Dans une escalade dramatique des tensions entre alliés voisins, l’ancien président Donald Trump a menacé de mettre fin aux négociations commerciales avec le Canada si le gouvernement Trudeau poursuit sa controversée taxe sur les services numériques. Cette confrontation marque un retour potentiel à la position commerciale combative qui caractérisait la première administration Trump, envoyant des ondes de choc à travers les marchés financiers et les cercles diplomatiques.
“La taxe numérique du Canada n’est rien d’autre qu’une attaque directe contre l’innovation et le succès américains,” a déclaré Trump lors d’un rassemblement de campagne au Michigan hier. “Si Trudeau ne recule pas immédiatement, je couperai toutes les négociations commerciales dès mon retour au pouvoir. L’Amérique ne se laissera plus exploiter.”
La taxe sur les services numériques, qui doit entrer en vigueur le 1er janvier, imposerait un prélèvement de 3% sur les revenus générés par les grandes entreprises technologiques opérant au Canada, affectant principalement les géants américains comme Google, Amazon et Facebook. La ministre canadienne des Finances, Chrystia Freeland, a défendu cette mesure comme nécessaire pour s’assurer que les entreprises numériques “paient leur juste part” tout en créant des conditions équitables pour les entreprises canadiennes.
Les analystes économiques de la Banque Royale du Canada estiment que la taxe pourrait générer environ 4,2 milliards de dollars canadiens de revenus sur cinq ans, mais mettent en garde contre d’éventuelles mesures de représailles qui pourraient coûter bien plus à l’économie canadienne.
“C’est un dangereux jeu de poker,” explique Dre Eleanor Weston, professeure de commerce international à l’Université de Toronto. “Bien que le Canada ait des préoccupations légitimes concernant l’évasion fiscale des géants de la technologie, le moment ne pourrait être pire compte tenu des sondages favorables à Trump et de son historique d’agression commerciale envers le Canada.”
Le différend ravive les souvenirs des tendues renégociations de l’ALENA durant le premier mandat de Trump, lorsqu’il menaçait régulièrement de déchirer complètement l’accord avant de finalement conclure l’ACEUM. Cet accord est prévu pour sa première révision formelle en 2026, ajoutant une pression supplémentaire pour résoudre l’impasse sur la taxe numérique.
Les chefs d’entreprise canadiens ont exprimé leurs inquiétudes quant aux retombées potentielles. Le Conseil canadien des affaires a publié une déclaration exhortant le gouvernement à “peser soigneusement les avantages de la taxe numérique contre les risques de représailles américaines, particulièrement dans des secteurs comme la fabrication automobile et l’agriculture.”
Pendant ce temps, l’administration Biden a maintenu une approche plus mesurée, poursuivant les discussions commerciales tout en exprimant de “sérieuses réserves” sur les plans fiscaux du Canada par voies diplomatiques. Cependant, des responsables du Département d’État s’exprimant sous couvert d’anonymat reconnaissent qu’une potentielle seconde présidence Trump pourrait radicalement modifier la relation.
Les responsables canadiens soutiennent qu’ils ont conçu la taxe pour se conformer aux normes internationales et notent que des mesures similaires ont été mises en œuvre par la France, l’Italie et le Royaume-Uni. Toutefois, les critiques soulignent que ces pays ne partagent pas une frontière ou l’intégration économique profonde qui définit la relation Canada-États-Unis.
“Environ 75% des exportations canadiennes vont aux États-Unis, tandis que seulement 18% des exportations américaines viennent au Canada,” note l’économiste commerciale Patricia Sandoval. “Cette asymétrie donne aux États-Unis un levier considérable dans tout différend, quelle que soit l’administration au pouvoir.”
Alors que les deux pays se préparent à d’éventuels changements de politique, les entreprises des deux côtés de la frontière élaborent des plans d’urgence. Les entreprises technologiques ont averti de potentielles réductions de services au Canada, tandis que les exportateurs canadiens diversifient leurs clientèles lorsque possible.
Ce qui reste incertain, c’est si cela représente une rhétorique de campagne typique ou une véritable position politique qui se traduirait en action si Trump revenait au pouvoir. Quoi qu’il en soit, la controverse souligne le défi perpétuel auquel le Canada fait face: équilibrer les objectifs de politique souveraine contre la réalité économique de vivre à côté de la plus grande économie mondiale.
Alors que ce différend se déroule dans le contexte de l’évolution des modèles commerciaux mondiaux et de la transformation de l’économie numérique, nous devons nous demander: comment des puissances moyennes comme le Canada peuvent-elles affirmer efficacement leur souveraineté fiscale tout en maintenant des relations économiques cruciales avec les superpuissances dans un monde de plus en plus numérisé?