Les lignes téléphoniques de l’Agence du revenu du Canada ont encore une fois planté durant cette saison des impôts, laissant des contribuables frustrés en attente pendant des heures ou incapables de se connecter. Malgré des milliards de dollars de financement supplémentaire et l’embauche de milliers de nouveaux employés depuis 2021, l’ARC continue de lutter avec la prestation de services fondamentaux—soulevant de sérieuses questions sur l’utilisation efficace de l’argent des contribuables.
“C’est devenu une tradition annuelle aussi prévisible que la saison des impôts elle-même,” affirme Raymond Leclair, un spécialiste fiscal avec plus de 25 ans d’expérience. “Les Canadiens essaient de joindre l’ARC pour une assistance de base, seulement pour rencontrer des signaux occupés, des déconnexions ou des temps d’attente interminables. La différence maintenant, c’est que l’agence dispose de beaucoup plus de ressources que jamais.”
Dans le budget 2021, le gouvernement fédéral a alloué 2,1 milliards de dollars sur cinq ans à l’ARC pour des activités de conformité fiscale, suivi d’un autre 2 milliards dans le budget 2023 pour augmenter les recouvrements et améliorer les services. Ce financement devait moderniser les systèmes, améliorer les services numériques et l’expérience des contribuables—pourtant les problèmes persistent et, dans certains cas, se sont aggravés.
Des documents internes obtenus par des demandes d’accès à l’information révèlent des statistiques préoccupantes. Les indicateurs de performance de l’ARC montrent que les temps d’attente des centres d’appels ont atteint en moyenne 72 minutes pendant les périodes de pointe cette année, avec environ 40% des appels déconnectés avant de joindre un agent. Plus troublant encore, lors d’audits de précision, les représentants de l’ARC ont fourni des informations incorrectes aux contribuables dans près de 23% des cas tests.
Le directeur parlementaire du budget a récemment mené une analyse du financement accru de l’ARC, concluant que bien que l’agence ait embauché environ 7 500 nouveaux employés depuis 2021, la productivité et les mesures de service ont diminué dans plusieurs catégories. “[L’ARC] a considérablement élargi son effectif sans améliorations correspondantes des résultats de performance,” indique le rapport.
L’implémentation technologique s’est avérée particulièrement problématique. Les efforts de modernisation informatique de l’ARC, qui ont reçu 691 millions de dollars de financement spécial, ont fait face à des retards répétés et des dépassements de budget. Trois grands projets de transformation numérique restent inachevés, avec des années de retard, dont un remplacement de système déjà 78 millions de dollars au-dessus du budget.
“Il y a un décalage fondamental entre les ressources et les résultats,” explique Dre Amelia Chen, professeure d’administration publique à l’Université de Toronto. “L’ARC reçoit un financement substantiel mais lutte avec des problèmes structurels comme des pratiques de gestion dépassées, des programmes de formation inadéquats et une mauvaise intégration technologique.”
Pour les contribuables comme Michael Okonjo, propriétaire d’une petite entreprise à Calgary, les conséquences vont au-delà de l’inconvénient. “J’ai passé huit heures sur trois jours à essayer de résoudre une simple question de TPS. Finalement, j’ai abandonné et engagé un comptable, ce qui m’a coûté 400 $ pour quelque chose que l’ARC aurait dû traiter en quelques minutes.”
Les professionnels de l’impôt rapportent des frustrations similaires. “Nous n’avons vu aucune amélioration dans les temps de réponse ou la précision malgré les ressources accrues de l’agence,” dit Diane Leblanc, présidente de l’Association canadienne des spécialistes en fiscalité. “En fait, plusieurs de nos membres signalent que les erreurs administratives ont augmenté, créant un travail inutile tant pour les contribuables que pour les praticiens.”
L’ARC a répondu aux critiques en soulignant la complexité de l’administration fiscale et les défis persistants de la pandémie. Dans une déclaration, le commissaire de l’ARC Bob Hamilton a reconnu les problèmes de service mais a souligné les progrès dans les options de déclaration numérique et le recouvrement par l’agence de milliards en impôts impayés.
Les critiques rétorquent que si les activités d’application ont augmenté, les améliorations de service de base restent insaisissables. Le porte-parole conservateur en matière de finances Jasraj Singh Hallan a récemment déclaré : “Les Canadiens paient plus pour un service pire. Le gouvernement continue de jeter de l’argent à l’ARC sans exiger de responsabilité pour les résultats.”
Alors que la saison fiscale 2024 se poursuit, le contraste entre les ressources élargies de l’ARC et ses échecs de service persistants soulève une question cruciale : Est-ce que plus de financement et de personnel se traduiront un jour par un meilleur service pour les contribuables canadiens, ou une restructuration plus fondamentale de l’agence est-elle nécessaire?