Dans un affrontement saisissant entre la surveillance internationale des droits de l’homme et la politique nationale, le programme d’Aide Médicale à Mourir (AMM) du Canada a suscité de vives critiques de la part des experts des Nations Unies, alors même que le gouvernement fédéral défend fermement sa législation controversée.
Le Comité des Nations Unies sur les droits des personnes handicapées a récemment émis une évaluation cinglante du programme élargi d’AMM du Canada, soulignant particulièrement des préoccupations concernant son application aux personnes dont la seule condition sous-jacente est un handicap. Le Comité s’est alarmé que le Canada semble avoir créé un système où les personnes handicapées pourraient choisir la mort non pas comme un choix véritablement libre, mais en raison de systèmes de soutien inadéquats et de pressions sociales.
“Ce que nous observons est sans précédent dans les nations développées,” a déclaré Dre Catherine Frazee, professeure émérite à l’Université Métropolitaine de Toronto et défenseure de longue date des droits des personnes handicapées. “Le Comité de l’ONU a essentiellement déclaré que le régime d’AMM du Canada pourrait violer des engagements fondamentaux en matière de droits humains en créant des voies vers la mort qui touchent de manière disproportionnée les personnes handicapées.”
La controverse se concentre sur l’expansion en 2021 de l’admissibilité à l’AMM au-delà des personnes dont la mort est “raisonnablement prévisible”, étendant l’accès aux personnes ayant des handicaps graves même lorsqu’elles ne sont pas en phase terminale. Cette expansion a déclenché un débat intense au sein du paysage politique canadien et parmi les communautés d’éthique médicale.
Le ministre de la Justice Arif Virani a défendu la position du gouvernement, insistant sur le fait que le cadre d’AMM du Canada comprend des garanties solides. “Nous avons développé un système qui équilibre l’autonomie individuelle avec des protections appropriées,” a déclaré Virani lors d’une récente conférence de presse. “Notre législation reflète les valeurs canadiennes et offre des options compatissantes tout en protégeant les personnes vulnérables.”
Cependant, les défenseurs des personnes handicapées soulignent des cas troublants qui suggèrent que le système pourrait faillir à ceux qu’il prétend protéger. Des rapports d’individus demandant l’AMM en raison de la pauvreté, de l’insécurité du logement ou de soutiens inadéquats aux personnes handicapées ont soulevé de sérieuses questions quant à savoir si les choix de mettre fin à la vie sont vraiment libres et éclairés lorsque les besoins fondamentaux ne sont pas satisfaits.
“Le gouvernement ne peut pas prétendre offrir un ‘choix’ quand il ne fournit pas d’alternatives viables,” a déclaré Sarah Jama, directrice exécutive du Réseau de justice pour les personnes handicapées de l’Ontario. “Quel genre de choix est-ce quand une personne handicapée peut accéder à l’AMM en quelques semaines mais pourrait attendre des années pour un logement accessible ou des soins à domicile adéquats?”
Les préoccupations du Comité de l’ONU font écho aux avertissements d’experts nationaux qui ont longtemps mis en garde contre les conséquences potentielles du régime élargi d’AMM du Canada. Malgré ces avertissements, le gouvernement fédéral a montré peu d’inclination à suspendre ou à reconsidérer la portée du programme, maintenant que les garanties existantes sont suffisantes.
Les statistiques de Santé Canada révèlent une augmentation constante des décès par AMM depuis la légalisation, avec plus de 10 000 Canadiens choisissant cette option en 2021 seulement. Bien que la majorité continue d’être des personnes atteintes de cancer en phase terminale, le nombre de cas non terminaux a commencé à augmenter suite à l’expansion de l’admissibilité en 2021.
Les critiques internationales placent le Canada dans une position inconfortable sur la scène mondiale, particulièrement compte tenu de son rôle traditionnel de champion des droits de l’homme et des politiques sociales progressistes. Certains observateurs notent l’ironie que le Canada reçoive des critiques d’un organisme de l’ONU qu’il soutient et cite habituellement lorsqu’il aborde les questions de droits humains dans d’autres nations.
Le Parlement doit examiner d’autres propositions d’expansions de l’AMM, y compris l’accès potentiel pour ceux dont la maladie mentale est la seule condition sous-jacente, bien que cette expansion ait été retardée face aux préoccupations croissantes.
Alors que ce débat se poursuit, la question centrale demeure: une société peut-elle prétendre valoriser véritablement la vie et les droits des personnes handicapées tout en leur offrant simultanément une aide à mourir lorsque les soutiens sociaux échouent? La réponse pourrait finalement déterminer non seulement l’avenir de l’AMM au Canada, mais aussi l’engagement de la nation envers ses citoyens les plus vulnérables.