Alors que Donald Trump se prépare à retourner à la Maison-Blanche en janvier 2025, le corps diplomatique canadien élabore une approche prudente pour gérer ce qui s’annonce comme une relation délicate. Selon Kirsten Hillman, ambassadrice du Canada aux États-Unis, le voisin du nord devra naviguer avec patience mesurée et engagement stratégique face à la prochaine administration Trump.
“Nous allons devoir avancer une étape à la fois,” a déclaré Hillman aux journalistes lors d’un récent forum diplomatique à Ottawa. “La relation entre nos pays est profonde, complexe, et ultimement fondée sur des intérêts mutuels qui transcendent n’importe quelle administration.”
Cette approche prudente reflète les leçons durement acquises durant le premier mandat de Trump, lorsque le Canada s’est retrouvé à plusieurs reprises dans la ligne de mire de tarifs inattendus, de renégociations de traités et de critiques publiques. Les relations commerciales ont été particulièrement tendues pendant les négociations de l’ACEUM, qui a remplacé l’ALENA sous une pression considérable de l’administration Trump.
Les analystes économiques de CO24 Affaires soulignent que l’économie canadienne, dépendante des exportations, demeure vulnérable aux potentielles perturbations commerciales. Avec environ 75% des exportations canadiennes destinées au marché américain, les enjeux ne pourraient être plus élevés pour le gouvernement du premier ministre Justin Trudeau.
“Le défi pour le Canada sera d’équilibrer des positions de principe sur les questions internationales tout en maintenant des relations de travail productives avec les figures clés de la prochaine administration,” explique Dre Eleanor Matthews, professeure de relations internationales à l’Université de Toronto. “C’est une danse délicate qui nécessite à la fois fermeté et souplesse.”
Des sources au sein d’Affaires mondiales Canada, s’exprimant sous couvert d’anonymat pour discuter des préparatifs diplomatiques sensibles, indiquent que le gouvernement développe des plans de contingence depuis début 2024. Ces stratégies se concentrent particulièrement sur les intérêts économiques canadiens dans les secteurs précédemment ciblés par Trump, notamment l’acier, l’aluminium, le bois d’œuvre et l’industrie automobile.
“Nous avons passé les quatre dernières années à bâtir des relations avec les gouverneurs d’États, les représentants du Congrès et les leaders industriels qui comprennent la valeur de la relation canado-américaine,” a expliqué un haut fonctionnaire. “Ces connexions seront cruciales dans les mois à venir.”
Le manuel diplomatique comprend également un engagement renforcé avec ce que les initiés appellent les “figures stabilisatrices” dans le cercle intime de Trump – conseillers et membres du cabinet qui ont démontré du pragmatisme dans les affaires internationales. Cette approche s’est avérée relativement efficace durant le premier mandat de Trump, lorsque certains responsables de l’administration ont contribué à modérer certaines des impulsions les plus perturbatrices du président envers le Canada.
Les leaders d’entreprises canadiennes expriment un optimisme prudent, ayant survécu à la précédente présidence Trump. “Nous avons déjà traversé cette épreuve et en sommes sortis avec notre relation commerciale intacte, quoique avec certains ajustements,” a déclaré Michael Denham, président de la Chambre de commerce du Canada. “Le milieu des affaires sait s’adapter aux changements politiques.”
Les recherches d’opinion publique suggèrent que la plupart des Canadiens soutiennent une approche pragmatique. Un récent sondage de l’Institut Angus Reid a révélé que 68% des Canadiens estiment que leur gouvernement devrait prioriser une coopération pratique sur les intérêts communs plutôt qu’une confrontation sur les différences de valeurs.
Pour les observateurs politiques canadiens, les mois à venir révéleront beaucoup sur la trajectoire future des relations canado-américaines. Une attention particulière sera portée aux choix de cabinet de Trump, notamment pour les postes ayant une influence directe sur la politique commerciale, la sécurité frontalière et la coopération nord-américaine en matière de défense.
Comme l’a souligné l’ambassadrice Hillman dans ses remarques finales, “La relation canado-américaine a traversé de nombreuses tempêtes tout au long de son histoire. Bien que des défis se profilent sans doute à l’horizon, notre géographie partagée, nos économies intégrées et nos intérêts communs fournissent une base qui transcende les cycles politiques.”
Alors que nous observons cette stratégie diplomatique se déployer, la question demeure : l’approche étape par étape du Canada pourra-t-elle protéger efficacement ses intérêts tout en maintenant une relation productive avec un président connu pour son imprévisibilité et sa diplomatie transactionnelle?