique l’analyste maritime James Holden. « Les compétences spécialisées requises pour les opérations navales modernes sont très demandées dans de multiples industries, créant une concurrence intense pour le talent. »
Alors que la Marine royale canadienne navigue dans ces eaux troubles, la question fondamentale demeure : le Canada peut-il inverser ces tendances inquiétantes de recrutement avant qu’elles n’affectent notre posture de sécurité nationale, ou nos capacités de défense maritime continueront-elles de s’éroder dans un environnement de sécurité mondiale de plus en plus complexe?