La ville animée de Saskatoon s’est transformée hier en épicentre politique du Canada alors que le premier ministre Justin Trudeau et les premiers ministres provinciaux se sont réunis pour un sommet historique axé sur le démantèlement des barrières commerciales interprovinciales et l’accélération de projets d’infrastructure critiques. Cette rencontre de haute importance survient à un moment crucial où la croissance économique a ralenti à des niveaux préoccupants et l’inflation continue de comprimer les budgets des ménages à travers le pays.
“Ce sommet représente une rare occasion de redéfinir la vision économique de la fédération,” a expliqué le premier ministre de la Saskatchewan, Scott Moe, qui a accueilli la réunion à l’emblématique hôtel Delta Bessborough. “Quand les biens et services ne peuvent pas circuler librement entre les provinces, nous imposons essentiellement une taxe auto-infligée sur la prospérité canadienne.”
L’ordre du jour ambitieux était centré sur deux objectifs principaux : éliminer la mosaïque de réglementations provinciales qui entravent le commerce intérieur et identifier des projets d’infrastructure transformateurs qui pourraient renforcer l’épine dorsale économique du Canada. Des études du Fonds monétaire international estiment que l’élimination des barrières commerciales interprovinciales pourrait ajouter entre 50 et 130 milliards de dollars annuellement au PIB du Canada – une stimulation économique potentielle équivalente à environ 4-7% de l’économie nationale.
Les premiers ministres des provinces riches en ressources, notamment Danielle Smith de l’Alberta et Andrew Furey de Terre-Neuve, ont plaidé avec force pour des projets de corridors énergétiques qui faciliteraient le mouvement du pétrole, du gaz naturel et de l’électricité à travers les frontières provinciales. Pendant ce temps, le premier ministre de l’Ontario, Doug Ford, a souligné le besoin urgent de moderniser les réseaux de transport entre le cœur manufacturier du Canada et les marchés internationaux.
“L’infrastructure ne concerne pas seulement le béton et l’acier – il s’agit de connecter les Canadiens aux opportunités,” a noté Trudeau dans ses remarques d’ouverture. “Chaque dollar que nous investissons stratégiquement maintenant rapporte des dividendes pour les générations à venir.”
La réunion n’était pas sans tensions. Le premier ministre du Québec, François Legault, a maintenu la position traditionnelle de sa province sur l’autonomie juridictionnelle, tandis que David Eby de la Colombie-Britannique a insisté pour un plus grand soutien fédéral pour l’infrastructure de logement. Ces différences ont mis en évidence le délicat équilibre nécessaire pour forger un consensus national dans une fédération aux intérêts régionaux divers.
L’aspect peut-être le plus prometteur était l’accord pour établir un nouveau groupe de travail fédéral-provincial sur les barrières commerciales internes, avec mandat de livrer des recommandations exploitables dans les six mois. L’initiative donnera priorité à l’harmonisation des qualifications professionnelles, la standardisation des codes du bâtiment et la simplification des politiques d’approvisionnement – domaines identifiés par les leaders d’entreprises comme particulièrement contraignants.
“La réalité est qu’il est souvent plus facile pour une entreprise canadienne de faire des affaires avec les États-Unis qu’avec une autre province,” a fait remarquer Perrin Beatty, président de la Chambre de commerce du Canada, qui a participé à une session avec les parties prenantes. “Cela défie la logique économique et mine notre compétitivité mondiale.”
Le sommet a également abordé la question cruciale des projets d’infrastructure nationaux. Les participants ont discuté des mécanismes potentiels de financement fédéral pour les corridors de transport, les réseaux de transmission d’énergie et l’infrastructure numérique qui traverse les frontières provinciales. Une liste préliminaire de projets prioritaires devrait être finalisée d’ici septembre, avec des engagements de financement qui pourraient former une pièce maîtresse du prochain budget fédéral.
Les considérations climatiques sont restées omniprésentes tout au long des discussions. Plusieurs premiers ministres ont souligné que la modernisation des infrastructures doit s’aligner sur les objectifs de réduction des émissions du Canada, bien que des désaccords persistent sur le rythme approprié de la transition énergétique.
À la conclusion du sommet, les participants ont démontré une rare unanimité en reconnaissant l’impératif économique de la libéralisation du commerce intérieur. Cependant, le véritable test viendra dans la phase de mise en œuvre, où les intérêts provinciaux ont historiquement compliqué les progrès sur des initiatives similaires.
Alors que les Canadiens naviguent dans des eaux économiques incertaines, la question fondamentale émerge : nos dirigeants politiques peuvent-ils transformer ces discussions prometteuses en actions concrètes qui renforcent l’intégration économique nationale, ou les considérations régionales entraveront-elles encore une fois la voie vers un marché canadien véritablement uni?