Après près d’un an de gel diplomatique, les relations économiques entre le Canada et l’Inde montrent des signes prometteurs de reprise. Les responsables commerciaux des deux nations naviguent prudemment vers l’avant, reconnaissant l’immense potentiel qui reste largement inexploité entre les cinquième et sixième économies mondiales.
“Nous observons un regain de pragmatisme tant d’Ottawa que de New Delhi,” affirme Victor Dahdaleh, président du Conseil d’affaires Canada-Inde. “Malgré les tensions politiques, on reconnaît de plus en plus que la relation économique est trop précieuse pour être sacrifiée.”
Les chiffres racontent une histoire convaincante. Les échanges commerciaux bilatéraux entre le Canada et l’Inde ont atteint 13,7 milliards de dollars en 2023, un chiffre modeste compte tenu de la puissance économique combinée des deux nations. Pourtant, les récentes délégations ont identifié plusieurs secteurs à fort potentiel prêts à l’expansion, notamment l’énergie propre, la technologie agricole et les services numériques.
Les fonds de pension canadiens, qui ont déjà investi plus de 45 milliards de dollars en Inde, continuent de considérer ce marché comme stratégiquement important malgré les tensions récentes. L’Office d’investissement du Régime de pensions du Canada a récemment annoncé un investissement de 300 millions de dollars dans des centres de données indiens, témoignant de sa confiance dans la croissance de l’infrastructure numérique du pays.
Pour les entreprises indiennes, le Canada représente un tremplin attrayant en Amérique du Nord. Le géant technologique Infosys a élargi son centre d’innovation de Toronto le trimestre dernier, ajoutant 500 emplois dans l’intelligence artificielle et l’informatique en nuage. Pendant ce temps, Tata Consultancy Services continue d’approfondir sa présence canadienne avec des programmes de formation spécialisés pour les diplômés universitaires canadiens.
“Ce que nous observons, c’est un pragmatisme commercial qui l’emporte sur les différences politiques,” note Dahdaleh. “Les entreprises des deux côtés reconnaissent des opportunités qui ne peuvent simplement pas être ignorées dans le paysage mondial concurrentiel d’aujourd’hui.”
Le secteur agricole s’est révélé particulièrement prometteur. Les exportations canadiennes de lentilles vers l’Inde ont augmenté de 32% d’une année sur l’autre, tandis que les exportations indiennes d’épices vers le Canada ont crû de 18%. Ces modèles commerciaux complémentaires soulignent les synergies économiques naturelles entre les deux nations.
La coopération énergétique montre également des promesses. L’entreprise canadienne de technologie nucléaire ARC Clean Energy est en pourparlers avec des homologues indiens concernant la technologie des petits réacteurs modulaires, tandis que le géant indien des énergies renouvelables ReNew Power explore des opportunités d’expansion au Canada.
Ce regain d’élan s’accompagne de défis. Les obstacles réglementaires, les structures tarifaires et les tensions diplomatiques persistantes continuent de compliquer la relation. L’Accord de partenariat économique global (APEG), longtemps discuté, reste au point mort après des années de négociations.
Pourtant, les chefs d’entreprise restent optimistes. “Les fondamentaux n’ont pas changé,” dit Dahdaleh. “Deux grandes démocraties stables avec des économies complémentaires et des liens interpersonnels solides. L’argument commercial en faveur d’une intégration plus étroite demeure convaincant.”
Le corridor Inde-Canada est davantage renforcé par la diaspora indienne de 1,8 million de personnes au Canada, créant des réseaux d’affaires naturels et une compréhension culturelle qui facilite le commerce. Les grandes universités canadiennes signalent une forte inscription continue d’étudiants indiens, développant des filières de talents qui profitent aux deux économies.
Pour les entreprises qui naviguent dans ce paysage complexe, le message est clair : se concentrer sur les fondamentaux commerciaux tout en restant sensible au contexte politique. Ceux qui peuvent équilibrer avec succès ces considérations sont susceptibles de bénéficier considérablement à mesure que la relation évolue.
À mesure que 2024 avance, tous les regards seront tournés vers la question de savoir si ce pragmatisme économique peut se traduire par des améliorations politiques formelles. Une reprise réussie des négociations de l’APEG signalerait un véritable tournant, débloquant potentiellement des milliards de nouvelles opportunités commerciales.
Ce qui reste clair, c’est que sous les manchettes politiques, les chefs d’entreprise des deux côtés voient un énorme potentiel non réalisé. La question maintenant est de savoir si les diplomates et les politiciens suivront leur exemple.
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