Dans une décision historique qui pourrait redéfinir les interactions policières à travers la province, la Cour supérieure du Québec a autorisé une action collective contestant la pratique des contrôles routiers aléatoires par les agents de police. La décision, rendue vendredi, ouvre la porte à potentiellement des milliers d’automobilistes cherchant réparation pour ce que les plaignants décrivent comme des pratiques discriminatoires et inconstitutionnelles.
L’action collective cible spécifiquement les contrôles effectués sans motifs raisonnables, que les critiques soutiennent depuis longtemps comme affectant de manière disproportionnée les minorités raciales et contribuant à la discrimination systémique au sein du cadre d’application de la loi québécois.
“Cette autorisation représente une étape cruciale vers la responsabilisation des pratiques policières qui sont restées sans surveillance pendant trop longtemps,” a déclaré Marie Cloutier, avocate principale des plaignants. “Les contrôles aléatoires sans soupçon raisonnable violent les droits fondamentaux de la Charte et minent la confiance du public envers les forces de l’ordre.”
La poursuite a émergé suite à plusieurs incidents médiatisés documentés entre 2018 et 2022, où des conducteurs alléguaient avoir été interceptés malgré le respect de toutes les règles de circulation. Les données compilées par des groupes de défense communautaire indiquent que les conducteurs noirs et autochtones étaient jusqu’à quatre fois plus susceptibles d’être soumis à de tels contrôles par rapport à leurs homologues blancs.
Le ministère de la Sécurité publique du Québec a défendu les pratiques existantes, soutenant que les contrôles aléatoires servent d’outil légitime pour assurer la sécurité routière et détecter la conduite avec facultés affaiblies. Cependant, le juge Pierre Nollet, dans sa décision de 42 pages, a noté que “les avantages potentiels de telles pratiques doivent être pesés contre leur impact démontré sur les libertés civiles et l’égalité de traitement devant la loi.”
La certification de cette action collective fait suite à des contestations juridiques similaires en Ontario, où la Cour supérieure a statué en 2022 que les contrôles routiers aléatoires sans cause violent l’article 9 de la Charte canadienne des droits et libertés, qui protège contre la détention arbitraire.
Les associations policières à travers le Québec ont exprimé des préoccupations quant à l’impact potentiel de la décision sur le pouvoir discrétionnaire des agents et les mesures de sécurité publique. Jean Tremblay, porte-parole de la Fédération des policiers du Québec, a déclaré que “retirer cet outil de l’arsenal des agents pourrait entraver leur capacité à prévenir les comportements de conduite dangereux avant qu’ils ne causent des accidents.”
L’action collective vise à la fois des dommages-intérêts compensatoires pour les conducteurs affectés et, plus significativement, une déclaration judiciaire interdisant la pratique des contrôles routiers aléatoires sans motifs raisonnables dans toute la province. Les experts juridiques estiment que les dommages pourraient potentiellement atteindre des dizaines de millions de dollars si les plaignants l’emportent.
Les défenseurs communautaires saluent la décision de la cour comme un moment décisif dans la jurisprudence canadienne des droits civils. “Il ne s’agit pas seulement de compensation monétaire,” a expliqué Daniel Washington de la Coalition contre le profilage. “Il s’agit d’établir des limites constitutionnelles claires pour la conduite policière et d’